Respire

monster-inside

Tout à coup, l'air qui emplissait ses poumons se fit moins putride.

"Comment vas-tu?", "Bien!", répondit-elle. Et elle y croyait. Dur comme fer, elle y croyait.

L'air devenait pur, frais, euphorisant.

D'abord elle avait essayé de l'ignorer, tout simplement, mais ça n'avait pas marché. Alors elle avait essayé de le planquer, au fond d'un placard. Mais l'odeur de la chair en décomposition le rappelait sans cesse à son souvenir. Elle avait essayé de la masquer, de la noyer sous des tonnes de parfum d'ambiance bas de gamme, avait allumé des couloirs entiers de bougies anti-tabac.

Elle l'avait découpé en tronçons inégaux pour s'en débarrasser plus facilement, et comme à la télé elle les avait soigneusement emballés dans des sacs plastiques. De nuit, elle avait fait une descente au jardin du coin pour les enterrer, mais au dernier moment avait pensé aux chiens qui s'y baladaient. Elle avait repris tous les morceaux et décidé de les bruler. Un grand feu de joie. Une ultime pollution aérienne.

Au petit matin elle fut réveillée par un bourdonnement. Obsédant, lançinant, interminable, une sorte de grande expiration qui jamais ne reprenait son souffle.

"Comment vas-tu?", "Bien...", répondit-elle. Mais elle n'était plus si sûre.

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