Rupture sous la pluie

jo75

Paris, 1h30 du matin

Tu marches devant moi à grande vitesse, je t'emboîte le pas. Nous nous crions dessus. J'ai été désagréable ce soir-là, sans raison. Nos amis n'ont rien compris. Tu ne comprends pas non plus. Tu me devances, m'abandonnant derrière toi. Mais je te rappelle, tu reviens vers moi.

Soudain, j'éclate en pleurs. Ta colère retombe aussitôt et tu me prends dans tes bras. Non, je ne me suis pas énervée car tu es arrivé en retard, mais parce que tu es arrivé en retard avec elle, mon amie. Tu me rassures. Cette jalousie est insensée. Elle est mon amie et vit déjà avec quelqu'un. C'est là que tu réalises la profondeur de mes sentiments.

Pourtant, nous en avions discuté. Tu n'étais pas prêt pour l'engagement. Je le savais et j'avais voulu quand même tenter, espérant une évolution de notre relation. Elle avait évolué en six mois, et de jour en jour, j'espérais pouvoir te faire changer d'avis et te conquérir de plus en plus.

Mais ce soir de novembre, sous la pluie, tu m'annonces tristement que notre relation est à deux vitesses et que tu ne pourras me donner ce que je souhaite. Tu dis m'aimer beaucoup, mais moi je t'aime tout court. Tel un couperet, tu décides la fin de notre relation, à 2h du matin. Ces mots que je n'oublierai jamais, la tristesse dans tes yeux, ta peur de me blesser encore plus longtemps si nous poursuivons cette relation, la peur que je t'en veuille. Je t'écoute, droite comme un piquet, sous cette pluie qui ne cesse pas. Ces mots qui sonnent comme le glas et que je me répèterai les jours suivants. Dehors, il fait froid mais tes mots me glacent encore plus. Je digère ta décision, les jours tristes qui m'attendent. Tu me prends dans tes bras. Tes lèvres sur mes joues et sur le coin de ma bouche signent la fin définitive de notre relation. Mais mon corps entier réclame un dernier baiser. Tu regardes mes lèvres mais n'oses m'embrasser, toi qui as initié la rupture et porté un coup à mon cœur. Je pose alors mes lèvres sur les tiennes. Ces baisers que je vivrai comme étant les derniers, dont je savoure chaque seconde. Tu ne me repousses pas. Nous restons quelques minutes dans les bras l'un de l'autre, à nous embrasser comme avant. Tu me prends la main et la places dans ta poche avec la tienne, et m'emmènes trouver un taxi. C'est ainsi que s'achève notre histoire : dans une rue de Paris, sous un parapluie qui nous protège à peine de cette pluie torrentielle.

Le lendemain je me lève épuisée et triste à en mourir. Je m'apprête déjà à affronter la journée, à vivre avec cette perte encore fraîche et le manque de toi que j'appréhende déjà. Ton regard brun plein de tendresse, tes mains si douces que j'aimais porter à mes lèvres, ton parfum que je humais au creux de ton cou, ton bras autour de ma taille quand nous nous promenions dans la rue, la chaleur de tes bras qui me réchauffaient, moi si frileuse et toi qui avais toujours chaud, la chair de poule que te procuraient mes caresses quand nous faisions l'amour.

Déjà l'espoir ridicule, mais humain, que ressent toute personne qui se fait quitter, monte en moi. J'espère te manquer, que tu te rendes comptes de ton erreur et me revienne, pour du sérieux cette fois. Mais je sais bien que cet espoir a peu de chances de se réaliser. Alors je me fais à l'idée qu'entre nous deux, c'est définitivement fini et m'apprête chaque jour à vivre avec ce manque de toi, qui d'abord d'heure en heure, puis de jour en jour, finira par s'estomper. En attendant, j'essaie de garder le sourire devant les autres. Mais de retour dans ma solitude, au fond de mon lit, je ne pense qu'à toi, me ressasse nos derniers instants, et contre mon gré, je pleure jusqu'à trouver le sommeil. Demain j'apprendrai de nouveau à t'oublier et à ne plus t'aimer.







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