Son sang sur les mains
lanimelle
Son sang sur les mains
Je l’avais bien tué, j’avais encore du sang sur les mains et puis ce trou noir, ce trou qui abrité les secrets d’une éventuelle enfance.
La petite choses le savait bien qu’elle devait mourir et moi aussi, elle le savait parce qu’il n’y avait pas d’autre choix que de se quitter, il aurait été impossible de vivre dans ce système, impossible de poser sa sensibilité dans ce monde, il fallait la tuer avant qu’elle ne meurt petit à petit de vivre.
Je ne me rappelle plus à quel âge j’ai planté toute ma rage dans son corps, toute ma rage d’aimer plus fort que tout, toute ma rage de préférer arrêter toutes ses souffrances, tous ces cris autour d’elle, je ne sais plus quand je m’étais tué.
Le casque encore sur les oreilles, la musique forte jusque dans les veines, trip surnaturel, assassiner, tuer, pas par plaisir ni par désir mais par nécessité, il fallait toujours tuer les animaux qui souffrent et qui n’ont pas d’avenir, je m’étais euthanasié sans autorisation, je m’étais flinguée parce qu’il le fallait pour continuer la route.
J’ai quelques flashs, peter et les enfants perdus, alice et le calumet du chat, une maison d’enfant en bois venue de l’est, de l’autre coté du mur ou les enfants sont en uniforme, en formation pour devenir des soldats, leur parent avaient sauté par la fenêtre ou creusé des sous terrains pour fuir, les enfants de l’autre coté, ils allaient aussi dans le monde perdu, on se retrouver à jouer dans le ciel, à sauter dans les nuages, nous étions si nombreux et je me souviens de cette petite fille venu de l’autre coté, venu pour échapper à la guerre qui ne faisait pas de bruit.
C’est peut être parce qu’elle tremblait souvent ou qu’elle basculait son corps d’avant en arrière, autiste perdue quelque part dans le monde des grands, perdue dans cette vie insensible et incohérente, perdue dans un labyrinthe sans fin ou le mors au dent laissait un filet de bave et de sang couler de sa bouche.
Parfois son sang réapparait, je voudrai lui parler, lui dire des choses qui réconfortent, des mots qui apaisent, mais je ne les connais pas, je ne sais pas comment on peut apaiser la petite morte, un être pris dans un trou noir, dans une mort sans papier, dans une mort provoquée pour pouvoir créer un nouveau monde.
Ce midi un tout petit enfant est venu, il parlait des films et des horreurs dedans, je n’ai pas pu m’empêcher de lui demander si il aimait avoir peur et qu’Est-ce qu’il ressentait en regardant le sang et l’horreur des têtes qui tombent et rebondissent. L’enfant m’a répondu qu’il ne ressentait rien, même pas la peur, même dans ses rêves la peur ne venait jamais.
Je regardais mes mains et le sang dessus, cette image me faisait peur, je me disais que je ne regrettais rien et qu’à la fois peut être j’aurai pu faire autrement, hurler peut être, hurler jusqu’à casser cette voix que la petite n’utilisait jamais, peut être faire du bruit qui aurait tout cassé, effondré autour le décor en velours bleu métallique.
Je sais qu’elle avait dans la gorge, des chats qui se reproduisaient, des masses de poils qui empêchait quelque ses mots de sortir de sa gorge, maintenant je pense que tout cela était une confusion, c’était l’horreur de l’extérieur qui s’était agglutinée dans sa gorge, formant une chape de béton qui l’avait emprisonnée au fond d’elle-même, enfermée dans son propre corps, dans son propre monde.
« Elle reviendra comme elle est partie » , me dit souvent la femme au cheveux blond bien coiffés, la femme est dans la certitude, la femme est convaincue que la parole ouvre les portes du fond.
Je continuais a avoir du sang sur les mains, je continuais à penser que j’étais un monstre ou un être sans racine pour empêcher le pire.
Madeleine, hurlait une voix au loin, je ne répondais jamais à ce prénom, il n’était pas le mien, uniquement celui des papiers que je garde dans mon porte feuille, comme une batarde de survivante, comme si il fallait justifier toujours des points de repère même si tout était faux, les papiers sont vrais.
Je joue parfois à ouvrir des albums, à regarder l’enfant mort, l’enfant au cœur fragile, à la voix rare, aux différences trop grandes, trop difficile pour elle et pour sa famille, il n’y a jamais de sourire dessus les images, une immense absence dans les yeux.
Ils ont cru un jour qu’elle était vraiment morte, ceux autour qui nourrissaient l’animal, ils l’ont secouée dans tout les sens, je pensais que c’était un nouveau jeux ou je ne gagnerai encore pas, un nouveau jeux sans douceur et sans rire, je suis revenue dans les pupilles, tout le monde me serrait, je n’aimais pas ca être serrée contre des corps dont je ne reconnaissais pas l’odeur, la petite n’aimait pas les baisers, je crois qu’ils disaient qu’elle n’aimait rien ni personne.
Je crois que c’est le jour ou je l’ai tué que mes yeux ont changé de couleur, sur les photos ils ont longtemps étaient gris, gris tristesse, gris mystère, gris en équilibre entre le blanc vide et le noir mort, ce jour là le fond de mes yeux ont opté pour le noir, pour le noir profond, le noir corbeau, le noir gitane.
J’ai passé la moitié de ma vie à me demander pourquoi il fallait se tuer pour vivre, pourquoi il fallait décrocher tout les wagons du passé pour avancer dans la légèreté.
La femme au cheveu blond me dit que je n’ai tué personne, que j’ai grandi juste à coté de tout, que rien n’est totalement définitif dans l’existence, qu’il faut vouloir ouvrir le livre aux pages lourdes de sens.
Je me suis mise à pleurer, c’était ce matin, dans le matin tôt, une panique est venue bouffer mon ventre, je voulais retrouvé madeleine mais je ne savais plus ni ou je l’avais enterré, ni ou j’avais bien pu la cacher.
Le trou noir a voulu me prendre encore, je me suis rétrécie, j’ai fini par disparaitre de l’espace, dans ma transparence j’ai soufflé un peu d’air pour me sentir tout de même encore vivante.
J’ai vu le petit cadavre de la petite fille en cerne, j’ai vu ses membres comme ceux d’une marionnette jetée à terre, ses cheveux de paille noirs, clafit de nœuds et le manque de vie dans ses yeux, c’était triste comme un deuil ou une maladie incurable, c’était triste de voir cette peau encore intact, sans age, comme coupée du temps, je revois le curé d’ars dans sa cage de verre, intact, intact comment pouvait on rester intact après toutes ces années.
La femme blonde n’a pas su répondre, ni m’expliquer l’histoire du sang et des corbeaux qui me dévorent dans mes rêves.
J’ai pris les yeux de cet enfant habitué à la peur, tellement habitué qu’il était dans l’inconscience permanente, je lui ai dis « tu sais c’est chouette d’être un enfant, il ne faut pas sortir trop tot de ce monde », de ces grands yeux qui s’ouvraient comme des fenêtres, de sa si petite bouche il m’a répondu « être un enfant mais je ne sais pas ce que c’est, c’est pas si bien que ca tu sais, si j’étais resté un môme, je n‘aurais jamais pu me défendre, tu comprends ca? ».
L’animelle
J'aime toujours la liberté de votre style. Je ne viens plus souvent ici depuis (l'atroce) rénovation, mais je vais revenir vous visiter... à moins que l'on ne puisse vous lire ailleurs ?
· Il y a environ 11 ans ·Yannick Bériault
merci Yannick, vous avez déserté le nouveau WLW? je n'aime pas non plus la nouvelle configuration du site, je suis aussi sur ipagination mais ce sont les mêmes textes que je publie ici, des fois je me dis que si j'avais du temps je publierai en rouge ici et en noir sur ipagination mais je n'ai malheureusement jamais assez de ce fichu temps! venez sur ipagination il y a une équipe sympa, en plus les textes sont protégés gratuitement... si vous nous rejoignez invitez moi je voudrai bien continuer à être de vos amis!
· Il y a environ 11 ans ·l'animelle
lanimelle