Retour au quotidien : le commissariat de Cavaillon
Christian
— Alors Franck ! Ce voyage en Italie, du nouveau pour l'enquête ?
— Du nouveau à franchement parler, non ! Mais j'en reviens avec un sentiment bizarre.
— Comment ça bizarre ?
— D'abord avant même de partir, j'ai trouvé étrange pour ne pas dire suspect que le PDG de ce groupe, une énorme multinationale de l'agroalimentaire, accède à ma demande d'information et de plus me reçoive en personne. Les multinationales de ce type sont bardés de services juridiques et répondent par l'intermédiaire de leurs avocats. Je pensais qu'il devait avoir une relation assez personnelle avec Julien Portal.
— Que ressort-il de votre entretien avec ce PDG ? Interroge le commissaire. Il nous faut des éléments tangibles pour continuer cette piste, sinon comme vous le précisez fort bien, notre petit commissariat de Cavaillon ne va pas être de taille à lutter.
— En fait le Senior Gianelli était très courtois, à l'aise, m'indiquant qu'il mettrait à notre disposition les éléments comptables entre son groupe et la Startup d'Aix en Provence.
— Donc vous revenez sans rien, si je comprends bien !
— Attendez ! Comme l'entretien se terminait, nous prenions ensemble un café, j'en profite pour lui montrer l'image capturée par une caméra de surveillance de celui qui est, probablement à 95%, le meurtrier et l'incendiaire de la voiture de Julien Portal. A la vue de la photo, il laisse échapper la tasse de café qu'il tenait à la main, comme si il reconnaissait la personne en question.
— Elle est bien bonne celle-là, je suis le commissaire de ce bureau perdu du Luberon et je ne sais même pas que l'on a découvert le visage du meurtrier, vous y allez un peu fort, quand même Franck.
— Georges, de la Scientifique m'a communiqué la photo dix minutes avant mon départ, je n'ai pas eu le temps de vous en faire part, désolé. Mais Georges a lancé une recherche pour essayer de mettre un nom sur ce visage, il aura peut-être du nouveau à vous apporter.
— Désolé, désolé ! Vous avez un preuve tangible fournie par la scientifique sur un meurtrier présumé, et vous partez en Italie, sans même m'en avertir ! C'est une faute professionnelle, vous voulez dire, je vais être obligé de faire un rapport, je ne vous pas un dessin sur ce que cela veut dire !
Franck est complètement estomaqué, il ne s'attendait pas une telle sortie du commissaire. Visiblement celui-ci se venge de l'affront qu'il lui a fait subir avec la divulgation du dossier au journaliste.
Effaré devant tant de mauvaise foi, il quitte le bureau du commissaire sans réfléchir en claquant la porte. Il va être dessaisi de l'enquête à cause d'un supérieur incompétent et imbu de son pouvoir.
Tellement excité par cet entretien, il n'entend pas son portable vibrer dans la poche de son blouson, quand il décroche c'est déjà trop tard. C'est Georges qui essaye de le joindre il appuie immédiatement sur l'icône de rappel.
— Bonjour Franck, ça va ?
— Non ça va pas , Georges !
— Dis-moi ! ça c'est mal passé en Italie ?
— Non, au contraire ! Je rapporte des infos intéressantes, d'ailleurs il faut que je passe te voir, j'ai un indice à te confier.
— Alors quoi ?
— C'est l'autre connard de commissaire, il veut me coller un rapport suite à la photo du meurtrier que tu m'as confié avant de partir, pour obstruction à l'enquête, pour la simple et bonne raison que je ne lui en ai pas parlé.
— Attend calme-toi ! Viens me voir, ne t'inquiète pas pour ton chef, si il met ses menaces à exécution, il va se ridiculiser, je t'expliquerai.
Deux heures plus tard, Franck l'Ouvrier gare sa voiture personnelle ( en l'état de ses relations avec son patron il a préféré ne pas prendre sa voiture de service) sur la parking des bureaux de la Scientifique.
— Salut Franck ! Je suis heureux que tu sois venu directement. Tu as de nouveaux indices donc !
— Oui, certes mais à quoi bon "l'autre" va me dessaisir du dossier et va tout faire pour s'approprier du mérite de l'affaire, surtout si on retrouve le meurtrier.
— Tout d'abord du calme, Franck !
— Facile à dire ce n'est pas toi qui est sur la sellette !
— Effectivement ce n'est pas moi mais ton plutôt ton cher patron !
— Là, je ne comprends plus !
— Je t'ai donné la photo de notre gars le soir de ton départ en Italie, le lendemain matin j'ai fait un email au commissaire, en lui indiquant que nous avions de nouvelles informations que nous t'avions communiqué et qu'il les trouverait en pièces jointes au mail.
— Donc il savait pour la photo du meurtrier !
— Il ne savait pas, il n'a certainement pas pris la peine de savoir !
— Comment peux-tu en être sûr ?
— J'ai la confirmation de réception de mon courriel, mais c'est un grand dilettante. Il n'a certainement pas pris la peine d'ouvrir mon dossier en pièces jointes. Donc quand tu lui as expliqué, effectivement il ne savait pas, il n'avait tout simplement pas pris la peine de savoir, donc le fautif c'est lui à 100% et surtout pas toi !
— Ah, Georges qu'est ce que je ferai ans toi !
— Maintenant montre moi tes indices.
Franck enfile des gants de latex plonge la main dans sa sacoche et ren ressort la serviette en papier tachée du sang de Gianelli.
— Voilà. Je te ramène du boulot, à toi de découvrir si l'ADN de ce PDG peut nous conduire quelque part !
— Comment as-tu obtenu cette belle tache rouge ?
— En fait il s'est entaillé le doigt en laissant tomber sa tasse de café à la vue du personnage dont tu m'as confié la photo.
— Ah oui ! Je crois bien qu'il y a matière à creuser dans cette serviette en papier.
Au fait j'ai oublié de te préciser que nous sommes sur une trace concernant notre homme !
— C'est extraordinaire, tu as des cracks dans ton service ! Et il viendrait d'où, de la région ?
— Non, de Russie !
— De Russie ?
— Ce serait un ancien colonel retraité des forces armées Russes, c'est d'ailleurs pour cela que nous avons retrouvé son visage. Pour l'instant je ne suis sur de rien, on fait faire une analyse morphologique poussée pour comparer les visages, mais cela colle aussi avec les balles retrouvées dans les bois.
— Comment savoir si mon PDG de la multinationale a ou avait des connexions avec ce russe, toujours est-il que je suis sur qu'il l'a reconnu sur la photo.
— Peut-être se sent-il lui aussi menacé ! Nous ne savons pas ce qui se trame derrière ces grands groupes, des milliards d'euros sont en jeu !
— Je ne sais pas si on découvrira jamais ceux qui sont derrière ces horreurs, l'affaire se complexifie un peu plus chaque fois que nous découvrons de nouveaux indices.
— Ecoute Franck, ce qui compte c'est que nous avançons. Crois en mon expérience ceux qui sont derrière tout ça finiront bien par commettre des erreurs, déjà ils ignorent tout ce que nous savons !
— Georges merci vraiment pour ton accueil et ces nouvelles infos, je repars gonflé à bloc.