Scènes de la vie Parisienne

edna

Rencontrer à loisir, s'évader et revivre, dans la ville qui nous ressemble

COMMERCES/SERVICES


L’amoureux timide

Un soir tout près d’ici,

Sa voix douce a trahi,

La gêne de se trouver mignons,

Tous deux sous une Ombrellation.


Cette ombrelle rétractable,

Accolée contre un arbre,

Sur un banc ou un réverbère,

Nos conversations, elle génère.


Je t’ai trouvée très belle,

Mais je n’ai pas osé,

Te proposer un cinéma,

Un thé, un verre, un opéra.


Je t’ai plutôt emmenée,

Trente mètres plus loin,

Glissant furtivement ma main,

Dans la tienne à l’Improciné.


Ce cinéma des rues,

Improvisé partout,

Sur un banc ou un abribus,

Projette nos films les plus fous.


Demain si je n’ose plus,

T’emmener au restaurant,

Je te proposerai sûrement,

Un déj dans une « table-avec vue ».


Dépliant une table,

En libre-service,

Nos déjs sortis de leurs cartables,

Dans la rue infusent leurs délices.



DISTANCE, TEMPS, ACCESSIBILITE, MOBILITE

La semaine métropolitique du Parisien


Le lundi, il galope d’interminables couloirs.

Des grand-mères pétrifiées aux cadres sup hâgards,

Suffoquant, transpirant, la foule dans son sillage,

Le laisse maître à bord du Wagon Rattrapage.


Ô Wagon Rattrapage, tes prises et ton wifi,

Achèvent nos devoirs retardataires lundi.


Toujours dans la course, le mardi,

Il se sent d’humeur cérébrale.

Le Wagon Littéraire, s’il choisit

Louera Vian, Ronsard ou bien Nerval.


Ô Wagon Littéraire, aux fauteuils douillets,

Trompons notre ignorance dans tes charmants essais !


Sorties Ciné le mercredi,

Il aura un avis « pêchu ».

Pour quelques euros de plus,

Rêvera d’un western spaghetti.


Ô Wagon Cinéma, tes annonces nous ravissent,

Tandis que tes classiques, dans la paix nous unissent.


D’humeur loquace le vendredi,

Le cosmopolite il choisit,

Et troque des râleurs dépressifs,

Contre des linguistes compulsifs.


Wagon cosmopolite, chéri du Parisien,

Tu lui donnes l’illusion, du monde d’être citoyen.


Les fêtards ont déserté

Les couloirs fantomatiques,

De lignes les plus usitées,

Et même les aquatiques.


Ô métro aquatique, de Grenelle à Bercy,

Le dimanche, tu vogues sur la Seine assoupie.



CULTURE DU NUMERIQUE

L’odyssée de la solitaire


J’ai traversé la foule frénétique à Haussmann,

Crié ton nom au vent hystérique de Barbès,

Subi les bavardages de touristes en liesse,

Pour enfin refuser d’en connaître les arcanes.


Tu n’étais jamais là et je me suis perdue,

Dans la danse des décibels, mon âme éperdue.


C’est bien dans les échoppes bruyantes de la Huchette,

Que j’ai cherché ; comme si tu serais à Saint-Michel !

Chassé par les jeux des gamins de La Villette,

Tu as fui les chalands plaintifs du Carroussel.


Tu n’étais jamais là et je me suis perdue,

Dans la danse des décibels, mon âme éperdue.


« Où est-il ? », je m’écrie, en amante esseulée,

Meuglant sur les klaxons du Boulevard Magenta.

« Je l’ai cherché partout, même jusqu’au Lilas »,

« Par ici, Mademoiselle, le voici, il est prêt ».


Tu étais enfin là et je t’ai retrouvé,

Célébrant en sourdine cette paix retrouvée.


Mon Silence, mon aimé, règne au Parc Montsouris.

Apaisée, je m’installe près d’un Tronc littéraire,

Dans l’iPad qui habite mon arbre favori,

J’hésite entre Balzac, Zola et puis Baudelaire.


Tu es là mon chéri, triomphant des tumultes

De la ville, cher Silence, je ris, je pleure, j’exulte.


Tout près de moi, un homme a branché son ordi

Aux ports USB sur le Mur connecté.

Il a choisi un film, je crois bien un Carné,

Savourant mon silence, j’ai oublié Paris.


Tu es là mon aimé, tu as vaincu mes peurs,

Et pour une sieste encore, Silence libérateur.


Lexique complété d’idées supplémentaires:

Cabine à lire : Cabine téléphonique accueillant une mini-bibliothèque avec système d’abonnement et chat interne entre abonnés.

Distributeur savant : Distributeur vendant non pas des en-cas mais des extraits de poésie.

Improciné : Petites bulles de cinéma improvisés dans les rues. L’écran pourrait être un mur d’abribus, ou un panneau suspendu à un piquet sur un banc.

Métropolitique : « Politisation » du métro au sens de lieu de débat, de culture et de rencontres : wagons dotés de prises pour travailler, d’écrans TV, de bibliothèques, d’un espace pour converser en langues étrangères.

Mur connecté : Mur incrusté de ports USB/prises pour favoriser le « travail au vert ».

Monsieur-je-sais-tout : Plans interactifs géants par quartiers permettant de rechercher les restaurants et les activités à proximité et de s’informer sur le journal TV.

Madame-la-plaque : Plaques des rues Parisiennes comportant un QR code. En le scannant, le passant a accès à l’histoire de la rue, du quartier et peut écouter une musique associée.

Ombrellation : Parapluie rétractable fixé sur un réverbère ou un tronc d’arbre. Pratique en cas d’averse soudaine et facilitateur de rencontres. Possibilité d’y projeter un jeu vidéo, un chat avec d’autres ombrellations ou de diffuser le journal TV.

Table-avec-vue : Tables dépliables dans la rue, comme des bornes d’Autolib, permettant aux petits budgets de s’asseoir pour manger leurs sandwichs à emporter en toute convivialité.

Tronc littéraire : iPads permettant d’accéder à une bibliothèque en ligne incrustés sur des arbres.

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