Noyade

petitepepite

C'est samedi, la pluie frappe contre les carreaux. Seule dans ma chambre, mon Code Civil et mes cours de droit de la famille étalés sur le tapis devant moi, je regarde dehors. A travers la vitre, un ciel gris pour un jour gris. 

Rien n'est lumineux, pas même mes mots. Parce qu'aujourd'hui, on me maintient la tête sous l'eau. L'air commence sérieusement à manquer et j'ai la certitude que je vais me noyer. 

Si l'apport en oxygène se fait si rare, c'est seulement parce que je me pose trop de questions. Ça me ronge le cerveau, ça me tord le ventre et mes nuits en sont perturbées. 

J'analyse tout, je cherche des solutions à des problèmes insolubles. Tout cela obscurcit mes pensées et je reste incapable de me concentrer sur autre chose. 

D'abord mes partiels, où je vais échouer. Parce que je ne parviens pas à retenir. Parce que je ne trouve pas le courage de rester des heures devant mes cahiers. Parce que tous ces articles et toutes ces lois s'emmêlent dans ma tête. Parce que je sais d'avance que c'est foutu, alors je veux seulement que tout soit terminé.

Et ce garçon, que j'aime comme une dingue mais que je suis incapable de retenir. Parce que je veux juste qu'il soit heureux, parce que je ne veux pas déranger. Alors je me tais. Ça me flingue le cerveau de penser à lui aussi souvent, parce qu'il n'y a aucune issue. Je suis condamnée à me taire. Pour le bien des autres. 

Puis ces grands adultes qui me blessent, moi qui pensais qu'ils étaient là pour me protéger. Ils nagent dans l'hypocrisie et le mensonge. Ils me donnent la gerbe. Aveuglés par l'argent, la réussite, et l'apparence.  L'image qu'ils donnent devient une obsession. Ils changent et deviennent étranges.

Ils cherchent à décrocher le premier rôle de la vie. Être le plus beau, le plus intelligent, le plus fortuné, le plus désiré et surtout, le plus envié. Cette compétition entretient l'égoïsme et la haine. Il faut plaire à tout le monde, quitte à faire passer l'amitié au second, voire au dernier plan.

Au final, malgré quelques amitiés solides, je me sens seule.

Allongée sur le sol de ma petite chambre, je regarde par la fenêtre ce jour gris. Le ciel est gris, les immeubles sont gris et j'ai ce poids sur les épaules, qui m'empêche de remonter à la surface.

Ma tête est enfoncée sous l'eau, ma trachée et mes bronches sont maintenant inutiles. 

Je vais me noyer, c'est sûr. 



  • Des partiels, ça se rattrape, ou mieux, y'a plein d'autres filières qui existent. Puis des adultes, y'en a tellement tu sais, ils méritent qu'on leur dise vraiment ce qu'on pense d'eux, t'as trop rien à perdre. L'amour, par contre, c'est le mal de toutes les filles, et ça, personne n'y peut rien. Mais fais-toi un peu passer au 1er plan de temps en temps, ça fait du bien.

    · Il y a presque 9 ans ·
    Cat

    dreamcatcher

    • Commentaire intéressant, merci beaucoup :)

      · Il y a presque 9 ans ·
      Img 8062

      petitepepite

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