sur le quai

loinducoeur

Tu ne peux pas comprendre. Tu cherches, tu échafaudes des hypothèses et puis tu abandonnes. Tu ne vois rien...

Il était pourtant parti le cœur léger ce matin là. En arrivant à la gare, il n'avait d'ailleurs pas souvenir de son parcours dans les rues qu'il connaissait si bien. Il était déjà ailleurs. Il avait hâte d'arriver à son rendez-vous. Ils avaient choisi un vendredi parce que c'était plus facile pour s'évader du bureau quelques heures. Ils auraient du temps. Il était pressé alors qu'il savait par cœur les horaires.

Le train de 8h06 entre en gare à la voie 4.

Curieux comme il y avait du monde ce matin. Ou peut-être que d'habitude il ne prenait pas ce train là. Il était un peu serré par les autres voyageurs, mais il pouvait tout de même scruter son téléphone portable au cas où. Il n'avait pas attendu sa réponse. Il était parti confiant. C'était une bonne journée !

Vous descendez monsieur ?

Non. Excusez-moi. Bien sûr que non. Il ne voulait surtout pas perdre de temps ce matin. Il arriverait sans doute en avance au café du square Brassens. Pas grave. C'était un café parisien où il était fréquent qu'un homme attende une femme, ou qu'une femme attende un homme. L'endroit lui rappelait "A bout de souffle"; il n'aurait pas su dire pourquoi. Question d'ambiance peut-être.

Vibration.

Juste au moment où il avait rangé son portable dans sa poche de manteau. Evidemment ! Un message, sa réponse.

Pas évident. Je te rappelle.

Manque d'air. Agoraphobie. Il fallait qu'il sorte de là. Il ne tiendrait pas le coup. Son estomac se vrillait en lui. Vite. Il ne comprenait pas. Qu'était-il arrivé ? Laissez-moi passer s'il vous plait. Il n'entendait plus les gens autour de lui. Il leur semblait bizarre tout à coup. Leurs regards étaient affolés.

Dehors. Il s'était rué hors de ce train surpeuplé et inamical pour atterrir dans cette station qu'il ne fréquentait pas. Une maigre rangée de sièges en plastique sur laquelle il s'était effondré. Il respirait bouche grande ouverte, un air plus frais. Et puis soudain, les larmes. Les larmes qui ruissellent en abondance. Les larmes que ses mains ne peuvent retenir lorsqu'il les porte à son visage. Les larmes qu'il ne peut arrêter.

Il reste là, prostré, consterné, un long moment. Il ne sait pas combien de trains sont passés devant lui. Il ne veut pas savoir. Une faille temporelle qui lui semble immense le sépare désormais de son rendez-vous. Il sent qu'il ne la comblera pas. Des gens apparaissent puis disparaissent de cette gare inconnue, et ce ballet lui semble sinistre. Il n'est plus pressé.

Tout est fini.

Sur le quai.



  • J'ai eu un peu de mal avec le début, je ne saurais pas dire pourquoi. Mais après le premier paragraphe, ça m'a passé et je me suis laissé emmené par l'histoire qui est vachement sympathique! J'aime bien les côtés mystérieux, c'est juste une petite fenêtre dans une vie!

    · Il y a plus de 10 ans ·
    318986 10151296736193829 1321128920 n

    jasy-santo

    • Oui... c'est vrai que j'aurai dû mieux travailler le début... hâte de passer à la suite peut-être ?... merci pour la réflexion

      · Il y a plus de 10 ans ·
      Dancing renoir

      loinducoeur

    • c'est toujours difficile de commencer, surtout quand la suite est plus prenante!

      · Il y a plus de 10 ans ·
      318986 10151296736193829 1321128920 n

      jasy-santo

Signaler ce texte