Si j'étais moi

Jonathan Penglin

On m'a posé la question : « Et si tu étais toi ? » Voilà ce que j'en pense.

Si j'étais moi, rien ne changerait. Absolument rien. Tout, du plus petit haussement de sourcil au choix de vie le plus cornélien, serait strictement identique à ce qu'il a été. Rien ne serait différent. Les erreurs, les hésitations, les faux pas et les actes manqués comme les réussites, de par chance à passables à éclatantes. Confronté aux mêmes problèmes, j'aurais opté pour les mêmes solutions. Confronté aux mêmes dilemmes, j'aurais choisi les mêmes voies, bonnes comme mauvaises. J'en serais précisément, exactement, strictement au même point, avec les mêmes questions en tête, les mêmes idées, les mêmes espoirs basés sur les mêmes déceptions, les mêmes rancœurs, les mêmes renoncements. Mes cicatrices seraient les mêmes, suivraient les mêmes tracés, répondraient aux mêmes souvenirs. Et le futur qui s'offre à moi ne différerait en rien de celui que je contemple maintenant. Rien n'aurait dévié, rien ne se serait écarté de la route que j'ai prise et que je continue d'emprunter. Rien. Parce que cette route, à bien des égards, c'est moi. Chaque tournant, chaque embranchement, chaque pas de côté comme chaque raccourci à travers champs, c'est à la fois moi qui l'ai choisi, et c'est ce qui fait que je suis moi. Si j'étais moi, je serais cette route, avec le même point de départ, les mêmes circonstances rencontrées aux mêmes moments, ayant provoqué les mêmes décisions. De A à Z, de bout en bout, tout, absolument tout, jusqu'à la moindre pensée jamais pensée, ce serait moi. En un mot, si j'étais moi, je serais moi. C'est tout.

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