Point de vue II.
Möly
Ce matin, il s'est levé tôt exceptionnellement car depuis plusieurs mois, il végète dans son lit jusqu'à midi. Mais ce matin, un rendez-vous plus ou moins important avec un conseiller pour l'emploi l'oblige à quitter les lieux vers 8h.
Il y a un an et demi, il a été licencié. Il a du quitter sa grande maison et a aussi quitté son conjoint avec qui il vivait depuis plusieurs années.
Il est maintenant seul dans son petit appartement, mais le quartier est plutôt calme. Il croise rarement ses voisins, mais il s'en fiche un peu.
Ce matin, il descend les escaliers, presque mal à l'aise d'affronter la rue, les gens. Il croise dans l'escalier sa jeune voisine du dessous, celle qui semble mal dans sa peau mais heureuse quand même. Timide mais elle sourit toujours avec franchise quand elle dit bonjour. Il lui répond poliment et continue sa route.
Pendant l'entretien, on lui sort le même blabla habituel: cela va être compliqué pour vous de retrouver un travail au même grade que votre précédent poste, votre âge blabla, la conjoncture blabla, réorientation professionnelle blabla.
- "Foutez moi la paix, bordel!" a-t-il envie de hurler
Mais il regarde dans le vide en fixant le regard de son conseiller. Un homme charmant d'ailleurs. Mais il s'en fout il n'a plus envie. De s'investir, ni dans un travail, ni dans une relation, ni dans une quelconque activité. Il veut qu'on le laisse tranquille.
Il rentre chez lui. La journée file, il erre dans son propre appartement entre la chambre, la cuisine et le salon. Et puis le soir, il a soudainement envie de sortir et de boire un verre. Non, de boire tout court, en fait.
Il rentre dans le premier bar, un bar pseudo branché rempli de jeunes et de moins jeunes. Il s'installe au bar et commande un gin. Il le boit doucement, ça fait longtemps. Il en commande un deuxième puis se met à écouter les discussions des gens.
Des gens qui s'amusent, qui rient, se laissent aller. Puis, il y a toujours les remarques anodines -ou parfois moins anodines- que l'on chope au vol et qui piquent.
-"Finis ton verre cul sec si t'es pas pédé!" crie un jeune homme à un de ses amis
Il ne réagit pas, mais il entend. Il boit son verre. En reprend un autre. Puis, une fois saoul il rentre chez lui, il marche droit mais son regard est loin dans les étoiles. Il pense qu'il marche droit.
Il tombe sur un journal au sol, un de ces journaux minables dont les infos sont d'une superficialité sans nom. Il voit une image et un titre d'article. Des gens se sont rassemblés contre le mariage pour tous. Il n'a même pas envie d'en lire plus. Il se met à pleurer. "Au moins, il n'a pas eu à s'embarrasser de paperasse de divorce, c'est sûr" ironise-t-il dans sa tête
Il se sent seul, il aimerait juste avoir quelqu'un qui le prend dans ses bras, pour une nuit. Mais il ne sait pas où aller, où rencontrer quelqu'un. Sa maladresse ne l'aide pas, croit-il. Il se sent mal à l'aise dans ces lieux de prédilection pour draguer "entre homos". Il n'y va pas, du moins plus...
Il s'allonge dans son lit, encore habillé, et il fixe le plafond en laissant vagabonder des tonnes de choses dans son esprit avant de s'endormir. Et d'attendre demain midi, que son réveil sonne et qu'une journée recommence. Encore.
ton texte m'a de suite "accrochée" Maureen. Plus d'amour, de travail, une triste réalité pour beaucoup hélas !
· Il y a presque 8 ans ·Louve
Merci chère Louve!
· Il y a presque 8 ans ·Möly