Sweetling

nelopee

"And so what if, at the end of this story, with a ring on my finger and a castle to boot, you find out that my prince is prince of nothing but darkness?" (Jeannine Hall Gailey)

La jeune fille se croyait en sécurité, tel un petit oiseau enfermé dans sa cage dorée. Elle observait le monde de l'extérieur, sans jamais être touchée. Il était entièrement obscurci par les barreaux invisibles qu'elle avait construit elle-même pour s'empêcher de s'envoler.  

La liberté était égale au pire des dangers, et elle ne voulait pas y goûter. Elle préférait s'immerger dans l'illusion des beaux contes qu'on lui racontait, s'imaginant à son tour être l'héroïne inatteignable de sa propre histoire.

Mais ce qu'elle ne savait pas c'est que peu importe à quel point on essaye d'y échapper, la vie ne fait aucune exception et égratigne tout le monde. La réalité bien plus laide finit toujours par nous rattraper.

Ce fut lui qui avait tout déclenché indirectement sans même qu'elle le sache. Lui qui était à la source de tous les malheurs qui lui étaient arrivés. La perte de sa famille, la tombée dans la déchéance, la captivité...

Cependant, il l'avait aussi paradoxalement sauvée. Il l'avait fait grandir, lui avait permis de s'échapper d'une emprise symbolique peut-être encore plus malsaine qu'elle le croyait. Il l'avait considérée comme une personne à part entière, il l'avait rendue beaucoup plus forte et fait devenir une vraie femme. 

Il la voulait depuis la première fois qu'il avait posé son regard sur elle. Et le désir de cet homme avait la puissance de ceux qui balayait tout sur leur passage. Ce qu'il souhaitait, il l'obtenait ; et cela avait marché avec elle.

Tout avait commencé progressivement. Une caresse dans le bon sens, une main glissée dans l'ouverture de son refuge - sa prison -, cette même main qui avait fini par l'agripper et la tirer de là de force pour l'emmener loin.

Elle n'était pas idiote, elle avait seulement gardée sa naïveté d'enfant. Pour un temps. Il semblait à présent qu'elle lui a été vite enlevée avec son innocence. 

Auparavant, elle préférait voir le bien dans une personne avant le mal potentiel. L'espoir ne la quittait jamais, comme un fil qui la maintenait en vie. Les mensonges, la corruption, la malignité la rendait malade. 

C'était tout ce qui le composait, tout ce dont il était fait. Elle ne pouvait le nier. Elle aurait du être dégoûtée, fuir dès qu'elle en avait eu l'occasion. Mais elle était restée à ses côtés. C'était facile, elle n'avait nul part d'autre où aller. 

Et auprès de lui elle cherchait, cherchait, cherchait... elle ne savait pas précisément quoi. Ce qu'il voulait absolument masquer, sa réelle personnalité... ou bien tout simplement elle-même ?

Ses anciens idéaux s'étaient effondrés un à un. Elle avait été attirée par la noirceur qui l'entourait, elle qui auparavant s'en protégeait. La contradiction lui déchirait les entrailles. A la manière d'un kyste qui se développe lentement sous la chair, elle avait été contaminée par ces maux. 

Lorsqu'il plongeait l'intensité de ses yeux gris-verts dans les siens, sa conscience qui lui criait que cet homme était mauvais se taisait. Lorsqu'il la touchait, mécaniquement son épiderme répondait. Elle n'était toujours pas libre mais elle ressentait quelque chose, elle existait, enfin. 

Ses pensées jamais elle ne pouvait les lire, mais elle pouvait les anticiper. Elle était persuadée que jamais il ne pourrait lui faire physiquement du mal. Elle savait déjà que son âme était souillée et que sa chance de rédemption était minime. La sienne empruntait le même chemin. 

Elle n'en avait que faire. Au fond, elle aimait ça ; et elle l'aimait, lui. D'une façon totalement déviante, mais elle l'aimait à la folie. 

C'était le Dieu des enfers, et il l'avait couronnée comme sa reine. 
Elle savait ce qu'elle faisait.
Elle était préparée pour une longue danse avec la mort.

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