Nouvel espoir

vanesse

Toute ma vie, je me souviendrai du jour où je l’ai rencontrée.

J’avais quitté dans l’après-midi la région parisienne. C’était un vendredi, premier jour des vacances de Noël. Alors bien sûr, j’avais passé plusieurs heures dans les embouteillages du périphérique parisien. J’avais vraiment hâte d’arriver chez mes parents parce que malgré mes pauses sur l’A13 pour me dégourdir les jambes, je me sentais à l’étroit dans ma petite Punto. La nuit était tombée et le brouillard commençait à se lever, j’étais contente d’arriver sur la D524. Une route que je connaissais si bien. Enfin c’est ce que je pensais, quand je fus distraite par l’envol d’une chouette. C’est alors que je le vis marchant sur le bord de la route. Je fus surprise et donna un coup de volant à gauche pour éviter de le heurter mais la chaussée était glissante et la voiture quitta sa trajectoire. Par un mauvais réflexe, j’écrasai la pédale de frein et je stoppai la voiture en travers de la route. Mes mains étaient restées crispées sur le volant, ma respiration était haletante et mon cœur cognait très fort dans ma poitrine. Je ne pus réprimer un petit cri de frayeur lorsque j’entendis frapper à la vitre du côté passager. J’avais envie de tourner la clé du contact pour redémarrer et filer en vitesse, mais mon corps refusait de m’obéir. Il ouvrit la portière côté passager et s’assit sur le siège. Il ôta sa capuche et je restai bouche bée (à quoi je m’attendais ? Je ne sais pas peut-être à voir un vieux pervers). Jamais, je n’avais vu une telle beauté : un grain de peau parfait, un visage si bien dessiné, des cheveux d’une extrême souplesse (j’en étais presque jalouse) et d’un blond-roux brillant. Je me souvenais avoir lu la Saga du désir interdit, cet homme ne pouvait être Edward Cullen. Mon dieu, faites que ce ne soit pas un vampire ! Ma peur avait dû inquiéter mon inconnu parce qu’il me demanda :

-        Mademoiselle, vous vous sentez bien ?

J’essayai de remettre en ordre mes idées.

-        Euh oui, je vais…bien.

C’était d’ailleurs vrai dès qu’il avait prononcé ces mots, une douce chaleur avait parcouru tout mon corps. Je n’avais pas ressentie cela depuis…longtemps.

-        Je m’excuse de vous avoir fait si peur. Ce n’était pas mon intention. Les gens n’ont pas toujours cette réaction en me voyant.

Je ne compris pas vraiment ce qu’il voulait dire mais je lui répondis :

-        Non, c’est moi qui suis désolée. J’ai eu une réaction un peu excessive, à cause de la fatigue sans doute.

-        Vous venez de loin ? me demanda-t-il.

-        De la région parisienne, lui répondis-je aussitôt.

-        Oui je comprends, vous venez voir votre famille.

J’acquiesçai, il marqua une pause. Je restais totalement immobile et continuer de l’admirer. Il ne semblait pas gêné par mes regards insistants mais il n’en retirait pas non plus une grande fierté. Ses lèvres se mirent à bouger mais au début je ne l’entendis pas. Je dû secouer la tête pour reprendre mes esprits.

-        Je ne me suis pas présenté, je m’appelle Gabriel, me répéta-t-il en me tendant sa main.

-        Ah oui, moi c’est Alexandra, lui répondis-je avec mon plus grand sourire et lui serra la main, certainement un peu trop longtemps.

Mais je me rendis compte que j’avais l’air complètement ridicule. Comme s’il ne voyait pas ma gêne, il continua.

-        Est-ce que vous pouvez me déposer dans le prochain bourg près de l’église ? me demanda-t-il.

-        Oui bien sûr. Pourquoi faisiez-vous le chemin à pied ? Vous êtes tombé en panne ? Vous voulez peut-être téléphoner ? lui proposai-je en lui désignant mon sac à main où se trouver mon portable.

Il se mit à rire et je me mis à rougir. Décidément, j’étais vraiment ridicule. On aurait dit une adolescente de seize ans. J’eu bizarrement un sentiment de déjà vu.

-        Non, ne vous inquiétez pas mais je vous remercie de votre aide, me donna –t-il pour réponse.

Je ne trouvai rien à redire et remit le contact. Les quelques kilomètres que nous parcourûmes se firent dans le silence. Je me tortillais sur mon siège, j’aurais voulu poser des tonnes des questions à mon passager mais ma raison me dit que cela aurait été impoli. Alors je restai muette. Lui ne sembla pas du tout gêné par ce silence pesant. Comme il me l’avait demandé, je le déposais juste à côté de l’église. Je me demandais où il habitait exactement. Il n’y avait qu’une petite maison, mais elle était inhabitée depuis longtemps. La question me brulait les lèvres mais il anticipa ma pensée.

-        Je viens d’acheter cette maison, me dit-il en désignant la bâtisse en rénovation. Je vous remercie encore pour votre aide.

-        De rien, je n’ai pas l’impression d’avoir fait beaucoup. Mais si vous avez besoin d’aide mes parents n’habitent pas très loin.

-        Ne vous sous estimez pas. Peut-être que nous nous reverrons bientôt mais au moment où vous ne vous y attendrez le moins.

-        Ah, soupirai-je.

Cet homme me parut extrêmement bizarre. Dans n’importe quelle autre circonstance, j’aurais pris mes jambes à mon cou espérant ne plus jamais croiser son chemin. Mais là s’était tout le contraire. Sa présence semblait me rassurer et de plus je ressentais toujours cette chaleur. Gabriel me sourit et referma la portière. J’aurais pu lui courir après mais je décidai plutôt de me rendre sans plus tarder chez mes parents.

Alors que j’empruntai le chemin pour arriver dans la cour, le lampadaire extérieur s’alluma. Mes parents avaient surement entendu le moteur de ma voiture. Je coupai le contact et descendis ma valise du coffre de la voiture. J’étais sûre que la porte d’entrée n’était pas fermée à clé. J’appuyai donc sur la poignée de la porte sans me donner la peine de sonner. J’entrai dans le salon.

-        Salut, c’est moi ! dis-je à voix haute.

Je cherchais des yeux mes parents quand ils sortirent de la cuisine.

-        Juste à temps pour le diner, me dit mon père.

-        Bonjour ma chérie, tu as fait bonne route, me demanda ma mère en m’embrassant sur la joue.

-        Oui, des embouteillages sur Paris mais c’est comme d’habitude, lui répondis-je.

Je décidai de monter ma valise dans ma chambre avant de passer à table. Mon ancienne chambre n’avait pas bougé depuis le jour où j’avais quitté la maison familiale. Je posai la valise au pied du lit. Je soupirai en me frottant le front. Je n’avais pas parlé de ma rencontre avec Gabriel à mes parents parce que moi-même, je ne savais pas trop où cela aller me mener. Mes yeux se posèrent sur un album photos qui se trouvait dans ma bibliothèque. Comme attirée, je le pris dans mes mains. C’était mon album de photos de classe. Je le feuilletai jusqu’à ma photo de Terminale. Après toutes ces années s’était encore douloureux de revoir son visage, son si beau sourire. J’avais mis également des photos prises dans un photomaton, quel joli couple on formait. J’avais l’impression que cela datait d’une autre époque, d’une autre vie. Des larmes commençaient à perler sur le bord de mes yeux. Je refermai l’album aussi sec et le rangeai dans la bibliothèque comme s’il me brulait les mains. Je descendis rapidement pour retrouver mes parents qui m’attendaient dans la salle à manger. Ils étaient prêts à diner.

Le lendemain matin, je fus réveillée par le bruit que faisait le tracteur de l’agriculteur qui exploitait les terres à côté de la maison de mes parents. Il venait surement chercher quelques bottes de foin pour nourrir ses vaches. Cette idée m’ouvrit l’appétit, je décidai de me lever. Je devais aussi aller en ville pour finir mes achats de Noël, d’autant plus que ma sœur et son copain arrivaient par le train cet après-midi. Je fis une petite douche rapidement et fila en vitesse des vêtements propres. Mes parents ne firent pas attention à mes allers et venues même si je savais qu’ils étaient heureux de ce remue-ménage. Ils trouvaient la maison bien vide après le départ de ma sœur.

Je me rendis au premier supermarché qui se trouvait sur ma route. C’était aussi celui où je me rendais quand j’habitais encore chez mes parents. J’y avais mes petites habitudes même si parfois les rayonnages changeaient de place. Je me dirigeai dans le magasin sans flâner dans les rayons. Résultat : j’en ressortis avant midi, avec un bijou pour ma mère, un lecteur DVD dernière génération pour mon père, un parfum pour ma sœur, un livre pour son compagnon, quelques boites de chocolat, quelques babioles et autres jouets pour les enfants de mes amis. Je mis mes précieux présents dans mon coffre, il ne restait plus qu’à les emballer. Mais c’était sans compter sur ma maladresse. En prenant une boite de chocolat, elle m’échappa des mains et tomba juste derrière la roue du véhicule garé à côté de moi. Par réflexe (totalement imprudent), je me baissai pour la récupérer. Je ne fis pas attention au fait que le moteur ronronnait et je ne vis pas non plus que le conducteur du véhicule avait déjà enclenché sa marche arrière et s’apprêtait à effectuer sa manœuvre. Tout à coup, j’entendis derrière moi une voix masculine crier :

-        Stop !

J’eus à peine le temps de comprendre ce qu’il se passait que je sentis deux mains m’agripper par les hanches. Je me retrouvai entourer par des bras incroyablement solide. J’essayai de me dégager de cette emprise et me retournai. Je fus alors à quelques centimètres du visage de mon sauveur. C’était Gabriel ! Je pouvais sentir son parfum, délicieuse odeur… Mais ce parfum, j’aurais pu le reconnaitre entre mille. Une ancienne blessure se rouvrit et je décidais de m’écarter de lui brusquement.

-        Vous allez bien ? me demanda-t-il.

-        Oui, très bien merci. Mieux que ma boite de chocolat en tout cas, lui répondis-je.

Le conducteur ne s’était pas arrêter à temps et la boite était maintenant complètement aplatie. Il n’y avait pas de doute les chocolats étaient foutus. Le conducteur sonné par le presque accident semblait tétanisé. Gabriel lui fit signe que tout allait bien et il repartit.

-        Je suis désolé pour vos chocolats, me dit-il.

-        Oh non, ce n’est pas du tout votre faute. Au contraire, vous m’avez épargné un séjour aux urgences à deux jours deux Noël. Je vous remercie de m’avoir épargné ce souci.

D’un sac en plastique, il sortit une boîte de chocolat identique à celle que j’avais acheté. Il me la tendit.

-        Je vous la donne, j’en achèterai une autre, me proposa-t-il.

-        Je ne peux pas accepter. Ce n’est pas grave, c’est moi qui vais retourner au magasin en acheter une autre, lui répondis-je.

-        Cela me fait plaisir, insista-t-il en me souriant.

Je pris la boite de chocolat. A ce moment là, j’aurais voulu toucher sa main et l’embrasser pour le remercier. La douce chaleur envahit à nouveau mon corps et je sentis mes joues rougir (et ce n’était pas à cause du froid !). Les battements de mon cœur se faisaient plus rapides, pourtant j’avais cru qu’il s’était arrêté depuis des années.

-        D’accord mais dans ce cas, accompagnez-moi chez mes amis. Tous les ans, on organise un lendemain de Noël.

-        J’accepte à une condition, me dit-il très sérieusement.

D’un seul coup, je sentis mon cœur se serrer.

-        Laquelle ? lui demandai-je hésitante.

-        Que nous nous tutoyons et que nous allions au cinéma demain après-midi.

-        D’accord, lui répondis-je aussitôt.

Mon enthousiasme soudain, le fit sourire. Et il déposa un baiser sur ma joue qui devait être rouge vive à présent.

-        Alors à demain Alex.

A peine me remis-je de mes émotions qu’il était déjà parti. Peu importe, je repartis en direction de chez mes parents en ayant l’impression d’être sur un petit nuage.

Le train en provenance de Paris arrivée prévue à 15 heures arrivera voie B. pour votre sécurité, veuillez vous éloignez de la bordure du quai, s’il vous plait.

Cette voix qui sortait des haut-parleurs de la gare me projeta sept ans en arrière. Je me trouve sur le bord du quai mais de l’autre côté. J’avais une grosse valise presque aussi lourde que moi et mes parents m’accompagnaient. Quand le train s’est approché, j’ai fait mes au-revoir à mes parents. J’ai vu dans leurs yeux la peur qui les tenaillaient. A l’époque, j’étais encore fragile psychologiquement. Mais je suis monté dans le train sans me retourner.

Je revins au présent lorsqu’en passant devant moi, le train déplaça l’air qui fit voler mon écharpe.

-        Tu les vois ? me demanda ma mère lorsque les portes du train s’ouvrirent et que les passagers commençaient à descendre.

-        Oui, ils sont là-bas, lui répondis-je en me dirigeant déjà vers eux.

A quelques pas, ma sœur m’ouvrit les bras et j’en fis autant. Elle me serra dans ses bras. Malgré le fait qu’elle soit plus jeune que moi, elle faisait une tête de plus que moi. Elle desserra son emprise et j’embrassai Franck pour lui dire bonjour.

-        Tu as l’air en grande forme Alex. Tu as les yeux pétillants. Je ne t’avais pas vu comme ça depuis…

Voyant mon visage se crisper, elle ne prononça pas son prénom. Mes parents vinrent interrompre ce silence glacial qui s’était installé.

-        Salut les jeunes ! dit mon père.

-        Bonjour Stéphanie, comment ça va Franck ? demanda ma mère.

Après nos retrouvailles, nous partîmes tous les cinq à bord du Berlingo familiale en direction de la maison. Le reste de la journée et de la soirée se passèrent dans une bonne ambiance. Moi et ma sœur en profitions pour prendre des nouvelles de notre famille et regarder les dernières photos des derniers petits cousins arrivés dans la famille.

Le dimanche matin, je me réveillai le cœur léger. Sans doute parce que je pensais à mon rendez-vous avec Gabriel. Oui un rendez-vous, amoureux ? C’était encore difficile à dire. Je n’arrivai pas à déterminer les sentiments que j’éprouvai à son égard. J’étais intriguée par ses attitudes, attirée vers lui comme un aimant mais amoureuse ? C’était impossible, j’avais banni à jamais ce sentiment de ma vie.

Je pris un bain pour me relaxer et me pouponner. Après déjeuner, j’inventai une excuse pour partir au cinéma sans que l’on me pose trop de questions. Je prétextai un message d’un ami qu’il fallait que je retrouve en ville. Mes parents ne firent pas attention à mon mensonge, même si ma mère me fit promettre d’être de retour vers dix-sept heures pour préparer le repas du réveillon. Quant à ma sœur, elle se doutait de quelques choses mais ne dit rien et me fit un clin d’œil.

J’arrivai dans le hall du cinéma un peu en avance. C’était un petit cinéma où il n’y avait que deux salles et une séance le dimanche après-midi. Je pris un programme, nous avion le choix entre un dessin animé ou une comédie romantique. J’espérai que le film était plus comédie que romantique. Je ne vis, ni entendis, Gabriel arriver derrière moi.

-        Salut Alex, me souffla-t-il à l’oreille.

Je sursautai, il me retint la main qui tenait le programme du cinéma.

-        Désolé, tu as choisi un film ? me demanda-t-il.

Ma main était devenue moite, il retira la sienne discrètement et je lui répondis comme si de rien n’était.

-        Nous n’avons que deux possibilités : un dessin animé ou un film.

-        Va pour le film, je vais chercher deux places, me dit-il sans me laisser le temps de répliquer.

Il se dirigea vers la caisse. Lorsqu’il demanda deux places à la caissière celle-ci lui adressa son plus beau sourire. Visiblement, elle était sous son charme et cherchait à attirer son attention. La jeune femme essayait désespéramment de planter son regard dans celui de Gabriel. Mais celui-ci savait l’éviter habilement. Lorsqu’elle lui tendit les billets, elle se débrouilla pour lui frôler la main. Ne tenant plus en place, en quelques pas je rejoignis Gabriel.

-        Ça y est, tu as les places ? lui demandai-je sans cacher mon empressement.

-        Oui, on va pouvoir s’installer dans la salle, me répondit-il.

Je regardai fièrement la caissière celle-ci m’adressa un sourire mauvais, je lui rendis par mon plus beau sourire narquois. Nous descendîmes les escaliers pour nous rendre à la salle n°2, c’était la plus petite des deux salles. Quelques personnes étaient déjà installées, nous nous assîmes sur le bord de la rangée du milieu. Je décidai de briser le silence en attendant que les bandes annonces commencent.

-        La caissière avait l’air de te trouver à son goût, lui dis-je en souriant.

-        Qu’est-ce que tu veux dire ? me demanda-t-il incrédule.

-        Ne me dis pas que tu n’as pas remarqué que cette pauvre femme essayait de te draguer, lui répondis-je.

-        Non, pas du tout.

Je me mis à rire et me tournai vers lui.

-        Tu es vraiment un type incroyable, Gabriel. Je ne connais pas un homme qui ne l’aurait pas remarqué et qui n’en aurait pas profité.

-        Tu en connais beaucoup d’hommes ? me demanda-t-il avec un regard malicieux.

Je lui fis une petite grimace.

-        Probablement que non, lui répondis-je en me remettant droite sur mon siège.

-        Au moins tu ne me fais pas une crise de jalousie, me di-il.

Je devinai un petit sourire sur ses lèvres mais je ne répliquai pas. Je décidai de lui laisser le dernier mot, pour le moment. La salle était maintenant pratiquement pleine, il y avait surtout des couples d’amoureux et des jeunes filles excitées à l’idée de voir l’acteur principal (élu l’homme le plus sexy par un magazine féminin) sur grand écran. Les lumières s’éteignirent peu à peu et l’écran s’illumina.

Quand le film commença, j’avais dû mal à me concentrer. Je n’arrêtai pas de ruminer ce que m’avait dit Gabriel. Je n’avais ressenti aucune pointe de jalousie. C’était ridicule pour cela il faudrait que je sois amoureuse. J’avais posé mon bras sur l’accoudoir, Gabriel aussi. Nos bras et nos mains pouvaient presque se toucher. Je n’osai pas bouger de peur de frôler sa main. Je ressentis une douleur tellement j’étais crispée. Quelques notes de piano se firent entendre, je décidai de fermer les yeux pour mieux me concentrer sur la musique. C’est alors que certaines émotions remontèrent à la surface. Mon corps se mit alors à frissonner et mon petit doigt toucha celui de Gabriel. Peut-être qu’il cru que je lui faisais un signe parce qu’alors il posa ses doigts entre la jointure de mes doigts et descendit délicatement jusqu’à mon poigné où il posa sa main. Mon corps frissonna de nouveau et je soupirai d’aise. Je me tournai vers lui et regardai son visage. Le reflet de la lumière que produisait l’écran sur son visage le rendait magnifique. Je ressentis le désir de caresser sa joue et d’embrasser ses lèvres. Gabriel tourna la tête et me sourit. Par chance, nous étions dans le noir donc il ne me vit pas rougir. Délicatement, il mit la paume de sa main contre la mienne et il enferma ma main entre ses doigts. Je refermai les miens également. Il se pencha vers moi et murmura à mon oreille :

-        Tu peux poser ta tête sur mon épaule si tu le souhaites.

Je ne lui répondis pas mais acceptai sa proposition. Je fermai les yeux et écoutai mon cœur battre. Une douce musique que je n’avais pas entendue depuis bien longtemps. Tout contre lui, l’heure passa très vite et nous devions quitter la salle. Ni l’un ni l’autre ne prononça un mot jusqu’à ce qu’on fut sorti du cinéma.

Un fois dehors, Gabriel me proposa :

-        Allons boire quelque chose de chaud dans ce bar en face.

-        D’accord, mais il faut que je sois rentré avant dix-sept heures, lui dis-je.

-        Promis Cendrillon, me dit-il avec son sourire le plus charmeur.

Il n’y avait pas beaucoup de monde dans ce petit café. Juste un groupe d’amis assis dans le fond, ils avaient l’air d’avoir une discussion animée. Le nom de l’établissement avait changé mais l’ambiance était restée la même. Il y a quelques années, moi et mes amis, nous occupions ces bancs. Je me surpris à sourire en repensant à ces souvenirs Nous nous assîmes à une petite table isolée. Le serveur arriva et prit notre commande.

-        Nous prendrons un café et un chocolat chaud, s’il vous plait, lui dit-il.

J’attendis que le serveur reparte derrière le comptoir pour lui demander :

-        Comment as-tu deviné que je ne bois pas de café ?

-        C’est mon petit doigt qui me l’a dit, me répondit-il tout simplement.

Je ne cherchai pas d’autres explications, je commençai à m’habituer à ses mystères. Au fond, cela ne me dérangeai pas. Mais j’étais tout de même décidé à en apprendre un peu plus sur sa vie privée.

-        Tu réveillonnes avec ta famille ? lui demandai-je.

-        Non, j’ai perdu mes parents, il y a longtemps. Je vais aller chez des amis.

-        Excuses-moi Gabriel. Je ne voulais pas te faire de la peine. Je sais ce que c’est de perdre quelqu’un qu’on aime.

J’avais perdu une occasion de me taire et je ne savais pas comment faire pour me faire pardonner. Mais je m’aperçu que c’était lui qui cherchait à me consoler de ma peine. Il avait posé sa main sur la mienne et me dit :

-        Raconte-moi ce qu’il s’est passé.

Le serveur apporta notre commande. Je prie la petite cuillère et mélangeai mon chocolat chaud. Je baissai les yeux parce que je ne voulais qu’il voie ma tristesse. Je ne savais pas par où commencer. Surtout, j’évitai de me souvenir de cette difficile épreuve. Je soupirai et me mordis la lèvre. Je regardai à l’extérieur et je vis ce jeune couple d’amoureux. Ce flot d’émotions que j’avais tant cherché à enfouir au plus profond de moi refit surface mais c’était tellement pénible. J’avais envie de crier « stop ! » mais je finis simplement par dire :

-        L’homme que j’aime… j’ai perdu l’homme dont j’étais amoureuse. Il s’appelait Mickaël.

Je m’arrêtai parce que même prononcer son prénom était si douloureux que des larmes se mirent à couler sur mes joues. Je les essayai rapidement avec ma main.

-        Continue, tu te sentiras mieux après, me dit Gabriel.

-        J’avais dix-huit ans, nous étions tous les deux dans la même classe. Nous avions les mêmes amis. Nous étions inséparables et je ne me voyais pas partager ma vie avec quelqu’un d’autre.

Je marquai une pause et bus une gorgé de mon chocolat.

-        Ce soir-là, il devait venir me chercher pour aller en discothèque. Nous devions fêter les dix-huit ans d’un ami. Mais il n’est jamais arrivé à la maison. Un chauffard ivre lui a coupé la route et…

Non, ça je ne pouvais pas le dire. Gabriel était très compréhensif. Il ne prononça pas un mot et me laissa me remettre de mes émotions.

-        Ensuite ma vie est devenu un enfer, sans lui plus rien n’avait de sens. Tout le monde me disait que j’étais jeune que j’avais tout le temps de refaire ma vie. Mais je me sentais si seule et personne ne semblait vouloir me comprendre. J’ai commencé à sécher les cours, j’ai fréquenté les mauvaise personnes et commençait à toucher à certaines drogues. J’ai tenté plus d’une fois de me suicider. Sans l’amour de mes parents, je ne serai sans doute pas ici aujourd’hui. Au début, je leur en ai voulu parce que tout ce que je voulais c’était le rejoindre. Je suis allé voir un psychologue et j’ai eu de justesse mon baccalauréat. Ensuite, je suis partie à Paris où j’ai été hébergée par mon oncle et ma tante. Ils n’ont jamais eu d’enfants et étaient ravis de pouvoir aider mes parents. Là-bas, j’ai terminé mes études et trouvé un travail.

Je m’arrêtai de parler quelques secondes pour finalement lui dire :

-        Tu es un super psychologue. Je t’ai raconté plus de chose qu’à mon psy de l’époque.

-        Je prends ça pour un compliment. Et comment est ta vie à Paris ? Tu as quelqu’un dans ta vie ? me questionna-t-il.

-        Non, pas du tout. Quand je suis partie, j’ai décidé de reprendre ma vie en main et de renoncer à tomber à nouveau amoureuse. Je ne dis pas qu’il y a eu aucun homme mais dès que la relation devenait sérieuse, j’y mettais un terme. De toute façon, je ne peux plus dire les trois petits mots magiques, alors c’est difficile de construire quelque chose de sérieux.

Je finis de boire mon chocolat chaud et regardai à l’extérieur pour éviter de regarder Gabriel dans les yeux. Je venais d’avouer à l’homme qui m’avait pris la main, prêté son épaule et surtout qui avait fait battre mon cœur que j’étais incapable de lui rendre son amour. Après ces quelques secondes qui me parurent une éternité, il relança la conversation.

-        Pourquoi tu ne peux plus dire je t’aime ? me demanda-t-il d’un air sincèrement intéressé.

-        Ceux sont les derniers mots que je lui ai dit.

Je réussis à lui sourire.

-        Tu es un excellent psy. Si ce n’est pas ton métier, change-en.

Il me rendit un petit sourire timide.

-        Alex, je t’aime, me souffla-t-il.

J’avais l’impression que ses yeux étaient devenus bleu saphir. Ils étaient vraiment magnifique mais…

-        Non, s’il te plait Gabriel, ne me demande pas l’impossible, le suppliai-je.

-        Cela n’a rien d’impossible. Alex, je te demande juste de m’ouvrir ton cœur. Ne me rejette pas, s’il te plait.

Je regardai rapidement ma montre.

-        Il faut que j’y aille sinon je vais être en retard.

Je me levai. Une fois de plus, comme à chaque fois que je sentais que je perdais le contrôle de la situation, je n’avais qu’une envie : celle de fuir. Gabriel me rattrapa par le bras, je le regardai l’air à la fois surprise et apeurée.

-        On se voit toujours mardi ? me demanda-t-il.

Je me rendis compte que l’idée de ne plus jamais le voir m’était inconcevable.

-        Bien sûr, je viendrai te chercher vers onze heures trente.

Comme pour sceller notre pacte, il dégagea une mèche de mes cheveux et déposa sur mes lèvres un doux baiser qui me donna un aperçu de ce que pouvait être nos étreintes. C’était un geste tellement tendre que j’avais presque les larmes aux yeux.

Je rentrai chez mes parents un peu déboussolée. Il fallait pourtant que je fasse abstraction de ses sentiments pour quelques heures. Je ne voulais pas mêler ma famille à ce qu’il était entrain de se passer dans ma vie. Je voulais être sûre de savoir où cela aller me mener. Si je devais un fois de plus m’écrouler, je préférai n’entrainer personne dans ma chute.

En rentrant, je trouvai ma mère dans la cuisine qui était entrain de préparer le repas.

-        Il faudrait que tu prépares des petits fours et ta sœur aura besoin d’un coup de main pour dresser la table, m’expliqua-t-elle.

-        Bien je vois que tu as tout prévue, comme d’habitude, lui dis-je.

Je m’exécutai sans rechigner. Après mon rendez-vous avec Gabriel, préparer des petits fours était une partie de plaisir. Pourtant, je ne regrettai pas ma rencontre avec lui. Ensuite, je rejoignis Stéphanie dans la salle à manger. Elle s’apprêtait à mettre la nappe aux couleurs de Noël.

-        Ah tu tombes bien. Tu peux tenir l’autre bout, s’il te plait. Je vais couper la nappe, me dit-elle.

Tout en exécutant sa tâche, elle me dit :

-        Tu as rencontré quelqu’un, n’est-ce pas ?

-        Non pas du tout, lui répondis-je en essayant de me défendre.

-        Ne me ment pas, je le sais.

-        Toi aussi, tu as des prémonitions !

Son regard fut comme une gifle.

-        Alexia ! Ne te moque pas de ta grand-mère.

-        Désolé, soupirai-je en baissant les yeux comme une enfant qui s’était fait gronder.

-        D’abord ceux sont plutôt des pressentiments. Ensuite imagine ce que c’est que de ressentir la douleur et le malheur de ses proches, m’expliqua – t- elle.

-        C’est pour cela qu’elle m’a dit de quitter Mickaël.

Je vis bien qu’elle fut étonnée que je puisse prononcer son prénom sans que je m’écroule. Je l’étais un peu moi-même.

-        Je sais que tu lui en as beaucoup voulu mais grand-mère avait ressenti ta grande tristesse à venir et elle voulait juste te protéger, essaya-t-elle de me convaincre.

-        Oui je l’ai compris, plus tard. Mais aujourd’hui comment tu sens que l’histoire va se finir ? lui demandai-je.

-        C’est un peu flou mais je suis sûre que la fin sera heureuse, me répondit-elle confiante.

-        Je suis sûre que tu as raison.

Je supportai mieux que d’habitude les fêtes de Noël. Quelque chose avait changé, j’avais de nouvelles envies. Comme celle de tirer un trait sur mon passé trop douloureux, construire une famille, donner à mes parents les petits-enfants qu’ils espéraient tant. Tout le monde était satisfait de ses cadeaux et j’avais été gâté mais le plus beau pour moi était ma rencontre avec Gabriel.

Le matin de Noël, je ne me levais pas trop tard afin de me rendre sur la tombe de Mickaël. Il était temps de tourner la page et de lui faire mes adieux. J’avais pris une rose du bouquet de la décoration de la table, après avoir eu l’autorisation de ma mère, bien sûr. Je garai ma voiture sur le parking devant le cimetière. Comme je le pensais, c’était désert. Je pris la rose que j’avais posé sur le côté passager, j’hésitai quelques instants. J’inspirai et expirai puis sortis de la voiture. Je poussai la barrière pour entrer. Je frissonnai à cause du bruit lugubre. Je n’étais pas venu depuis le jour de l’inhumation mais je me souvenais très bien de l’allée que je devais prendre. Sa tombe était fleurie, je supposai que ses parents étaient déjà passés. Je m’accroupis pour mettre la rose dans le vase avec les autres fleurs. Je posai ma main sur la dalle froide et tombai à genoux. Je mis à pleurer et posai mon autre main sur ma bouche pour étouffer mes sanglots. Au bout de cinq minutes, je réussis à me calmer pour pouvoir parler.

-        Je suis désolée Mickaël, je pense toujours que c’est ma faute si tu es ici. J’aurais dû prendre la voiture de ma mère et te rejoindre à cette soirée.

Je souris.

-        Je sais ce que tu me répondrais : c’est idiot de prendre deux voitures puisque nous allons rentrer ensemble.

Je soupirai et levai les yeux au ciel.

-        Tu voulais toujours avoir le dernier mot mais je te laisser juste gagner pour te faire plaisir sinon…

Je m’arrêtai quelques secondes.

-        Si je suis venue te voir c’est pour te parler de quelque chose d’important. J’ai rencontré quelqu’un, un homme merveilleux. Je ne peux pas t’assurer que je suis amoureuse mais je me suis rendu compte que je ne veux plus vieillir seule. Je veux avoir une famille, des enfants. Mais je peux te promettre une chose, c’est que je ne t’oublierai jamais.

J’embrassai mes doigts et soufflai pour lui envoyer ce dernier baiser puis je quittai le cimetière.

Enfin nous étions le lendemain de Noël. J’avais hâte de le retrouver. L’idée de le voir me rendait extrêmement joyeuse voire euphorique. J’avais l’impression d’être une adolescente amoureuse ou peut-être tout simplement une femme à nouveau heureuse. La veille, j’avais envoyé un message à Camille pour le prévenir que je ne viendrai pas seule. Parce qu’on se connaissait depuis longtemps, elle ne m’avait pas harceler de questions mais je savais qu’elle en mourrait d’envie. J’imaginais les visages surpris de mes amis. La présence de Gabriel allait beaucoup les étonner, c’était certain. Je m’aperçu que la vie m’offrait une deuxième chance. Et je voulais la saisir avec Gabriel. C’était un peu rapide mais j’avais l’impression que le temps m’était compté.

Je garai ma voiture devant chez lui. Je décidai d’aller frapper à sa porte pour m’annoncer. Mais lorsque je fermai ma portière et me retournai, je sursautai et portai ma main à bouche pour ne pas crier. Il se tenait adossé à la portière arrière de ma voiture et me souriait. Gabriel posa sa main sur la mienne et la retira de ma bouche. Il fit glisser son pouce sur mes lèvres. Il se pencha et posa ses lèvres sur les miennes. Adossés à ma voiture, nous échangeâmes notre premier baiser brulant. Je ne repris conscience du monde qui nous entourait que lorsque nous nous écartèrent l’un de l’autre. Je ne pourrais jamais décrire le panel d’émotion que m’avait procuré ce baiser. Cet homme venait d’une autre planète, je ne voyais que cette explication. Ce n’était pas le plus important puisque dans ses bras le monde me semblait merveilleux.

-        Il faudrait peut-être que l’on se mette en chemin, si tu ne veux pas arriver en retard, me dit-il en plantant son magnifique regard bleu dans le mien.

Je serai bien restée une éternité mon regard dans le sien et dans ses bras protecteur. Mais il fallait revenir à la réalité.

-        Humm, si tu veux bien prendre place sur le siège passager, lui proposai-je.

Nous échangeâmes peu de mots durant le trajet. Je n’étais pas d’humeur bavarde et sa présence me suffisait. Elle comblait le vide qui m’avait pesé depuis trop longtemps. Quelques minutes avant d’arriver, j’essayai de lui expliquer qui était qui pour ne pas qu’il se sente perdu au milieu de ces inconnus. J’étais persuadé qu’il ne retiendrait pas tous les prénoms et la situation familiale de chacun. Mais je me trompai et je n’aurai pas dû m’en étonner. Je rangeai mon véhicule le mieux possible dans la cour pour que toutes les voitures à venir puissent y entrer. Quand nous descendîmes du véhicule, une petite tête blonde coiffée avec deux couettes s’approchait de nous en courant.

-        Bonjour, Aless, me lança-t-elle en ouvrant ses bras et en s’accrochant à ma jambe.

Je la prie dans mes bras et elle écrasa ses petites lèvres roses sur ma joue. Je ris de bon cœur.

-        Bonjour petite puce, lui dis-je.

Gabriel n’avait pas bougé, il avait observé la scène à quelques mètres de moi. Liliane l’avait vu et elle me murmura à l’oreille.

-        Aless, c’est ton amoureux le prince charmant ?

C’est vrai qu’il avait tout du prince charmant, un homme beau comme un dieu et tellement prévenant, en somme le gendre idéal pour tous les parents. Je ne répondis pas à la question de la petite Lili mais nous échangeâmes un sourire complice. Je la déposai au sol et par curiosité, elle se présenta à Gabriel.

-        Bonjour, je m’appelle Lili et c’est ma maison. Et toi, tu t’appelles comment ? lui demanda-t-elle avec un grand sourire et en se dandinant de droite à gauche.

-        Bonjour Lili, moi c’est Gabriel.

Il s’accroupit pour être à la hauteur de Lili et il se mit à lui parler en chuchotant.

-        Je suis amoureux de la princesse Alex, tu crois qu’elle est amoureuse de moi ? lui demanda-t-il.

Elle secoua la tête à l’affirmative et mit sa main sur sa bouche pour étouffer son petit rire d’enfant. Puis, elle partit en courant en direction de la maison. Nous la suivirent et entrâmes dans la maison à notre tour.

-        Maman, Aless est arrivée avec son amoureux, cria Liliane.

Je souris en espérant que Gabriel ne me vit pas rougir comme une adolescente.

-        Alex, ma chérie, rectifia Camille en donnant un baiser sur le front de sa fille.

Camille releva les yeux dans notre direction et je vis son regard d’admiration envers Gabriel et son envie vis-à-vis de moi. Elle tendit sa main à Gabriel.

-        Bonjour, bienvenue Gabriel, lui dit-elle.

-        Merci, enchanté de vous rencontrer Camille, lui répondit-il avec son plus beau sourire.

Quel charmeur ! J’étais persuadée que Camille avait les mains moites et se sentait ridicule. Je décidai de la ramener à la réalité en lui demandant :

-        Qu’as-tu fais de ton mari ?

-        Mon mari ? ah oui, Damien est parti à la boulangerie. Il ne devrait plus tarder maintenant, nous expliqua-t-elle.

Effectivement quelques minutes plus tard, on entendit la porte d’entrée. Un homme, la petite trentaine, carrure de sportif et coupe à la militaire se présenta à nous. Malgré le fait qu’il n’avait rien à envier à Gabriel, je sentis que celui-ci avait fait renaître un complexe d’infériorité. Mais Damien resta poli envers Gabriel et nous invita à passer dans le salon. Les autres invités arrivèrent chacun leur tour. Tous étaient enchantés de faire la connaissance de Gabriel et tous étaient heureux que j’aie retrouvé une certaine joie de vivre. J’avais l’impression d’être retournée quelques années en arrière. Tous mes problèmes semblaient s’être effacés mais ce n’était qu’une illusion. Lorsque mon amie Adeline me demanda pour quand le mariage était prévu. Je posai mon regard sur Gabriel, mon sixième sens me joua alors un mauvais tour. Malgré le fait que je trouvai cet homme extrêmement séduisant, qu’il s’intéressait à moi, ma vie, qu’il m’apportait beaucoup d’affection, malgré tout cela je n’arrivai pas à nous voir marier et avoir des enfants ensembles. Pourquoi ? Je n’arrivai pas à le savoir, c’était sûrement cette bonne vieille peur qui s’était réveillé et me taquinait. Ma récente joie de vivre s’était tout à coup estompée. Lorsque je déposai Gabriel chez lui, j’avais l’impression qu’il avait perdu son enthousiasme naturel.

-        Alors, qu’as-tu pensé de mes amis ?

-        Ils sont très sympathiques, me répondit-il.

-        Veux-tu que l’on se retrouve demain ? lui proposai-je en espérant que ma voix ne trahisse pas mon appréhension.

-        Euh oui, pourquoi pas, finit-il par me répondre. Je t’appellerai, je pense qu’une petite balade nous fera du bien.

-        D’accord, j’attends ton appel avec impatience, lui dis-je en essayant de lui sourire.

La nuit qui suivit, j’eu beaucoup de difficultés à trouver le sommeil. A force de tourner en rond dans mon lit, je finis par m’endormir mais d’un sommeil perturbé. Je faisais des rêves étranges qui n’avaient aucune signification pour moi, notamment cette immense lumière blanche qui m’éblouissait.

Le lendemain matin, je me sentais pas très en forme. Mais j’essayai de faire bonne figure devant ma famille. En faites, j’attendais avec angoisse l’appel de Gabriel. Toute la matinée, je regardais mon téléphone en espérant que celui-ci se mette à sonner. Gabriel ne daigna m’appeler qu’à quatorze heures.

-        Salut Gabriel, je suis contente que tu m’appelles. Alors qu’est-ce que tu veux que l’on fasse ? lui demandai-je.

-        Tu connais l’étang près du parc floral, est-ce-que tu peux m’y retrouver dans une demi heure, me proposa-t-il.

-        Oui bien sûr, je pars tout de suite, lui dis-je mais avant j’avais besoin d’être rassuré. Gabriel, est-ce que tout va bien ? lui demandai-je.

-        Oui ne t’inquiète pas. Je t’attends, à tout de suite Alexandra.

Il raccrocha. C’était la première fois qu’il prononça mon prénom en entier. Mon inquiétude monta d’un cran, j’avais l’impression qu’il se passait quelque chose d’anormal. Ma mère était à son travail, mon père occupé à son bricolage et Stéphanie et son copain sortis, personne ne me demanderai où je me rendais. Mon père qui avait sûrement entendu le moteur de ma voiture sorti du garage et me salua de la main. Je lui répondis par un sourire.

Je roulais en direction de l’étang bien plus vite qu’il le faudrait mais je ne pouvais pas m’en empêcher. Je n’avais qu’une hâte c’était de le retrouver. Gabriel était apparu dans ma vie au moment où je n’avais plus l’espoir d’ouvrir à nouveau mon cœur. C’était un cadeau du ciel. J’avais l’impression qu’il allait me quitter, je voulais savoir pourquoi.

Arrivée sur le parking, je garai ma voiture comme je pus et en sorti très rapidement. Je ne pris d’ailleurs pas le temps de verrouiller ma portière. Je me dirigeai en courant sur le petit chemin de terre pour rejoindre l’étang. Alors je le vis au bout du chemin, l’étang derrière lui reflété le soleil de ces douces journées d’hiver ensoleillées. Il se tenait droit et me regarder arriver vers lui. Il était magnifique. Arrivée devant lui, je me blottis dans ses bras. Le sentir contre moi me rassurait. Gabriel ne me repoussa pas au contraire, il m’entoura de ses bras.

-        Tout va bien, Alex, tout va bien… on marche un peux si tu veux bien, me proposa-t-il.

-        D’accord, soupirai-je.

Nous gardâmes le silence pendant quelques minutes mais je n’y tenais plus. Je voulais le faire parler, connaître la vérité.

-        Gabriel, pourquoi tu voulais que l’on se voit ici ? Je sens que tu me caches quelque chose, je veux savoir ce que c’est.

Il s’arrêta alors de marcher et se planta devant moi. Il me regarda dans les yeux.

-        Je suis désolé Alex, je n’avais pas l’intention de te faire de mal. Ce n’était pas ma mission. Je vais devoir partir, maintenant.

Je secouai la tête.

-        Je ne comprends pas ce que tu me dis, qu’est-ce que c’est que cette histoire ? De quelle mission tu parles ? Qui es-tu en réalité ?

-        Je devais sauver ton âme et tu as une âme magnifique, me dit-il en passant ses doigts dans mes cheveux.

Je ne trouvai rien à lui dire, je préférai me taire et le laisser parler.

-        Je devais te redonner l’espoir, te montrer que tu pouvais aimer à nouveau. Tu as tant d’amour à donner.

-        Oui, et c’est de toi que je suis tombée amoureuse, lui avouai-je.

Nous étions si près l’un de l’autre que j’aurai pu l’embrasser à ce moment là mais je ne le fis pas.

-        Alexandra, tu te méprends sur tes sentiments. J’ai fait renaître en toi des sensations que tu avais connu autrefois. J’ai usé de mes charmes sur toi. Le but n’est pas de te souffrir mais que tu comprennes que tu es encore capable d’aimer.

C’est lui qui se pencha vers moi et qui déposa sur mes lèvres un baiser. D’un seul coup, mes jambes semblaient incapables de me soutenir. Gabriel me rattrapa juste à temps et me soutint jusqu’au banc qui se trouvait à quelques pas. Je pus alors m’assoir. Ces mots semblaient complètement absurde pourtant je croyais ce qu’il me disait.

-        Qu’est-ce que tu es ? un genre d’ange gardien ? lui demandai-je.

-        En quelques sortes, me répondit-il évasivement.

-        Qu’est-ce qu’il va se passer maintenant ? lui demandai-je, les larmes commencèrent à arriver au bord des yeux.

-        Je vais partir et tu reprendras ta vie. Je te promets que tu rencontreras quelqu’un qui t’aimeras et te rendras heureuse, me répondit-il, son sourire avait disparu.

-        Non, je ne veux pas. Reste avec moi.

-        Alex, tu ne veux pas comprendre, me dit-il.

C’était la première fois que je l’entendais hausser le son de sa voix.

-        Tu crois être amoureuse de moi mais je t’assure que ce n’est pas le cas. Ce n’est qu’une illusion, de toutes façons je ne partage pas ces mêmes sentiments envers toi. Je t’aime comme tous les autres êtres vivants sur cette Terre.

Je sentis mon cœur se briser à nouveau. Je ne pouvais pas le croire, je ne le voulais pas. Désespérée, je m’agrippai à lui.

-        Si tu pars, je ne m’en remettrai pas, lui dis-je.

En désespoir de cause, je décidai de lui faire du chantage. Je ne trouvai rien d’autres pour le retenir. Mais c’était peine perdu et mes larmes coulaient à flots. Gabriel m’attrapa les mains et les garda dans les siennes.

-        Je te promets que tu ne souffriras pas.

-        Je ne t’oublierai jamais Gabriel.

-        Moi non plus Alex.

Il déposa un baiser sur mon front. Je serrai très fort mes mains pour le retenir le plus longtemps possible. C’est alors qu’une intense lumière blanche jaillit du ciel, frappa le sol dans un bruit sourd et nous engloba. Alors Gabriel disparu en même temps que la lumière. Je tombai à terre à genoux, mon visage entre mes mains.

Au fur et à mesure que mes larmes coulaient ma peine semblait s’estomper. Gabriel avait raison sa perte ne semblait pas me tuer. Son souvenir ne m’était pas douloureux, au contraire je me sentais bien en pensant à lui. Cela ne servait à rien que je reste au bord de l’étang. Je décidai de rentrer chez mes parents.

Au moment où je mis les clés de ma voiture dans le contact, on frappa sur la vitre. Je sursautai en poussant un petit cri (décidemment !). Un homme se tenait auprès de ma portière. J’ai cru que c’était Gabriel qui était revenu. Mais en baissant la vitre, je fus un peu déçu. Ce n’était pas lui.

-        Excusez-moi, ma voiture est tombée en panne. Vous pouvez me déposer en ville ? me demanda-t-il.

J’hésitai quelques secondes parce qu’après toutes ces émotions, j’aurais souhaité être un peu seule. Mais je m’en voudrais d’avoir laissé cet homme faire cinq kilomètres à pied en plein hiver.

-        Bien sûr, montez, lui répondis-je.

Ce jeune homme était tout à fait séduisant, raison de plus pour ne pas se priver de sa compagnie.

-        Ma voiture a stoppé net au moment où une lumière blanche est apparue tout près d’ici. On aurait dit la foudre mais un orage en plein hiver, c’est étrange.

Je souris et ne pus m’empêcher de regarder le ciel qui était redevenu bleu.

-        Oui, je l’ai vu mais je ne trouve pas cela si…étrange.

Il me regarda comme si j’étais la fille la plus bizarre qu’il avait vu. Je ne pus m’empêcher de rire et il finit par se joindre à moi.

Toute ma vie, je me souviendrai du jour où j’ai rencontré Gabriel parce que ce jour avait totalement changé ma vie.

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