Sérieux comme un pape
lazyjack
Alphonse était facétieux, galopin de comptoir, taquineur de première…
Il aimait par-dessus tout distiller sa malice, épater la galerie
Par des croustillances crues, fulgurances en saillies, pour des rires aux larmes.
Il aimait les délicieux frémissements de mâchoires, les souffles en prière
Pour redécouvrir le goût doux amer de réglisse, des subtiles moqueries,
Des ironies bienvenues déshabillant l'ennui qui tous, nous désarme…
Les désopilances légères achevaient ça et là, les doux récalcitrants
Qui se laissaient déjà faire, les blagues étaient exquises, les mots étaient légers,
Il tenait son auditoire, affamé de risées, de belles turlupinades…
Quand un pisse-vinaigre sévère tricota des fla-flas pour faire taire l'épatant,
Il sortit sa toute dernière et superbe sottise, laissant un naufragé
Balbutier une pauvre histoire, tissu de billevesées, ragoût de chiffonnades…
Les fâcheux, rabat-joie, n'ont pas l'humour limpide des conteurs de comptoir,
Ils ne goûtent guère la gaieté des travers quotidiens, reflets de nous-mêmes,
Tendre est la caricature, précieux est le trait plein, pas de demi-mesure,
Il va tellement de soi que l'on se débride sur notre triste foutoir
En suçant l'hilarité soufflée par l'ange gardien qui fait un « café-crème »
Envoie à la revoyure les mauvais plaisantins sans espoir de conclure…
Nous sommes tous de part et d'autre,
Les beaux miroirs d'Alphonse nous déstabilisent,
Si j'étais sérieux comme un pape, je me ferais du souci….