SÍ
eaurelie
Deux phrases. Deux questions qu'ils se sont renvoyés en souriant, la cigarette à la main. Deux questions que je ne me suis jamais posée parce que je redoute bien trop la question. Parce que je suis profondément malade de vivre. Choses que jamais je ne me demanderai. Du moins, jamais pour le moment. Je veux plus. Je veux beaucoup, beaucoup, beaucoup plus que ce que j'ai à l'instant même. Je ronge mon frein, j'attends le déclencheur. Je remets à Après toute ma vie. Toute. Ma. Vie.
Je suis seule et je ne rencontre personne? C'est normal, c'est pour après. Quand je ne serai plus aussi fatiguée, plus aussi lassée. Quand l'envie de me coucher en rentrant m'aura quittée, que j'arriverais à sortir longtemps sans m'ennuyer et sans en souffrir. Je me dis que çà s'arrêtera bien un jour. Et puis, en fait, çà s'arrêtera pas.
Mon travail me plait mais je n'y suis pas épanouie? C'est normal. C'est un travail temporaire que je fais ici. Je remplace Anna et dans trois semaines, je reviens à Bordeaux. Dans trois semaines.
Je marche par phases. J'étais en phase de deuil ces deux étés. Le Deuil d'une Liberté effleurée, le deuil d'une amitié tellement forte et fusionnelle que je m'y suis brûlée, le Deuil de mes deux grands mères. Le deuil. J'ai du mettre en terre des corps, des cahiers, des cartes. Enterrer des souvenirs, des images et des fous rires. J'ai du lutter pour qu'ils restent dans leur boite. Lutter des mois et des mois et des mois. Maintenant, ils y sont. Ils ne son plus omniprésents. Je vis en paix. Je n'ouvre plus les boites, les contours du visage se font flous et incertains, les souvenirs se bornent aux éléments naturels. Un virage, une caldera, la couleur des murs. Les mots, les sensations en sont enfin partis. Ils laissent les lieux nets.
Pour mes grands mères, la douleur pulse encore. Le deuil n'est pas encore terminé. J'ai souvent tendance à oublier. Je les ai oubliées plus facilement que le Garçon. Parce qu'il prenait vraiment toute la place. Je n'arrive pas encore à savoir si c'est bien ou mal. C'est ainsi, c'était ainsi. Me manque maintenant, surtout, la possibilité de débouler en grand dans leur entrée et crier à tue tête que c'est moi. L'odeur de la cigarette imprégnée dans les tissus. Son parfum. Me manque cruellement la possibilité de lui parler. De lui raconter. çà continue à faire mal. Plus terriblement mais le vide est toujours aussi... béant, tu sais. Je reste avec de l'air partout à l'intérieur. Près de l'embolie.
Y'a du sang. Y'a beaucoup de sang à l'intérieur. J'ai beaucoup souffert mais je n'en ai rien dit. Seulement écrit. J'ai écrit des milliers de lignes là dessus. A tourner en rond à tenter de comprendre, à réclamer au papier des explications. L'encre s'est terminée et j'ai commencé à étancher le sang en lettres nettes et claires.
Je réalise qu'il a fait passé beaucoup de messages. Et je réalise que je me retrouve dans les négatifs. Quasiment tous. J'ai bien saisi l'allusion et je sais où commencer à changer les branchements. Mais où trouver l'énergie? Où trouver l'envie? Comment vaincre ma paresse? Comment recommencer à vivre? Comment arrêter d'avoir une peur pathologique comme çà de la moindre rencontre? Comment contrer le réflexe stupide qui vise à m'exclure d'un groupe nouvellement formé? J'ai terriblement besoin de stabilité, de preuves qu'on tient à moi et qu'on m'apprécie. Sans que je sois obligée de rendre la pareille. J'ai besoin de me sentir un pouvoir.
Je rougis à nouveau tout ce que je peux dès que quelqu'un que je ne connais que peu m'adresse la parole. Je suis cramoisie quasiment en permanence. C'est hyper désagréable.
Parce que je suis gênée. Que je manque de confiance en moi. Si je m'énerve aussi vite, c'est parce que je suis victime à nouveau des circonstances. Que je n'ai aucun contrôle, aucun pouvoir.
Pour me sentir mieux, il va déjà falloir que j'arrête de manger et que je me mette très sérieusement à faire du sport. Mes articulations commencent à grogner. Et j'ai bien trop grossi.. Bien trop.
Mais quelque part, je n'en ai rien à faire. Le poids est une donnée.
D'un côté, je rougis pour tout et de l'autre, je n'ai plus aucune réactivité me concernant. Tout me glisse dessus. Tout, absolument tout. Je rougis parce que je m'imagine à quel point ils doivent avoir pitié de la pauvre fille qui se trouve devant eux. Je réagis por antelacion.
C'est de la psychose.
Impossible d'écrire ce soir. L'espagnol parasite la construction de mes phrases. En ce qui concerne la construction du texte, zéro pointé aussi. Impossible de réellement mettre des mots sur ce qui pulse dedans.
C'est fort et vrai. j'aime beaucoup
· Il y a presque 10 ans ·louzaki