Onirisme

lya

Je monte un escalier qui rétrécit au fur et à mesure de mon ascension. En bas sur le canapé, des jeunes filles aux airs Javotte, me regardent et se moquent de moi. Je ne peux vraiment pas aller plus haut car l'escalier est devenu minuscule ! En me contorsionnant autours de la rampe pour faire demi-tour, je renverse une lampe qui tombe infiniment avant de s'écraser sur le sol, brisée en mille morceaux. Je redescends avec toutes les difficultés du monde. Arrivée en bas, les filles se moquent de ma maladresse, de ma taille et de ma petite culotte. J'essaie de me défendre mais elles ne me laissent pas parler. Leurs rires sardoniques envahissent tout l'espace. Ils gonflent partout, compressant les murs et mes tempes, éclatent dans toute la pièce : des éclats de rires projetant une substance visqueuse et nauséabonde. Visiblement corrosive, l’aquosité ronge chaque objet qu’elle atteint : le canapé a reçu quelques éclats et se dissous lamentablement, sorbet à la fraise en pleine fonte des glaces. Les filles ne sont pas épargnées et leurs visages sont déjà plus vérolés qu’un gruyère lépreux, mais elles rient toujours. Elles rient, elles rient, elles rient…

 

Je me redresse soudainement, essoufflée, en sueur et claquant des dents. Quel rêve ! J’essais de me démêler de mes draps et me lève. Encore imprégnée du cauchemar, je reste quelques minutes debout à coté de mon lit, sans trop savoir ce que je veux ou dois faire, puis secoue la tête, hausse les épaules et vais me préparer un café. Oublions ça… Dans la cuisine, un rayon de soleil transperce le rideau : souriants reflets sur les flûtes à champagne restées sur la table. C’est presque tentant, et puis, vous savez ce qu’on dit : il paraît que le meilleur remède… Non, non ! Un café ! Sers-toi un café !

La tasse me réchauffe les mains et je m’approche de la fenêtre. Un soleil comme ça sur la neige, ce doit être magnifique. J’entrouvre d’une main le rideau et…Qu’est-ce que ?!

Ce n’est pas la petite cour recouverte de neige que j’aperçois, mais un superbe jardin japonais avec bassins, fontaines, petit pont de bois peint et bosquet de bambous. Qui a bien pu installer tout ça en une nuit ? Est-ce possible de créer un tel jardin si rapidement ? Et quand bien même… Le bruit m’aurait réveillée ! (Quoique vu mon état…)

Sans trop réfléchir, j’attrape mon manteau, enfile mes bottes fourrées, mon bonnet et m’en vais voir de plus près ce phénomène. Dès que je franchis la porte, je suis étouffée par une vague de chaleur épouvantable. Vite, je retire manteau et bottes et continue pieds nus. Ma chemise de nuit, déjà, me colle à la peau et des perles de sueurs glissent le long de ma colonne vertébrale. Peut-être ne suis-je pas encore réveillée finalement. Je me pince, me donne des petites claques sur les joues. Rien. Je touche du bout des doigts la rambarde du pont, les feuilles effilées des bambous, trempe un orteil dans l’eau si fraîche. Tout y est : la froideur de l’eau, la chaleur de l’air, l’odeur entêtante des lotus. Ce ne peut qu’être réel. Je décide d’y croire et de me laisser aller au bien-être de cette vision. Les questions viendront plus tard, les réponses aussi, sans aucun doute.

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