Petit Poussin
Jean Claude Blanc
Petit Poussin
Petit poussin, poulet de grain
Y’a pas bien gros, tient dans la main
Coquille brisée, sort de sa housse
Etire ses ailes, joue les maousses
De sa couveuse, s’est extirpé
Depuis des mois le prisonnier
Bec fragile, de chérubin
Va vite rejoindre ses copains
Boule de plumes, duvetées
Hérisse sa tête, pour se vanter
Qu’il est bien là, sur ses ergots
Maman, amènes tes asticots
Se croyait seul pour en croquer
Poule pondeuse, elle est prolixe
Chiées de poulots, bouches à nourrir
Les entrainer à se gérer
Une ribambelle de petits poucets
Suivent leur mère, bien obligée
De grappiller germes de blé
Donner becquées à ses bébés
Méfies-toi bien de la mère poule
Quand dans la cour, elle déboule
Il ne faut pas la contrarier
Famille nombreuse, priorité
Courroucée « clousse », en douce glousse,
Aux intrigants, elle fout des roustes
Car son armée de crèves la faim
Doivent marcher droit, et à son train
Ce volatile, madame sans gêne
A emprunté à vie humaine
Les habitudes, les manières
Il n’y en a que pour sa chair
Métier de mère, un sacerdoce
Œuf pondu, c’est pas fini
Ensuite on doit, élever les gosses
Passer derrière les étourdis
Petit poussin, deviendra grand
Si le busard le laisse en vie
Quant au matou, lui, prend son temps
Sur les plus faibles, jette un défi
Sont à croquer, menus flocons
Tout juste sortis de leur cocon
De les caresser pas question
Encore fébriles leurs petons
Les jours passent, avec les nuits
Tendre poulet, va s’affermir
Quand il est bon à estourbir
En garniture, il est servi
On nous élève pour nous bouffer
A quoi çà sert, jouer balaizes
Quand tu es bon à cuisiner
On te fait la tête à Louis XVI
Profites bien, petit poussin
Pas trop quand même, dans ton corps
Ménages tes ailes, petit gamin
Demain va changer de décor
Mimi tout plein, furète sans fin
Moindre paillette, menus fretins
A peine grand, comme jour sans pain
Déjà prémisses, fatal destin
Tout juste éclos, pattes dans la glaise
Jolis cocos, pas bien à l’aise
Œuf à la coque, tellement raffole
Que j’en oublie que c’est un gnome
De chef de bande, il n’en faut qu’un
C’est le plus fort qui carillonne
Sur tas de fumier, fier bonhomme
Cocorico, fait le malin
Faut pas bouder notre plaisir
De nos couvées, se réjouir
Quand sont au nid, sais pas ta chance
Plus tard commencent, tes souffrances
Je suis friand d’œufs à la poêle
Et de seins doux, saisis à poil
En cuisinant, mes mâles pensées
Seuls les meilleurs partent premiers
(Comme spermatos, bien empressés)
Dans les fourrées doivent pousser
Poulettes vaillantes, solitaires
Pondre sans cesse, c’est leur instinct
Nous on copule, pour se faire du bien
JC Blanc février 2013