Les Contrebandiers.

stockholmsyndrom

On était en 4ème.


Notre plan était super élaboré: Diluer une bouteille de soda avec l'alcool de notre choix.

J'avais opté pour le Ricard.

La couleur jaunâtre de l'Ice Tea m'inspirait le dégoût, j'avais l'impression d'avoir un peu forcé sur la dose. Je posai délicatement la bouteille d'Ice Tea ainsi que la bouteille de Ricard vide dans mes valises et non dans la poubelle de peur que mes parents s'aperçoivent du plan Machiavélique qui se tramait dans leur propre maison. 

C'est la veille du départ. Cette nuit là je n'ai pas dormi.

J'étais debout avant même le réveil. 

Derniers préparatifs, puis direction le collège, amuse toi bien et surtout fait attention, oui maman t'inquiète pas, bisous, bisous, je retrouvais les autres.

On était cinq dans le coup.

L'appel dans la cour.

Je regardais Fabien, il me fit signe de la tête, comme pour approuver qu'il avait la marchandise. C'était un gars de mon village, le mec avec qui je faisais les quatre cent coups, d'ailleurs cette idée là on l'avait eu en étroite collaboration, j'étais partant pour à peu près tout et lui aussi, yavait pas de chef entre nous deux, on s'entendait bien.

Cependant Fabien m'énervait quelque peu parfois: C'était le plus vieux de la classe, il avait redoublé et semblait de ce fait avoir un pouvoir de séduction indiscutable sur les filles, peut être le côté Bad boy du branleur, peut être parce qu'il était mieux bâti que nous autres, peut-être les deux, va savoir ce qui se passe dans la tête des filles en 4eme.

Je me jurais moi aussi de redoubler un jour.

Les autres aussi étaient là, yavait Gaëtan et Luka, ils n'osaient même pas nous regarder.

Les autres aussi étaient là sauf Michel.

Michel c'était la petite tête blonde aux binocles rondes qui se démerdait toujours pour faire la plupart du temps des conneries à son insu, il était maladroit. Il disait que c'était parce qu'il y voyait rien avec ses triples carreaux. Son prénom, c'était un hommage à Michel Berger, homme d'un autre temps, pauvre gosse, il partait déjà avec un handicap au départ. Moi, je l'aimait bien. Quand je lui ai proposé le plan, il a de suite dit oui.

Il ne manquait donc plus que Michel et j'étais quasi certain que ce con là s'était fait grillé par ses parents avec l'alcool, ça n'aurait étonné personne ici.

Il est finalement arrivé en courant et m'a fait un signe décidé de la tête.

On pouvait partir.


Cinq heures de bus, direction le Futuroscope, on devait y passer deux jours. Sur le papier, ça avait l'air nul à chier. Ma sœur, elle, avait été à Disneyland et avait même eu droit de monter dans le Space Montain. Moi, j'allais avoir droit aux simulations de vaisseaux spatiaux pour 3eme âge et aux documentaires ennuyeux illustrés par des constellations factices. 

Dans le bus, tu t'asseyais pas n'importe où. 

En général, devant, avec les profs, c'était les bons élèves, ceux qui passaient les trajets en parlant du programme scolaire et des éléments perturbateurs de la classe.

Ensuite, juste après, y'avait les solitaires, capables de garder leurs écouteurs dans les oreilles cinq heures d'affilée, les pas concernés, ceux qui préféraient dormir ou regarder le paysage plutôt que de se mélanger aux autres.

Puis venaient ensuite les filles, toujours deux par deux entre meilleures copines, droites comme des I. Ci et là deux trois mecs et puis tout au fond sur la banquette arrière, en haut de l'échelle sociale du bus, yavait nous, les branleurs, les cinq contrebandiers.

On avait pas le droit de bouger, fallait rester à notre place mais parfois, ça bougeait, parfois, yavait un gars qui prenait son courage à deux mains et qui allait s'asseoir à côté d'une fille. 

Fallait être très discret, fallait pas se faire attraper. Quand un gars se faisait attraper, il terminait le restant du voyage devant le bus à côté de Mme Goya, c'était notre prof d'anglais. Mme Goya puait la mort, Elle transpiraient été comme hiver, sa moustache était toujours plus ou moins humide et de son corps se dégageait toujours une forte odeur d'urine. Moi, je devais redoubler d'attention, Mme Goya pouvait pas m'encadrer, j'étais nul en anglais et quand elle me demandais "Do You?" Pour que je complète une phrase, je faisais mine de réfléchir et lui répondait finalement "St Tropez". Ça faisait rire les autres et elle sombrait dans une colère noire. Elle pouvait vraiment pas avec moi, à tel point qu'on avait conclu un marché elle et moi: J'étais le seul élève du collège qui avait le droit de ne pas sortir ses affaires et dormir pendant son cour et en échange, je lui foutais la paix elle et son troupeau d'apprentis rosbifs. Yavait aussi la professeur de mathématiques, Madame Biraben, une vieille sorcière particulièrement tendue tous les jours de l'année, ils nous avaient coller les deux profs les plus sévères de l'établissement, notre classe avait une réputation.

On voulait tous s'asseoir à côté de Clémence, c'était la fille la plus cool de la classe et elle jouait au "Tu paniques".

Moi, j'en pinçais pour Nina, mais elle était timide et moi aussi. Un jour, elle m'avait avoué ses sentiments par l'intermédiaire du copine à elle, j'avais fait de même et depuis ça on s'étaient plus jamais adressés la parole.

Clémence s'approchait toujours de la banquette arrière. Nous, on étaient là a la regarder, s'imaginant des choses que son sourire coquin nous évoquait, incapables de bouger ne serait ce que le petit doigt.

Fabien s'est levé et s'est assis juste devant nous a coté d'elle. Ils ont discuté un bon moment, elle riait à la moindre phrase qui sortait de la bouche de Fabien.

Il lui a dit quelques mots à l'oreille et ils ont entamé un "Tu paniques". On s'est tous approchés pour voir ça.


Fabien a posé sa main sur le genou de Clémence: "Tu paniques ?".

Elle a répondu "Bah non.", Elle en avait vu d'autres.

Il est lentement remonté un peu plus haut que le genou de Clémence et à réitéré la question. Toujours non. Il trimbalait maintenant sa main sur la cuisses fermes de Clémence, elle avait de grosses cuisses mais très fermes, et le jean qu'elle portait les sublimaient parfaitement, la tension montait, il lui a posé la question en la regardant droit dans les yeux: "Tu paniques ?". Elle a jeté son regard dans les yeux de Fabien, attendu un instant, et d'un air sérieux et convaincu a répondu non.

Alors Fabien est monté encore un peu plus haut, il lui touchait maintenant l'aine, nous derrière, on étaient comme des fous, la main de Fabien s'est crispée avant de s'arrêter. Il lui a demandé une nouvelle fois : "Tu paniques ?". La tension était à son comble, Clémence aussi était crispée, l'air toujours aussi sérieux, Fabien était à deux doigts de son jardin fleuri et elle savait que si elle répondait non, la prochaine étape c'était la main sur le coquillage, elle était à pas grand chose de craquer, nous derrière on s'excitaient en poussant des cris d'animaux, ils se sont regardés dans les yeux pendant quelques temps et puis elle a balancé un "ouiiiii" en éclatant de rire, on a tous criés comme pour souligner le retournement de situation, Mme Goya devant aussi a crié, puis le calme est revenu.

Et puis Clémence a dit: "Bon, c'est mon tour!"

On demandait pas mieux, elle nous avait couper la chique en plein élan, fallait bien un second round.

Elle a posé sa délicate main sur le genou de Fabien. Il avait l'air décontracté. De là où je me tenais, j'avais une vue plongeante sur les seins généreux de Clémence, et l'atmosphère dans ce bus de malheur devenait de plus en plus insoutenable. Elle a prononcé le fameux tu paniques. Non catégorique. Elle est remonté plus haut, ça se passait très vite et Fabien répondait non instantanément, c'est enfoiré avait l'air bien décidé à se faire toucher la verge. Elle est remonté jusqu'au dernier palier, le fatidique, et lui a posé  la question à deux millions. il lui a répondu non avec un grand sourire. Nous derrière, on étaient pliés, elle était prise au piège et on riaient aux éclats de notre rire le plus sadique. Elle en menait pas large mais c'était le jeu, elle devait franchir le dernier palier. Hésitante, elle a alors jeté un œil sur la bosse qui trônait entre les jambes de Fabien et son visage s'est décomposé. Elle s'est lancé. Elle pris son courage à deux mains et le sexe de Fabien à une, Il y a eu une explosion de cris et Mme Goya s'est levée pour finalement foncer comme une furie sur Fabien et le traîner devant jusqu'à son siège.

Après ça, on s'est tous rassis et on s'est fait chier.

Le trajet était interminable.

On s'arrêtait pisser ci et là, puis on pique niquer et on reprenait la route. Ça paraissait encore plus long pour Fabien.

L'un de nous a proposé de monter les bouteilles dans le bus au prochain arrêt, et puis on a décrété qu'il valait mieux attendre la nuit à l'hôtel pour les entamer. 

On a décidé de se battre pour passer le temps. Des un contre un, le premier qui dit stop perd, ça se passait derrière, à qui voulait venir. Je me prenais Michel en premier, je n'en fit qu'une bouchée. Ensuite, quelques combats se sont déroulés avant que je défie Gaëtan. C'était un genre de Chinois ou Vietnamien, un enfant adopté, il se prenait pour Jackie Chan et ça avait le don de m'énerver. Gaëtan était costaud mais potelé, il avait plus l'air du flic de Shanghai que de Jackie Chan. Le combat à démarré par une espèce de lutte greco romaine improvisée et s'est fini peu après dans le même style quand maladroitement je lui infligeait un coup de coude involontaire dans les couilles. Gaëtan était séché. On a décidé d'arrêter les combats, puis on s'est fait chier.


On finit par arriver au Futuroscope.


Y'a pas grand chose à raconter sur cette première journée, c'était comme je l'avais imaginé, rasoir et poussiéreux. Nous, on attendait la tombée de la nuit pour rentrer à l'hôtel. Je ne me souviens plus si on a mangé à l'hôtel où ailleurs, ça n'a pas d'importance. On est monté à l'hôtel. Mme Biraben dormait dans l'aile réservée des filles, on récupérait la grosse Goya, c'était du pareil au même. On nous a demandé de choisir nos chambres et nos colocataires. J'ai pris une chambre de deux avec Fabien. Nos trois compères étaient à côté. La suite de la soirée s'est passée ainsi:


22h pétantes. 


Extinction des feux.


Goya s'en va ronfler dans sa chambre.

Une ou deux heures se passent. Fabien frappe doucement sur la cloison. Ça répond de l'autre côté. On embarque nos bouteilles et on file discrètement dans la chambre à côté, le voyage pouvait enfin commencer.

On compare tous nos bouteilles, Ice Tea-Ricard, Vodka-coca, vodka-Oasis, Whisky-oasis, berk, ce con de Michel a sorti une bouteille de Clan Campbell, rien de dilué, il avait pas compris l'astuce, il ferait pas long feu dans le monde de la contrebande.

On tenait plus en place mais se faisait discrets, le chuchotage était de rigueur. Pas pour bien longtemps. 

L'un de nous a sorti un jeu de carte et c'était le début des hostilités. Chacun pioche une carte, les deux qui tombent sur les plus faibles boient cul sec au goulot.

Première manche, bim, pour moi. Seconde, encore une. Je passe la troisième. Je bois un coup à la quatrième. Ça commence à chauffer, les rires s'amplifient. Fabien a droit ensuite a une série de cul sec, accompagné par Luka, seul le flic de Shanghai a l'air d'être épargné. Michel, vexé de ne faire que gagner boit lui aussi au goulot. Je vois légèrement trouble, les rires sont plus fort et intenses, Goya toujours en train de ronfler. Les gens qui dorment à côté frappent à la cloison, on ne s'en rend compte qu'au bout d'un certain moment, s'en suit le son d'une voix menaçante s'exprimant en je ne sais quelle langue.

On prend peur et on décide de continuer dans ma chambre et celle de Fabien. En s'y rendant, on se cogne aux cloisons, les cloisons nous répondent. 

On continue la partie. Encore une pour moi. La suivante est pour Michel et Gaëtan. On commence à ne plus faire attention à rien, on fait du bruit et c'est le vrai bordel, Fabien a l'air de flancher un peu, encore un coup sur la cloison et des réprimandes, Gaëtan entend des pas lourds dans le couloir et balance les bouteilles sous le lit.

Mme Goya rentre, c'était moins une, heureusement que ses pas pèsent.

La vision de l'horreur nous remet quelque peu les idées au clair, elle se tiens sur le pas de la porte en robe de chambre, toute dégoulinante, et nous crie mesurément dessus comme une hystérique qui aurait perdu la voix, nos trois compères sont renvoyés dans leur chambre et puis elle claque la porte avant de repartir ronfler.

On s'efforce de dormir mais on a la bougeotte, Fabien n'arrête pas de parler. Le temps passe et je retape doucement à la cloison, les autres derrière répondent et se repointent dans notre chambre. On reprend la partie. Quelques manches endiablées encore et puis on jette les cartes, l'alcool coule à flot et Fabien décapsule le Whisky pur avant de s'en prendre une bonne limpée. Il s'étale ivre mort sur le lit et on explose tous de rire. Les coups sur les murs reviennent, personne en tiens compte, on fout Fabien à poil, on lui dessine des bites sur le front et lui enfonce des curly dans le nez, il ne réagi pas, défoncé jusqu'à la moelle. 

C'est alors que Chloé notre déléguée de classe fait interruption dans notre chambre. Elle voit Fabien et la bouteille de whisky, elle nous voit nous, et elle s'en va en courant.

On panique. Gaëtan et Luka se réfugient dans leurs chambres, Michel et moi on prend les bouteilles et on file dans le couloir pour effacer les preuves. Au bout du couloir une porte. Derrière, une cage d'escalier. On prend les escaliers à la recherche d'une poubelle. On descend en courant. Une fois en bas, on franchit une issue de secours et on se retrouve en dehors de l'hôtel, on est en slip et ça caille. On trouve non loin de là un conteneur, on jette les bouteilles. Gros ouf de soulagement. On se tape dans la main et on rebrousse chemin. 


La porte de l'issue de secours par laquelle on était sortis s'était refermée de l'intérieur. 


Là, on était dans la merde.


Mme Goya et Mme Biraben en renfort sont venues nous récupérer.


S'en est suivi alors l'une des plus longues nuits de ma vie.


Elles n'ont posé aucunes questions. Mme Goya nous a fait asseoir moi et Michel au au beau milieu du couloir où se tenaient nos chambres puis Mme Biraben est parti.

Mme Goya s'est assise en face de moi et n'a pas arrêté de me fixer. J'essayais de la fixer moi aussi mais l'alcool encore présent dans mes veines rendait cette tâche difficile.

Le temps paraissait long. Je voulais m'assoupir mais la forte lumière du couloir m'en empêchait. Quand j'y parvenais, Mme Goya se donnait un malin plaisir à me réveiller en me donnant des coups de pied. Je la trouvais bête et méchante. Je pensais aux autres et surtout à Fabien, qui dormait paisiblement. Je sais pas combien de temps ça a duré. Ce que je sais c'est que quand j'ai ré-ouvert les yeux, c'était elle qui les avaient fermés. J'ai hésité à lui donner moi aussi des coups de pieds, mais j'étais suffisamment dans la merde comme ça.


Le lendemain moi et Michel, on est restés avec le chauffeur de bus pendant que les autres profitaient de la dernière journée au parc, on étaient punis, et ce fut là encore une longue pénitence. Dans la journée, ils ont retrouvés les bouteilles dans le conteneur, mais personne encore ne nous posait la moindre question.

On a pris le chemin du retour en fin d'après midi, Michel à côté de Mme Biraben et moi à côté de Mme Goya. Ce fut le trajet scolaire le plus paisible que j'ai pu voir. Il avait quelque chose de spécial ce trajet, parce que je me sentais dans la peau d'un fugitif qu'on venait d'arrêter, comme l'impression qu'on me conduisait au bûcher, que chaque kilomètres que ce foutu bus avalait me rapprochait toujours un petit peu plus de mon bourreau. Et pourtant, je me sentais léger, si léger que la simple vue du soleil qui se rosait peu à peu en attendant son coucher venait à m'émouvoir. J'aimais cette sensation. Je le trouvais beau le soleil, presque aussi beau que la lune.

On s'est arrêtés pique niquer sur une aire d'autoroute. Michel et moi avons eu le droit de se mélanger aux autres. On est parti parler à Fabien et les autres, on a juré de ne pas les dénoncer. 

À côté de nous mangeait une classe d'Espagnols d'à peu près notre âge, eux aussi sur le chemin du retour. Une jolie petite brune m'a souris. Je me suis alors dit que l'espoir était partout. Je lui ai envoyé un besos volant. Elle l'a réceptionné de ses petites mains et elle est partie avec la nuit.

Ma mère est venue me récupérer à notre arrivée. Personne ne lui dit mot sur ce qu'il s'était passé. On était Vendredi. Je n'ai dit un seul mot concernant le voyage durant tout le week-end, mis à part quelques banalités.


Le lundi matin, je suis parti au collège la boule au ventre. À 8h, on étaient tous les cinq convoqués par le directeur, moi et Michel, mais aussi Fabien, Luka et Gaëtan, que Chloé la déléguée de classe avait dénoncé.

Le directeur était un type imposant aux airs de capitaine Haddock. Il nous a sérré la main en la broyant comme il avait coutume de le faire quand il était profondément en colère, puis nous a gueulé dessus avec les commodités d'usage. Il finit par nous dire qu'il réfléchirait pendant la journée à la sanction qu'il allait nous infliger et que nous le saurons en fin de journée, dans son bureau, en présence de nos parents.

Je baissais la tête et le saluait avant de partir.

En réalité, sa sanction en tant qu'elle, je m'en foutais éperdument. C'était la réaction de mes parents qui m'inquiétai.

Je passais la journée dans un état latent, sans me poser trop de questions, je me demandais bien à quoi pensaient les condamnés dans le couloir de la mort.

L'heure du jugement arriva. 

On se rendit donc au bureau du directeur, les parents étaient déjà là. Sauf les miens. Ils n'avaient pas pu se libérer. Ils disaient toujours qu'ils en avaient plein le cul de se faire convoquer pour un oui pour un non et qu'ils n'avaient pas le temps des fonctionnaires.

J'étais tout d'un coup soulagé.

Les autres faisaient grise mine. Je décidais donc d'en faire autant.

Le discours du directeur a commencé, les gars baissaient la tête, les parents leurs jetaient des regards à faire trembler les entrailles du vieux monde, on aurait dit qu'on nous accusait de viol ou génocide, toute une mascarade, je souriais de l'intérieur. L'allocution a bien durée dix bonnes minutes et la sanction est tombée: trois jours d'exclusion. Les visages se décomposaient, le beau père de Gaëtan bouillonnait en lui, la mère de Michel, petite femme au regard bleu, restait digne, et puis la mère de Fabien s'est mise a pleurer toutes les larmes de son corps et il m'a fallu à ce moment là énormément de maîtrise pour que je m'empêche à moi même de ne pas éclater de rire.

Tout le monde est sorti du bureau.

J'ai vu Gaëtan se prendre une droite par son beau père : "Alors comme ça t'aimes ça, le jaune!". Sans doute faisait il allusion à mon Ricard, peut-être était ce un jeu de mot en étroit rapport avec les origines de ce pauvre Gaëtan, ce qui était sûr, c'était que son beau père était un sombre connard.

Je suis rentré avec le bus scolaire.

Je suis arrivé chez moi, ma mère m'attendais, elle avait le regard noir. Ma mère était nerveuse et s'emportait facilement, néanmoins, elle m'impressionnais peu, et quand il s'agissait d'un sujet grave, c'est mon père qui gérait la situation. Mon père était tout le contraire. Il était calme. Comme un volcan.

Elle me dis qu'il m'attendais dans le salon.

Mon père parlait peu, sa carrure et son visage imposant suffisait à imposer le respect, il avait des traits durs et tragiques. Quand il était énervé, toute la tension émanant de son corps venait écraser l'air de la pièce pour se répandre du sol au plafond. Je sentais cette tension. Il m'a regardé d'un air dépité. On s'est regardés un long moment, ça m'a paru un supplice, je m'attendais à morfler, il était muet et inquiétant, et ça n'en finissais pas, j'avais de plus en plus de mal a soutenir le regard, j'étais prêt a craquer, je t'en supplie, dis quelque chose, achève moi! 



" C'EST LA PREMIÈRE...



ET DERNIÈRE FOIS...



...


...


QUE TU ME VOLES UNE BOUTEILLE DE RICARD.



Allez, dégage."


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