Retour vers Cassiopée

Chère cœur, j'entends tintinnabuler l'heure du déjeuner, mais ni cette musique ni cette odeur de fougasse qui charme mes sens ne sauraient me détacher de vous. Je suis sur le retour, guidé par cette constellation qui étrangement porte votre  prénom lumineuse Cassiopée. Vous le savez de par mes intrépides absences, je parcours le globe de pôle en pôle à la poursuite de mon objectif. Je crois très chère, que vous ne resterez pas de glace en apprenant la nouvelle. Bientôt vous deviendrez l'unique lumière de chaque salon ou boudoir qui voudra, de vous de moi, tout savoir.

Enfin j'ai trouvé, et vais sans doute bouleverser le sort d'un grand nombre. Voici en quelques lignes l'éclosion, me semble-t-il, d'une révolution.

 Il y a 42 nycthémères (Entendez par là, jours, et pardonnez un écart d'écriture  à l'incorrigible scientifique que je suis mon trésor), guidé par un autochtone nous arrivâmes sur une terre inconnue de nos cartes ou nous attendait notre guide. Lorsque j'ouvris l'unique persienne de ma chambre flottante, je l'aperçus sur la plage nous faisant signe à l'aide d'une imposante feuille de palme. Perpétuellement méfiant envers mes congénères (Surtout si ceux-là même sont couverts de tatouages aux arabesques improbables) j'avais peur de l'entourloupe. Si je dois vous faire une confidence, j'étais un peu pétrifié à l'idée d'en découdre avec une telle altérité. Je lui offris donc à boire et lui payais la moitié de son dû. Une fois un café absorbé je fus rassuré sur les intentions de notre gourmand guide Aschi et de son appétit pour nos viennoiseries.

Après trois heures de marche au travers un dédale de verdure nous arrivâmes et nous la découvrîmes. Elle était là sous diverses formes et couleurs. Du doré au noir, du solide au semi-liquide.

J'étais submergé par une indicible émotion. Nous étions bouche-bée. Nous la voyions bouillir et pâlir en silence, ou au contraire reluire et crépiter sous un feu d'enfer, remuée et secouée par une femme aux allures de sorcière. La logique voulait que nous prenions nos distances, que nous mesurions, pesions...  mais impossible de résister à ses odeurs. Nous la goutâmes alors, dorée puis en purée ou en brillants bâtonnets cette racine si savoureuse.

Douce sentence que celle d'avoir touché son rêve. Vous aussi vous serez sous le charme de ses attributs que j'ai hâte de partager avec tous. Je l'ai d'ailleurs appelée Pomme de Terre, afin de ne jamais oublier que trop longtemps j'ai quitté la vôtre. Paradoxe de ma vie qui pour réussir, de vous m'a fait trop languir.

Voici que j'entends les jurons de Monsieur Trottoir qui une fois de plus a manqué l'unique marche qui mène au pont, sans doute impatient de goûter le plat à la viande que nous a préparé Aschi. Je vous laisse amour car il me faut remettre sur pied ce gros ours à jambe de bois qui me sert de second à bord de ce vaisseau.

 A très bientôt votre dévoué Antoine-Auguste Parmentier.

CHRISTOPHE PARIS

Pomme de terre, Tintinnabuler, Eclosion, Couleurs, Boudoir, Arabesque, ReluireAltérité, Sentence, Glace,

 Constellation, Fougasse,Confidence, LogiqueRêve, Paradoxe, 

Persienne, Palme, Trottoir, Emotion, Pôle, Entourloupe, Nycthémère, Café, Perpétuellement.