Préface pour " Ma drôle de guerre "...

Camille Salmon

la biographie d'un de mes clients, médecin de guerre en 1940.

En avril 2013 je rencontrai Robert pour la première fois, prémices habituelles d’une énième aventure biographique toujours source de joie, quel que soit le client.
J’ignorais alors qu’après plus de six mois de collaboration intensive, une douzaine d’heures d’entretien et des échanges épistolaires réguliers, son projet d’écriture deviendrait le plus riche d’enseignements que j’avais connu à ce jour.
Souvent au cours de nos rencontres, Robert me faisait part de ses craintes concernant ses futurs lecteurs : « je laisse trop parler mon ego, ils vont me trouver orgueilleux », disait-il.
Le travail achevé, un seul constat s’impose : à une époque où les egos en question sont susceptibles d’enfler pour des raisons futiles, il est bon justement de se pencher, toutes générations confondues, sur des parcours hors du commun dont la jeunesse d’aujourd’hui ne saurait se douter, et d’en tirer peut-être, quelque enseignement.

Homme d’enthousiasme, de conviction, d’altruisme et de curiosité insatiables, ces qualités qui savent défier le temps qui passe (à 97 printemps, bien des fois son œil rieur et ses éclats de voix me permettaient d’entrevoir le jeune homme des années 40 qu’il me contait), son existence a suivi deux grandes lignes directrices : celles du combat et du sensible.

Combat au sens le plus large du terme dans cette « drôle de guerre » relatée dans cet ouvrage. Combat en tant que fondateur des classes de neige de santé et du mi-temps pédagogique et sportif à l’école. Combat pour la dignité et contre l’entrée du typhus en France (il contractera lui-même le virus), lorsqu’en 1945 il sera remobilisé, cette fois en tant que médecin-lieutenant et sous les ordres d’un colonel, dans le camp de rapatriement de déportés de Ravensbrük. Combat d’une vie pour la défense de la médecine libérale et la pérennisation du rôle de médecin de famille, qu’il mènera en tant que coprésident fondateur de la Fédération des Médecins de France. Combat pour l’intégration des personnes handicapées dans le milieu du travail : en 1961, il sera le premier diplômé de la Jeune Chambre Economique Internationale pour avoir fondé la Banque des Travailleurs Handicapés.

Personnage de contrastes, il possède cette qualité rare d’être à la fois homme de terrain et d’action, mais aussi d’introspection et de contemplation. En témoignent ses talents de photographe, de peintre (il exposera régulièrement au Musée d’Art Moderne de Paris lors des salons des médecins), de poète (membre du Groupe des Ecrivains Médecins, il recevra les compliments d’Henri Mondor, homme de lettres passionné), d’écrivain... et d’égyptologue.

Je ne peux m’empêcher d’ajouter à ces vertus la plus touchante d’entre elles : celle d’un homme amoureux comme au premier jour d’une étudiante en médecine rencontrée en 1938.

Robert m’a confié la rédaction de cette préface, et je l’ai accepté en toute humilité. Je ne peux conclure qu’en lui faisant part de mon respect, de mon attachement les plus profonds, et de ma gratitude.
Plus qu’une grande joie, collaborer avec lui sur ce livre fut pour moi un honneur.

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