Qui ne dit mot
molly
Contre ma joue le vert mouillé. Je suis allongée dans l'herbe. J'ai trop bu. Il fait nuit, il est tard.
Contre ma nuque l'oreiller bouchonné. Il est plus tard. Je ne sais pas comment j'ai négocié les escaliers. Peut-être qu'il m'a portée.
Contre mon ventre son ventre sec, contre mes seins ses doigts rugueux, contre mon cou sa joue qui pique. Entre mes cuisses...
Je n'ai pas dit non. Parce que ça n'aurait rien changé. Mon consentement, il se torche avec.
Je le connais. Ce n'est pas la première fois que je me heurte à son corps. Pourtant, là, c'est différent.
Ma vulnérabilité, sa force, la bestialité de son désir, mes gesticulations vaines... Je capitule.
Je n'ai pas dit non.
Pour ne pas donner corps à la certitude que tu ne m'aurais pas écoutée.
Pour ne pas gâcher ta vie.
Pour ne pas admettre que je m'étais entichée d'un con.
Pour ne pas requalifier l'acte, subir le poids des mots.
Pour ne pas supporter les regards et leurs doutes.
Parce que dans ma tête, une petite voix résonnait : "Tu l'as bien cherché, reconnais..."
Je n'ai pas dit non.
Qui ne dit mot consent.
Je n'ai pas dit non.
D'accord!...
· Il y a presque 11 ans ·Tu sais que côté "foutage de trippes à l'envers" tu en connais un rayon toi aussi.
Un texte lame de rasoir, où chaque phrase y va de sa lacération.
Frédéric Clément