Sur les chansons d'Elliott Smith

rechab

On a cru longtemps à une floraison lente,
dans une gueule de papier mâché,
d'où s'échappait une mélodie triste.
Quelques accords de guitare,
peu propices à ce qu'on esquisse
des pas de danse sur la piste .
( ou bien ce seraient de ceux
que lancent une poupée mécanique,
au ciel de mousseline ) ;
le soleil ayant perdu l'éclat,
des paillettes,
que je voyais luire en tes yeux,
comme des grains de mica .

S'il y a des soirées taciturnes,
qui flottent à ras de bitume ,
j'ai regardé dans le vide,
en me demandant ce que j'étais venu faire ,
dans cette salle à peu près déserte,
où seules, quelques personnes
occupaient une demi-douzaine de chaises .
Les chansons d'Elliott Smith
continuaient à me parvenir,
un peu étouffées, à travers un temps,
qui suait la désillusion des heures anciennes .
J'y reconnaissais toutefois
quelques couplets que j'avais fredonnés.

Je t'ai revue alors , aérienne,
évoluant sur le parquet ,
dans une robe légère,
la finesse de tes jambes
soulignées par la couture serpentine,
de tes bas nylon ,
semblant dotées d'une vie autonome....
le corps rejeté en arrière,
les bras en cercle,
et la lumière du crépuscule
tombant de la fenêtre,
- tu aurais pu servir de modèle
pour une peinture de Degas... -

Evidemment, c'est une image,
qui tangue sur les souvenirs...
( ce n'était d'ailleurs pas la même musique,
mais celle de Neill Young ,
L'atmosphère était semblable,
quoique plus optimiste ) .
Il y avait cette odeur de thé à la cannelle ,
la moiteur de couplets murmurés,
comme s'ils ne s'adressaient qu'à nous.
Nous avons cru à cette floraison
où les notes s'accompagnaient d'un sourire.
C'était bien avant
que la valse des années nous sépare...

-
RC