Nu devant la glace (12)

Ce N'est Pas Moi, Ordi Hacké

Quatre longs jours étaient passés depuis le retour à Paname. Héloïse attendait fermement le facteur tous les matins, non sans du baume au cœur et puis de la déception. Sa boite à lettres était désespérément vide. Notre homme au grand cœur était-il fâché ? L'avait-il déjà oublié pour revenir auprès de son Isabelle ? Non, elle ne voulait pas y penser. On était mercredi, comme d'habitude le facteur passerait vers 13h30. Pour se changer les idées en l'attendant, elle décida d'aller s'offrir quelques livres. De poésie pour s'inspirer. S'il lui écrit, il faudra bien lui répondre et elle voulait s'afficher comme grande lettreuse. Ce qu'elle était par ailleurs mais elle ne s'en rendait pas compte. Une femme avec des complexes somme toute.

Le beau Baudelaire prônait en tête de gondole, mais elle connaissait tous ses poèmes par cœur. Elle finit par s'acheter un Philippe Jaccotet, dont elle avait déjà lu extraits. Longeant la Seine pour rentrer chez elle, elle flânait en lisant des passages. Elle ne voyait pas que l'heure tournait. Et la voici devant chez elle. La fameuse boite aux lettres lui semblait étrangement plus lourde, effet de déformation spirituelle ? Quel bonheur ! Une lettre non signée, ce ne pouvait être que lui !

Fini le Jaccotet, on monte à l'appartement, on s'allonge sur le ventre sur le lit et on ouvre l'enveloppe.

« Ma chère Héloïse, Isabelle ne fait désormais plus du tout partie de ma vie. Maintenant, il serait temps que vous vous rendiez à moi, que vous baissiez la garde et que notre amour s'élève au grand jour. Je vous redonne mon numéro de téléphone, je ne vous écrirai plus ».

Interdite, elle était comme nue devant la glace.


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