Rodentia non grata

 Survivre dans ces bas-fonds, en décors sordides

Elever ses petits dans des nids de fortune

Nos enfants mignons gais dans un chahut candide

Sont des soleils de joie de ce monde sans lune

Pour nous trotte-menu, c'est la danse de nuit

Rodentia non-grata du clan des myomorphes

Creuseurs de trous, intrus, coureurs fous amphibies

Dans l'eau ou sur toits, nous sommes polymorphes

Des maudits omnivores qui laissent rongeurs

L'homme nous appelle «rats» si méprisamment

Que ses mots dits : notre mort, nos pleurs nos douleurs

C'est du poison dans ta voix mon frère de sang

Et le nôtre coule dans ton laboratoire

Dans ce bain de souffrance, la rate câline

S'est lovée en boule, puis ferme ses yeux noirs

Tu l'as noyée en silence, ma soeur murine

Sans raternité pourtant qu'est l'humanité ?

Noé nous embarqua bien au fond de sa cale

Nous aussi sommes vivants, d'amour et d'été

Regardez humains notre coeur n'est jamais sale

L'âme propre et pure je dépose les larmes

Ô Prince Masseter * aux grandes incisives

Je souris tu murmures la paix sans vacarme

Finie ma vie, Père, j'arrive sur ta rive

*Prince Masseter : dieu des rats