Pompette

Laurence Malabat

Il est des mots à consonance enfantine, doux et rond à l'écoute, des mots élégants, dénonçant tout de même, une hardiesse alcoolisée.

« Pompette » ne s'emploi pas au hasard.

Ce serait évidemment effronté de  dire à sa douce lors du petit déjeuner : «  je suis complètement pompette ce matin !» en baignant sa tartine dans le café ; qui elle peut se permettre d'être beurrée. Ou bien  claironner à tout vent que l'on développe des capacités de « pompette » lors d'un entretien d'embauche décisif de webmaster à Volvic !

Non, pompette est un mot à employer à bon escient.

Et ceci est tout un art de le placer dans la conversation !

L'avantage est, qu'il crédibilise les propos incohérents, et l'équilibre précaire naissant. Grace à lui, chaque convive à l'apéro se rassure de voir le « pompette » faire et dire n'importe quoi alors que les plus sobres arborent une verticalité à toute épreuve. Cela amène un peu de désinvolture et surtout l'envie de se resservir à boire, car il reste de la marge.

 Il signifie un état d'être, un peu hors du temps, un peu hors contexte, niais, et souvent mal approprié :

« Que pensez-vous de la hausse des température, et son incidence sur la fonte des glaces ? »...Sourire béat du « pompette » climato-obscur…

Là où « Pompette » ne s'emploi plus c'est lorsque ce sourire fait place à un éclat de rire hilare et bruyant car Pompette signifie être ivre, mais pas trop. Juste ce qui faut pour voir la vie en rose, rien ne peut l'atteindre.

Une aisance éphémère qui font que les plus timides se retrouvent au-devant de la scène, les plus loquaces deviennent fort pénibles, les escalopés tombent à terre, les femmes trop grimées font couler le rimmel, les gringalets prennent de l'aplomb face au plus acerbes.

Puis y a ceux qui ne sont jamais pompette, ceux qui passent directement au stade « bourrés ». Eux, personne ne s'y attend, ce n'est pas progressif, ça se remarque soudainement lorsque en pleine discussion théologique ils se mettent à traverser la piste en une diagonale irrégulière passant d'un point T (Table renversée) à un point P (écrasement de Pieds), jusqu'à un effondrement sur le point M (Mur d'en face). Une chose est sûre c'est qu'ils ne passeront pas ce soir par le point G….Bon d'accord, revenons à une poésie plus « pompette » :


J'imagine en le prononçant, la femme bourgeoise,

Tenant un cocktail Marquisette au bout des doigts,

Recoiffant sa crinière amidonnée, murmurant d'une toute petite voix :

« Bigre, suis ronde comme une queue de pelle ma foi ! ».

 

J'imagine, le poivrot de comptoir,

Agitant son verre de Ricard,

Expliquer la situation à sa femme, au téléphone

Que c'est à cause des embouteillages qu'il est devenu ivrogne.

 

J'imagine l'enfant innocent,

Désignant sa poupée préférée,

Avec un léger accent,

Vouloir donner à boire à « pompette » à la récré.

 

J'imagine les discussions politiques;

Changeant de bord selon le degré d'alcool;

Jusqu'à vouloir renverser Macron, a grands coups de verre ballon.

 

J'imagine en l'écoutant,

Un univers gai et joyeux,

Frais et indiscipliné

Libre et léger

du Pompette du samedi soir..

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