Trahisons

patrizia

trahisons

‘je te quitte’.

Il n’avait dit que ces mots au téléphone puis il avait raccroché. Une année de notre vie venait d’être jetée comme ça, sans explication. Je l’avais appelé plusieurs fois, sans réponse, j’avais laissé plusieurs messages vocaux, sans réponse, le silence.

J’étais allée chez lui, personne.

J’ai appelé pendant une semaine, je restais des heures devant sa porte. Ses amis, ses collègues ne savaient rien ; je ne connaissais pas sa famille qui vivait loin d’ici.

Parti, volatilisé.

Les semaines passèrent, les mois, aucune nouvelle ne me parvint de sa part.

La société pour laquelle je travaillais venait d’être rachetée, j’ai donc été mutée à l’étranger ; je démarrais un nouveau chapitre de ma vie.

Nous attendions un important client lors de la réunion trimestrielle ; tout devait être au point, nous n’avions pas droit à l’erreur ;

Après plusieurs heures de négociation, nous avons remporté le contrat.

Notre société se portait à merveille,les affaires allaient bon train et je ne ménageais pas mes efforts, les acheteurs augmentaient de jour en jour.

Cet après-midi là, un couple venait visiter une maison ; nous nous étions donnés rendez-vous à l’adresse de la demeure.

Je l’ai reconnu tout de suite et je suis persuadée qu’il en fut de même pour lui ; seulement, il ne laissait rien paraître. Les mois avaient passé mais tout était encore très frais dans ma mémoire.

Ils n’étaient pas intéressés, nous nous séparâmes sans conclure la vente.

Je suivis leur voiture ; je savais désormais où le trouver.

Je passais quelques jours à me familiariser avec leur rythme de vie ; à priori, sa femme ne travaillait pas, il partait assez tôt et rentrait assez tard ; le week-end, ils ne sortaient pas.

Après quelques mois, j’avais un planning assez précis de leurs habitudes quotidiennes ; en dilettante, j’étais aussi détective pour mon plaisir.

Je provoquai le contact, je m’étais garée dans la même rue que lui et je marchai à quelques mètres derrrière, sur le même trottoir ; il rentrait dans une boutique, je rentrais dans la boutique ; au détour d’une allée, nous nous croisâmes, nos regards aussi ; puis il continua son chemin ; je l’appelai mais il ne répondait pas : alors je l’attrapai par le bras : ‘tu pourrais au moins me dire bonjour’, sa réponse fut : ‘vous êtes la femme qui nous a fait visiter la maison ? pourquoi me tutoyez-vous, je ne vous connais pas ?’ n’y tenant plus, je lui crachai au visage toute la rancune que j’avais ; mais il soutenait ne pas me connaître et me dit que je le confondais avec un autre homme ; j’insistai, lui remémorai cette année passée, il se mit en colère et me demandait de le laisser tranquille.

Je ne pouvais pas en rester là.

J’ai longuement réfléchi avant de le faire mais j’étais révoltée par le mal qu’il me faisait ; non seulement il m’avait quitté sans explication et lors de la confrontation,il niait me connaître ; je voulais qu’il souffre aussi.

Je sonnai à la porte d’entrée ; à cette heure, elle devait être seule ;

Ce fut bien entendu surprenant pour elle de me voir ; elle se souvenait de notre rencontre immobilière.

Autour d’une tasse de café, je la mis au courant de toute l’histoire ; la liaison, l’abandon, le mensonge.

‘voulez-vous quelques gâteaux avec votre café ? je vais en chercher à la cuisine’ ; je venais de lui dire qu’elle avait été trompée par son mari et elle me proposait des gâteaux !

Je sentis un objet froid entre les omoplates, sa voix était glaciale,  haineuse : ‘je sais très bien qui vous êtes : une de ces vulgaires poules comme mon mari affectionne ; une parmi tant d’autres ; il n’a fait que ça pendant toutes ces années de mariage ; ça m’a coûté une fortune de le faire suivre mais il a payé’.

J’étais abasourdie, pétrifiée de terreur, je pensais rendre une femme malheureuse par ma révélation et je me retrouvais menacée de mort.

Je fus baîllonnée, ligotée, mise dans un placard, dans le noir. 

Les minutes passaient,  je l’entendais s’affairer dans l’appartement, la musique atténuaient les bruits.

Je ne sais quelle heure il était lorsque la porte du placard s’ouvrit.

Ils me regardent tous les deux, il s’approche de moi et enlève le scotch collé contre ma bouche : ‘fais attention Dimitri, elle a un révolver, elle sait tout’ lui criai-je.

‘écoutez, il y a un malentendu, je ne suis pas Dimitri, vous vous trompez ; et pourquoi êtes-vous venu la menacer avec une arme ?’.

Je ne comprenais pas ce qu’il se passait, j’avais très peur, la situation était compliquée, chacun semblait tromper l’autre.

Il continue : ‘je vais appeler la police, nous devons porter plainte contre vous ; vous l’avez quand même braquée avec une arme !’.

‘mais je n’ai menacé personne ! c’est elle qui a pointé ce révolver sur moi, c’est elle qui m’a enfermé dans ce placard, elle ! vous êtes fous tous les deux ! à quoi vous jouez ! laissez-moi partir !’.

Il me fit sortir du placard, m’emmena dans le salon et me montra un album : là, je vis des photos d’enfants .

‘dimitri est mon frère jumeau, il a toujours été un dragueur invétéré et son mariage n’a rien changé, il s’est marié avec la femme que j’aime et que je devais épouser’ et, en disant cela, il lui prit la main.

‘il avait la bougeotte et il est parti à l’étranger ; je ne sais pas ce qu’il vous a promis et je m’en fiche, mais s’il y a une victime ici, c’est elle’.

Je me suis effrondrée, en larmes, par terre : ‘il m’a appelé, il m’a dit qu’il me quittait, sans explication, comme ça ; il ne m’a jamais dit qu’il avait un frère jumeau’.

‘vous n’êtes sûrement  pas la première à qui il a fait ça’.

‘où est-il ?’.

‘je ne sais pas ; il a dû changer encore de pays, recommencer’ .

Elle ne disait rien, je la regardais : ‘mais vous êtes toujours mariée ?’.

‘on s’en fiche de ça, il est parti et s’il revient un jour, il l’aura perdu, il lui a fait trop de mal ; nous nous aimons et ça ne changera pas, qu’il soit là ou non’.

‘mais c’est votre frère !’.

‘c’était !’ c’est elle qui avait prononcé ces mots : ‘j’avais retrouvé sa trace en France, je savais qu’il voyait encore une autre femme et c’en était trop ; alors, je l’ai suivi, je lui ai dit que s’il n’arrêtait pas tout de suite avec vous, je ferais en sorte qu’il soit renvoyé de la société de mon père ; il était devenu PDG grâce à nous, alors, il vous a appelé et vous a dit qu’il vous quittait, … il n’aurait pas dû ajouter qu’il restait uniquement pour l’argent et que son cœur vous appartenait…’.

Son regard sur moi est plein de haine: ‘alors je l’ai tué ! avec ce révolver !’

En un bond, il attrape le révolver et lui tire une balle en pleine tête et une autre en plein cœur, puis, il se met le canon dans la bouche…

J’ai failli me retrouver en prison pour double meurtre mais mon avocat a pu démontrer à la cour que j’étais innocente.

  • Des jumeaux... Passion, haine, ça flingue de partout, on fourre les dames dans des placards...
    Vous peignez des gens tout simples, au fond! J'aime bien.

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Oiseau... 300

    astrov

  • Des jumeaux... Passion, haine, ça flingue de partout, on fourre les dames dans des placards...
    Vous peignez des gens tout simples, au fond! J'aime bien.

    · Il y a plus de 10 ans ·
    Oiseau... 300

    astrov

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