Touche à Touche Part 7

Mini Pouce

Ce moment avec lui avait été magique, je me demande comment il avait compris mon envie, juste m’évader complètement pendant quelques heures. Ou peut-être étais-je simplement tombée au bon moment mais la réponse n’est pas importante, j’avais pris ce moment comme un bol d’air pur et je m’étais ressourcée auprès de lui, cet escapade dans son monde m’avait permis d’affronter la semaine avec plus de sérénité qu’auparavant, quand je me sentais étouffé je n’avais qu’à entendre les instruments et leur symphonie, résonner dans ma tête. Le voir était presque devenue vitale en réalité, et cette constatation devenait plus déroutante que prévu. Ce que j’aimais ne se limitait pas seulement aux moments passés avec lui, mais il y avait aussi toute sa personnalité, son charisme et surtout son sourire.

Il a cette manière de rire en montrant toutes ses dents et pourtant il ne rigole jamais aux éclats, on dirait qu’il n’ose pas, c’est particulier et attendrissant en même temps. Son visage n’est pas tellement marqué par le temps, juste au niveau des yeux et des joues, comme si justement il avait passé sa vie à rire, c’est d’ailleurs souvent ses étranges grimaces qui me font sourire plutôt que ces blagues qui tombent souvent à l’eau. Au travers de ses vêtements j’ai pu sentir un corps fort et imposant, ma tête sur son torse je sentais tous ses muscles qui se dessinaient. Mais il y a quelques choses d’encore plus exceptionnel, ses yeux bleus clairs sont si expressifs qu’il n’aurait pas besoin de dire un seul mot pour être compris, je crois que c’est ça que j’aime le plus chez lui, se sont ses yeux.

Je profitais de ces rêveries pour me sortir de mon quotidien bien trop pesant. La situation entre mon mari et moi n’avait fait que se dégrader au fil des jours, et ça depuis l’instant passé avec Jimmy. En réalité tout était prétexte pour s’engueuler, nous ne partagions plus aucun moment d’intimité. Je me rendais compte que je n’avais jamais été réellement amoureuse de lui, notre passé était sans embuche mais sans amour. J’en arrivais à cette conclusion sans trop de difficulté, comme si elle avait été évidente depuis toujours. En fait à l’époque quand nous nous sommes rencontrés nous savions dès le début que ce n’était pas le grand amour, mais nous étions bien ensemble, dans une relation stable qui avait le mérite d’être rassurante. Nous avions tous les deux souffert d’un passé difficile et de mauvaises rencontres qui finalement nous ont rapprochés, je me sentais protégée et surtout à l’abri de tout imprévu qui aurait pu me faire souffrir. Nous avons construit notre vie sur ce constat simple : à défaut du grand amour nous aurons la stabilité.

Est-ce qu’on peut être heureux avec ça, je n’en suis plus certaine aujourd’hui, seulement tout a fonctionné très bien pendant plusieurs années, nous avons fait en sorte de ne jamais nous ennuyer et de faire en sorte que chaque jour soit heureux.. Aujourd’hui je sentais l’excitation qui m’empoignait au contact de Jimmy et la lassitude qui m’envahissait lorsque je rentrais chez moi.

Ma leçon hebdomadaire arrivait enfin, sauf que cette semaine avait été une véritable torture, je ne me sentais plus à ma place nulle part et j’avais peur d’être la cause d’un mal être dans ma famille.  Il m’attendait comme à son habitude assis dans son fauteuil, accompagné d’une revue sur les genoux dont il tournait les pages, je ne sais pas trop s’il lisait quelques choses ou s’il n’observait que les images. Je suis rentrée et j’ai déposé ma veste sur l’accoudoir d’un fauteuil, c’est alors qu’il leva les yeux vers moi comme s’il me découvrait ma présence. Il me dévisagea avec beaucoup de tendresse, du début de mes hanches son regard couvrait l’intégralité de mon corps jusqu’à mes yeux. Si lui ne devait pas trouver cette situation gênante elle l’était en tout cas pour moi. Il déposa en douceur sa revue sur le côté et se leva pour venir en ma direction. Il m’empoigna fermement par la taille, sans lâcher mon regard il me fit basculer sur le banc du piano qui était juste derrière moi. C’est ce moment qu’il choisit pour m’embrasser, mon visage était au creux de sa main, j’y étais bien.

A aucun moment je n’ai voulu l’empêcher, à aucun moment je n’ai seulement cherché à m’évader. Je crois que j’attendais seulement qu’il se décide à le faire depuis tout ce temps..

-          C’est maintenant que tu décides de fuir ou de rester. 

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