SOMETHING NEW, SOMETHING ALL

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On dit que les prêtresses antiques lisaient des présages dans les vols d’oiseux, et que les Indiens d’Amériques (les « natives » pour être politiquement correcte) interprétaient le moindre signe de fumée. Nous, on arrive à lire dans une page Facebook ou un SMS. : on lit ENTRE les lignes (très très fort, quand on connait l’espace réservé aux interlignes…). Les pensées, les discussions, les paranoïas de la gente féminine tournent autour de ces fameux « signes ». Mais il semble que sous le nom de « psychologie de cuisine », nous ayons plutôt tendance à chercher le vice caché : le cheveu dans la soupe, l’aiguille dans la botte de paille, l’arrête dans le poisson.  La première chose que l’on regarde sur un article que l’on achète, c’est s’il ne présente aucun défaut, au lieu de se réjouir de sa simple possession. Pourquoi un bouton manquant annule-t-il tout le charme d’un petit top en soie ? Pourquoi nous créons-nous toujours quelque chose ?

   Un déjeuner sur l’herbe au Champs de Mars se transforme rapidement en procès. Le jus des tomates cerises gicle autant que le sang de nos amants respectifs (ou ex-amants, histoire d’alimenter le débat). M. avait remis le couvert avec  F., espérant l’accord parfait de la sauce blanche et du sushi, au lieu de se méfier du couteau qu’il allait lui planter dans le dos. La nuit avait été chaude, et elle s’était resservie deux fois de cet homme tendre et fougueux ! Mais le lendemain, le réchauffé eut un goût amer, et c’est le « chat » de Facebook (encore toi !) qui se chargea de jeter aux ordures les restes de leur histoire. Elle avait voulu voir des signes dans les gestes tendres, mais il n’y en avait pas. Sans espoir factice, la chute eut été moins dur : plus on grimpe, plus on s’éreinte, c’est bien connu…

     La relation entre Y. et moi relevait du conte de fées  plus qu’idyllique en ce début de XXIème siècle : nous nous voyions souvent, il avait rencontré mes amis  et l’ascension vers le Saint-Graal du « je t’aime » semblait avancer lentement, mais surement. Mais c’est là que le bas blesse… Ou plutôt se file, s’en s’arrêter ! C’est bien connu, la perfection est trop suspecte (et une paire de bas à 2euros la paire aussi).  Le prince charmant tant encensé dans les contes se révèle, malgré ses nombreux atouts romantiques, n’être au final qu’une bête, un petit voleur du souk ou encore une être humain manquant cruellement de nageoires. Et même si on espère toute que le charme s’accomplira malgré tout, et que nous vivrons heureux et aurons beaucoup d’orgasmes, on préfère d’entrée de jeu affronter l’élément perturbateur. Et le string de l’ex d’  Y. trainant au-dessus de sa FreeBox apparaissait justement, comme ça tombe bien, comme le parfait détonateur. Faisons fi des bombes nucléaires et autres AK-47 : un simple bout de tissu présente une charge explosive bien plus importante que toute la nitroglycérine de la flotte japonaise. 

     Le lieu d’impact : l’avenue Richard Lenoir (et un bar de l’avenue Ledru-Rollin, et oui, le 11ème c’est la Bastille, c’est un champ de bataille par essence). Date : Vendredi soir, une belle soirée de printemps. Cible : un charmant jeune homme contrarié par son travail et désireux de dormir seul pour apaiser ses pensées. Et je ne sais pas pour vous, mais moi j’ai l’horrible impression que la vaillante et pacifique Croisade s’est transformée en Saint-Barthélemy.  Les motifs de la déclaration de guerre semblent alors aussi puérils et injustifiés que ceux qu’invoquerait Joey Starr pour un regard accidentel dans sa direction.  Et on ne vit pas dans une cour de récré’, mais dans un monde d’adultes. Malheureusement, quand on commence à pousser un domino, c’est toute la file qui s’écroule. Et on se retrouve en un clin d’œil à jouer aux fléchettes. Puis au solitaire…

   Finalement, au moment de s’habiller, on regrettera de n’avoir pas acheté le petit top en soie malgré son défaut. D’avoir laisser le paraître prendre le dessus sur le coup de cœur. Et puis le grunge revient à la mode, non ?

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