Portraits de pieds
lodine
"La femme sur le Boulevard des Maréchaux
Une femme attend son bus, sur un trottoir, à un arrêt quelconque du Boulevard des Maréchaux.
Ce sont ses pieds qui m’attirent, ou plutôt leur forme.
Longs et minces, ils sont tranquillement blottis dans des ballerines bleu turquoise. Recouvertes de fines pierres dorées, les chausses semblent vouloir raviver la beauté de l’Orient.
Des pieds, je remonte vers les vêtements que l’on imagine aisément suspendus aux cintres d’un imposant dressing, dans une chambre aux murs couleur vert pastel.
La tunique est orangée, la jupe noire grisée. Sa tenue ressemble à un fruit mûr à point, dont le jus coule doucement sous la pointe d’un couteau de table à la Christofle.
Le visage a des contours généreux encadrés par des cheveux noirs mi-longs. La bouche est rouge, maquillée avec élégance. Elle est grande, mince.
D’une quarantaine d’années, elle ressemble à une actrice des années cinquante. Les voyages semblent s’être incrustés sur elle, sur ses vêtements, sa tenue. Tout semble léger, en suspens, comme si elle allait de nouveau s’envoler vers des paysages d’Asie ou d’Afrique. Tout en elle respire la quiétude. On la dirait nourrie du regard des êtres croisés sur sa route. Pas ceux marqués par les vicissitudes de la vie, mais par ceux qui portent dans leur regard la sagesse de leurs actes, la foi en leurs traditions. Ses yeux sont ouverts, calmes, profonds. Peu importe qu’ils soient bleus, verts, marron ou noirs.
Elle rayonne de tout son être. Elle est la femme des aubes naissantes, des nuits prolongées sous le feu des étoiles.
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La femme sur les quais de gare
Elle avait deux orteils, l’un proéminent, l’autre mince. Elle les exhibait, indifférente, dans des sortes de nu-pieds sans forme. Elle fumait cigarette sur cigarette, indifférente aux regards, aux sifflements de trains, aux mouvements de masse, aux cris des gamins. Elle fixait son regard sur un horizon bouché par des constructions métalliques. Un train s’éloignait. Il emportait sa raison d’être, sa folie et sa vie. Son homme. Son amant, son chien servile, son lécheur de chatte. Elle gardait sur ses lèvres le goût amer qu’il avait déposé en l’embrassant avant de se fondre dans la masse. Elle naviguait d’un pied à l’autre, cherchant à récupérer l’habitude des départs. En vain. Il était parti sans un regard vers elle. "
J'aime le premier texte, moins le second.
· Il y a plus de 13 ans ·matou