PETITE MORT

Ce jour là j'dormais chez un pote,
mon oncle m'appelle et s'emporte:
ma mère ne décroche plus son téléphone
et elle ne lui ouvre pas la porte.
Inquiet, il m'ordonne de venir aussitôt
j'arrive en pensant qu'il s'inquiète un peu trop
mais son tel est là, j'ai peut-être tort
On appelle alors tout les hôpitaux.
Au bout du 20-ème on l'a localisée
au centre hospitalier Robert Ballanger,
un malaise aux dires des ambulanciers,
dans une de leur chambre elle est allongée.
On m'transfert sa chambre car c'est plus l'heure des visites,
j'peux entendre sa voix à défaut d'la voir en physique
et au lieu d'lui dire combien j'voulais l'étreindre
j'ai feint, j'ai geint, sur l'pire qu'elle m'a fait craindre.
J'aurai dû dire: "maman j't'aime" et ma pudeur, la ranger,
vu l'danger comme n'importe quel humain
mais "vas-y dort bien, j'essaie d'passer demain"
sont les derniers mots que l'on s'est échangés.
Le lendemain matin, un médecin me reçoit
me parle de coma, m'dit qu'elle n'se réveillera pas
il m'a dit pourquoi, mais j'écoutais pas
le ciel sur la tête c'est peut-être ça.
La famille est la, mais n'sait pas qu'elle se meurt,
trop jeune ou trop lâche pour le dire à ma sœur,
cette même nuit quand l'téléphone sonne à 7 heures
j'ai compris de suite que c'était le docteur.
J'l'ai laissé décrocher car j'avais trop peur.
mon silence contraste ,alors, avec ses cris..
avec ses pleures

REFRAIN:
Pourquoi Je vis, quel intérêt ?
Intérêt.... intérêt....
C'était la plus belle à mes yeux,
(c'était la prunelle de mes yeux)
Pourquoi n'm'ont-ils pas enterré?
enterré.... enterré....
alors qu'on est mort tout les deux.
(dans la chambre 10902)

7 heures du matin, plus aucun signe vital
avec mon beau frère on file à l'hôpital.
On m'y fait signer quelques certificats
annonçant l'décès, dans l'jargon médical.
En voyant son corps j'essaie d'comprendre en vain
qu'elle vivait hier soir, qu'elle est morte ce matin
j'la prend dans mes bras, pour une dernière étreinte,
lumières allumées sur son corps éteint.
J'regarde son visage une toute dernière fois.
Plus là depuis 1 heure son corps est tout froid.
Je réalise seulement à quel point j'l'aimais
je pense à tout c'qu'on n'fera jamais.
Le jour d'l'enterrement ils étaient presque 500,
j'me compte pas, j'étais là, j'étais présent mais absent.
Depuis, je n'pleure plus l'a t'elle remarqué?
J'viens peu au cimetière, j'ai peur de craquer.
Elle se soignait seule en secret
et moi j'étais même pas inquiet
faut dire qu'c'était ma normalité
depuis tout petit de la voir alité.
Elle a vaincu tant d'adversaires
une méningite et un cancer,
bien connue pour leur mortalité
j'pensais qu'rien n'pouvait l'arrêter.
Floues sont mes souvenirs, je ferai tout pour la voir,
la chose qu'on oublie en premier c'est la voix.
Depuis, toutes Les femmes, de dos, sont son sosie
comme si mon cerveau n'avait pas saisit.
J'ai plus d'émotions j'suis sous anesthésie
me laisser en vie est juste une hérésie,
une fantaisie.

REFRAIN:
Pourquoi Je vis, quel intérêt ?
Intérêt.... intérêt....
C'était la plus belle à mes yeux,
(c'était la prunelle de mes yeux)
Pourquoi n'm'ont-ils pas enterré?
enterré.... enterré....
alors qu'on est mort tout les deux.
(dans la chambre 10902)