Un amour d'enfance

oreline

Un amour d’enfance

1

Année 2028. Afrique. Kenya.

Mes bottes sont dans un sale état. La boue qui les recouvre ne cache pas l’usure de celles-ci. J’espère qu’à mon arrivée, j’aurais droit à une nouvelle paire. Bien entendu, cela n’est pas le plus important. Penser à mes chaussures me permet d’éviter de ressasser ce qui vient de se passer.

Je lève mon regard. Deux personnes me font face. Nous sommes tous dans le même état. Sales, épuisés, amochés, les vêtements déchirés. Nous sommes malheureusement les seuls survivants de notre section. Nous avons tous perdus des êtres qui nous sont chers. Mais nous connaissions les risques, et puis nous avons l’habitude. Ce n’est pas la première fois que nous perdons quelqu’un.

Nous sommes à l’arrière d’une camionnette. La route étant cahoteuse, nous devons nous cramponner à notre siège. Nous sommes amenés à la section F. Quand je l’ai su, une demi-heure plus tôt, j’ai été rassurée. La section F est la plus puissante des sections existantes. La réputation du chef de cette section le précède. Celui qui se fait appeler le Général Rob est un dirigeant très autoritaire mais également l’homme le plus courageux que je connaisse. Partout, on raconte ses exploits. Deux années plus tôt, en cherchant à récupérer des membres de sa section, il était tombé dans un guet-apens. Encerclés par nos ennemis, il en aurait tué une dizaine à mains nues avant de s’enfuir.

Bien entendu, je ne connais pas ce Général Rob personnellement. Mais, j’ai hâte de travailler pour lui. Je serais si fière s’il pouvait un jour poser son regard sur moi et me dire simplement : « Vous avez fait du bon travail ».

On le dit plutôt beau, malgré la cicatrice qui lui barre le front. Presque la quarantaine. Athlétique. La peau tannée par le soleil. Brun, mais les tempes un peu grisonnantes. Tous ceux qui l’ont rencontré me disent la même chose : son regard sombre vous pénètre jusqu’à l’âme. J’ai connu quelqu’un comme ça il y a longtemps… Avant toutes ces catastrophes…

Tout a commencé il y a une dizaine d’années. Le monde n’allait pas trop mal, malgré quelques guerres. On entendait beaucoup parler de la crise économique, mais on vivait avec. Bien que j’avais un peu plus de vingt ans à cette époque, je vivais toujours chez mes parents, à Paris. Je voulais travailler dans le marketing. Malgré mon diplôme en poche, j’enchaînais les stages. A côté, j’arrondissais les fins de mois en aidant mon père. Il était chauffeur de taxi. Lorsqu’il était trop fatigué, je prenais sa relève. Bien entendu, cela n’était pas très légal. Mais les clients ne se rendaient compte de rien. Je connaissais Paris comme ma poche et, sans me vanter, je conduisais plutôt bien. J’avais même parfois droit à quelques pourboires. La vie que je menais aurait pu durer longtemps ainsi. Mais les Renaisseurs en avaient voulu autrement. A la base, il s’agissait d’une petite secte. Personne ne les prenait au sérieux. Ils avaient l’ambition de régénérer la Terre, c'est-à-dire de tuer les neuf dixièmes de la population afin qu’il ne reste qu’eux pour faire une planète à leur image. Lorsque nous les voyions à la télévision, mes amis et moi les traitions de dégénérés. Ils ne faisaient rien de mal à part inciter les gens à venir les rejoindre. Jusqu’au jour où ils firent exploser les réacteurs nucléaires du monde entier, un peu plus de quatre cent au total. La secte avait réussi à enrôler de nombreux techniciens de centrales nucléaires. Tout avait été donc très simple à mettre en place.

Suite à cette catastrophe planétaire, la France, l’Europe même avaient été détruits. Trop de réacteurs nucléaires…

Mes parents en sont morts. Ma famille, mes amis aussi… Tous… Moi, j’avais eu la chance d’être en vacances en Afrique à ce moment-là. Je me souviens encore de la discussion que j’avais eue avec mon père quelques semaines avant la catastrophe. J’étais rentrée ce soir-là à vingt deux heures, complètement épuisée.

– Nous étions inquiets, ma chérie ! Pourquoi rentres-tu si tard ?

– Je suis désolé papa. J’avais un travail très important à finir. Ma responsable ne voulait pas que je parte avant d’avoir terminé…

– Mais ce n’est qu’un stage ma fille… Ils ne peuvent pas se servir de toi de cette façon ! C’est inadmissible ! Depuis combien de temps tu n’as pas pris un jour de vacances, dis moi ? Ecoute… Ta mère et moi allons t’offrir une semaine de vacances au soleil… Quitte ce stage… J’ai quelques bonnes relations… Je vais essayer de te trouver un poste… rémunéré cette fois… Ainsi, quand tu reviendras, tu n’auras plus à t’inquiéter de rien…

Malgré mes remords à l’idée de jeter l’éponge, l’idée de vacances au soleil me tenta tellement que j’acceptai sans trop rechigner.

J’étais donc en Afrique lorsque la catastrophe se produisit. Etats-Unis, Europe, Japon furent les endroits les plus touchés. Bien entendu, je n’ai pas pu retourner en France. Il n’y avait plus rien. Tout avait été détruit. De plus, la radioactivité était trop importante pour y rester seulement cinq minutes.

Suite à ce bouleversement, l’hôtel dans lequel j’étais hébergé avait accepté de garder l’ensemble des touristes. La majorité de ces gens était comme moi : personne n’avait plus d’endroit où retourner. Nous étions sans abri et sans attache.

Après cela, nous pensions que le plus dur était passé. Cela ne fut pas le cas. Les membres des Renaisseurs s’attaquèrent aux gens. Ils tuèrent et brûlèrent tout ce qui se trouvait sur leur passage. Une vraie boucherie…

C’est ainsi que se mirent en place les sections. Tous ceux qui voulaient vivre et combattre étaient invités à rejoindre l’une d’elles.

Trois semaines après la catastrophe nucléaire, un serveur de l’hôtel nous indiqua que les Renaisseurs allaient bientôt venir s’occuper de nous. Il voulait nous aider en nous indiquant l’existence d’une section, à quelques kilomètres d’ici. Il pouvait nous y emmener demain matin en camionnette. Mais, c’était aujourd’hui qu’il fallait se décider car il ne reviendrait pas. Certains refusèrent. Je ne fus pas de ceux-là. J’acceptai, heureuse de pouvoir faire quelque chose pour combattre ces hommes qui avaient tués mes parents et saccagés mon pays. Le lendemain, j’entrai dans la section M.

La section M était localisée dans une grotte souterraine. Tout avait été aménagé. Tous les vivres des alentours avaient été rapportés ici. Nous avions même l’eau potable. Au total, nous étions quarante huit. Ce n’était pas le confort mais nous étions contents de pouvoir compter les uns sur les autres. Nous avions tellement perdu en quelques semaines !

Dans cette section, j’étais chargée de conduire. Le chef, Louis, m’avait demandée le premier jour ce que je savais faire. Au départ, je pensais lui parler de mes études de marketing, de mes stages, mais je m’étais rendu compte que, dans cette situation, ce que j’avais appris n’avait aucun intérêt. M’était revenu alors en mémoire mon job d’appoint : chauffeur de taxi. J’avais donc répondu à Louis que je me débrouillais bien dans la conduite. Ainsi, durant les sept ans qui suivirent, je fus l’une des conductrices de la section. Je conduisais des hommes et des femmes chargés de l’approvisionnement, d’autres chargés de poser des pièges, d’autres chargés de passer des messages. Mais ce dont j’étais le plus fier, c’était de conduire le chef lui-même. Il me dit un jour que j’étais la conductrice dont il était le plus sûr. Personne ne parvenait à m’égaler. Pas même les Renaisseurs… Je me suis trouvée une fois en face d’eux. Des hommes, comme vous et moi. Mais ils étaient affublés de tuniques blanches immaculées et ils avaient tous un tatouage sur le front qui représentait la Terre. Ce jour-là, nous étions trois. Je conduisais. Louis était à mes côtés et l’un des meilleurs gars de la section était à l’arrière. Nous étions armés, mais pas aussi bien qu’eux. Je n’avais donc qu’une option : foncer ! Malheureusement, question véhicule, là aussi, nos adversaires étaient mieux équipés. Finalement, après quelques embardés et quelques sueurs froides, j’ai réussi à détourner leur attention. Ils se retrouvèrent alors dans la rivière qui longeait la route. Sans aucune prétention, je pense que c’est mon plus joli coup !

Tout se passait plutôt bien pour moi dans la section M. Certains messagers venaient parfois nous donner quelques nouvelles : la section Z et J n’existent plus. La section C s’est jointe à la section R. La section O a détruit une station des Renaisseurs. La section H a tué une dizaine de Renaisseurs. Bien que toute information soit bonne à prendre, nous attendions tous d’avoir des nouvelles de la section F. Cette section réalisait toujours les plus gros exploits. Le plus gros étant celui d’avoir tué le gourou de la secte des Renaisseurs. C’était il y a six ans. Nous avions cru un instant que la guerre serait finie… Mais un autre avait pris sa place… Depuis ce jour, la section F était devenue légendaire. Tout le monde voulait en faire parti. Certains disaient que c’était trop strict. D’autres disaient que c’étaient comme une base militaire. Des ingénieurs inventaient de nouvelles armes ou de nouveaux moyens de communication. Tout semblait beaucoup plus moderne que chez nous. De plus, ils détenaient un puits de pétrole qui permettait à de nombreuses sections d’être véhiculées.

Dans tout les cas, je vais bientôt savoir à quoi ça ressemble. Car depuis aujourd’hui, la section M n’existe plus. J’ai envie de pleurer. Je regarde à nouveau mes chaussures, pour que Paul et Yvan, les deux autres survivants de la section, ne voient pas les larmes qui se forment au coin de mes yeux. C’est peine perdue.

– Nous les vengerons Gabrielle, nous les vengerons… me dit Paul. Je sais que Laura était ton amie. Mais je pense qu’elle aurait aimé que tu sois forte.

Je relève mon visage, dégoulinant de larmes.

– Pourquoi nous, Paul ? Pourquoi ? Louis devrait être à ma place ! Il est tellement plus fort que moi !

– Ne regrette pas d’être encore là ! Louis aurait justement voulu que tu sois à cette place. Il n’a jamais vu une conductrice comme toi !

Je fais un geste avec ma tête, comme pour dire : « N’importe quoi ! » puis je regarde de nouveau mes chaussures. Je n’ai pas envie de parler.

Nous arrivons pendant la nuit. La camionnette s’arrête et le chauffeur nous fait sortir. Nous descendons un par un. Il fait un peu frais, le ciel noir est parsemé d’étoiles.

Nous sommes près du mont Longonot, volcan éteint depuis environ deux cent ans. Le chauffeur nous fait passer dans une végétation assez dense. Après quelques minutes de marches, nous nous trouvons au pied du mont. Une entrée dans la roche est cachée par quelques arbustes. Après avoir dégagé l’entrée, notre chauffeur nous fait signe d’avancer.

Au début, cela ressemble à une grotte, puis petit à petit, on sent que l’endroit est habité : le sol et les murs sont bétonnés, des ampoules électriques éclairent le passage et des portes réclamant des codes verrouillent les accès.

Après quelques minutes dans ce labyrinthe, nous nous trouvons au milieu d’une salle immense, où au moins deux cent personnes se restaurent. Le brouhaha ambiant diminue à notre arrivée. Nous sommes fixés par des centaines de yeux. L’endroit est magnifique. On aurait dit une salle de château ! Pourtant, même si je suis impressionnée par l’endroit et par tous ces gens, je ne cherche qu’une chose ou plutôt qu’une personne. Où peut être ce Général Rob dont tout le monde parle ?

Un homme se lève au milieu de l’une des tables. Je ne vois pas bien son visage, car la lumière est un peu faible et il est encore un peu trop éloigné. Mais, sa silhouette, sa démarche me font dire que c’est bien lui qui s’approche.

– Ah, voilà nos vaillants rescapés de la section M. Mes amis, levez-vous et applaudissez-les.

Tout le monde se lève et nous applaudit. J’en ai les larmes aux yeux. Je pense à nouveau à ceux qui sont restés derrière nous. Je pense aussi à mon amie Laura, qui aurait tant voulu connaître le chef de la section F.

– Nous allons vous offrir un toit et de quoi vous nourrir. Dès aujourd’hui, vous devenez mes hommes et donc des membres de la section F.

Mon cœur se gonfle de fierté. Je me promets de tout faire pour ne pas le décevoir.

Finalement, il se trouve à un mètre de nous trois. Il serre la main de Paul puis de Yvan. A chaque fois, il garde la main qu’il tient quelques secondes et pose un regard bienveillant sur chacun de mes collègues. Arrive mon tour. Il me serre la main et me regarde. Bien entendu, son regard est tel que l’on me l’a décrit. Toutefois, ce n’est pas ce qui me choque en cet instant.

– Gabrielle ? S’interroge-t-il.

– Robert ?

Nous sommes tous les deux abasourdis. Et comme deux vieux amis, nous nous jetons dans les bras l’un de l’autre. Après nos embrassades, Robert me présente :

– Vous avez probablement été surpris par ma réaction, mais il se trouve que cette ravissante rouquine prénommée Gabrielle est une connaissance de mon enfance. En fait, elle était l’amie de mon petit frère Nathan. Je me souviens qu’elle rougissait tout le temps ! Elle était tout le temps fourrée chez nous à faire les quatre cent coups. Je me rappelle encore du jour où elle est tombée de notre poirier après avoir grimpé au sommet. Elle s’était cassée le poignet !

Tout le monde se met alors à rire. Sauf moi. Encore aujourd’hui, il m’arrive d’avoir mal à ce fichu poignet. Mais je crois que le plus dur est d’admettre qu’il m’a toujours considérée comme l’amie de son frère et non comme une fille à part entière. En fait, je suis tombée amoureuse de lui le premier jour que je l’ai vu. Je passai tout mon temps avec son frère juste pour pouvoir l’approcher, lui. Si je suis montée sur ce poirier, c’était pour pouvoir l’impressionner, pour pouvoir lui montrer que je n’étais plus une gamine. Or, j’avais tout raté. Je m’étais complètement ridiculisée. Toutefois, je préfère qu’il mentionne cette histoire du poirier plutôt que celle des quatorze ans de son frère. J’espère qu’il a oublié… Mais je suis sûre que non… Le dernier regard qu’il me jette avant de se rasseoir me laisse d’ailleurs penser qu’il est justement en train de se remémorer cette splendide journée. Je baisse le regard. Je me sens rougir, comme une adolescente. Je suis sûre qu’il est en train de sourire !

Pendant tout le repas, je reste rivée à mon assiette. Bien que nous ne soyons pas installés à la même table, je sais qu’il peut me voir et moi de même. Ce n’est pas l’envie qui m’en manque, mais je ne veux pas rougir de nouveau.

Savoir qu’il est en vie me remplit de joie. Mais apprendre que c’est lui le chef de la section me pose problème. Car le revoir me prouve combien je l’aime encore. La situation risque d’être compliquée…

2

Année 2012. France. Région parisienne.

C’était l’anniversaire de Nathan. Nous avions le même âge. Moi, j’avais fêté mes quatorze ans quelques mois plus tôt. Je n’avais rien fait de particulier. Simplement, lorsque j’avais soufflé mes bougies, j’avais fait le vœu que Robert, le frère de Nathan, tombe amoureux de moi. Pour le moment, rien n’avait changé. Robert était resté le même. Il me regardait à peine. Cela était peut-être préférable, car son regard me faisait rougir à tous les coups.

Ce jour-là, je décidai de tenter le tout pour le tout. Je venais d’avoir mes premières règles, mon corps devenait plus féminin. Mes seins grossissaient, mes hanches s’élargissaient. Je me sentais désirable. Je me disais que si Robert me voyait nue, il comprendrait que je ne suis plus une enfant. Bien entendu, tout cela allait être assez compliqué à mettre en place mais l’idée était là et personne n’allait me l’enlever de la tête.

J’arrivai chez Nathan, habillée d’une petite robe rouge. Pour l’occasion, je m’étais également maquillée. Nathan me trouva magnifique, ses autres amis aussi.

Après avoir déposé mon cadeau sur une table prévue à cet effet, je rejoignis toute la bande pour jouer à un jeu vidéo. Je n’avais pas trop la tête à ça. Je n’arrêtai pas de penser à ce que je m’apprêtai à faire. J’avais la trouille mais je ne voulais pas reculer, pas maintenant. Et puis, j’étais persuadée que Robert tomberait fou amoureux de moi.

Nathan souffla ses bougies puis ouvrit ses cadeaux. Il fut d’une lenteur exaspérante ! Sur la fin, je l’aidai même à ouvrir ses derniers présents.

Après avoir mangé du gâteau, le groupe s’apprêta à sortir un moment dans le jardin.

– J’ai besoin d’aller aux toilettes, dis-je pour pouvoir m’éclipser. Mais ne vous inquiétez pas, je vous rejoins tout de suite.

Sur ce, je montai l’escalier qui menait à l’étage et, au lieu d’aller aux toilettes, j’ouvris la porte de la chambre de Robert. Pour le moment, il n’était pas là. Je l’avais entendu dire à sa mère tout à l’heure qu’il allait chercher des piles pour son accordeur. Il n’allait pas tarder à revenir… Je n’étais jamais entrée dans sa chambre. Les murs étaient peins en gris. Des posters de groupes de rocks ainsi qu’une mappemonde étaient collés à droite, à gauche. Sur son lit, il y avait sa guitare électrique et par terre son ampli. Sur son bureau, il y avait des partitions et des livres en tout genre.

Je m’assis sur le bord du lit, en l’attendant.

Lorsque j’entendis quelqu’un monter l’escalier, mon cœur se mit à accélérer. Je reconnaissais sa démarche assurée. Je respirai un bon coup et priai en silence.

Il entra dans sa chambre et referma la porte sans me voir. Finalement, il se retourna et se trouva à deux mètres de moi. Je me levai.

– Qu’est ce que tu fais là ? Pourquoi tu ne joues pas dehors avec les autres ? Me demanda-t-il surpris.

Je ne répondis rien. A vrai dire, je ne le regardai pas. Je savais que je ne pourrais pas soutenir son regard.

Je fis glisser les bretelles de ma robe, qui tomba alors à terre. Je me trouvai en slip et en sandale devant lui. Je ne portai pas de soutien gorge.

Comme je ne relevai pas le menton, je ne vis pas son visage. Il avança et releva mon menton avec un doigt. Je me trouvai nez à nez avec lui. Je sentis le rouge me monter aux joues.

– C’est courageux de ta part Gabrielle… Je n’avais jamais compris que je t’intéressais d’une manière ou d’une autre. Quoi qu’il en soit, tu es un peu jeune pour moi… Regarde un peu autour de toi, je suis sûr que tu trouveras un garçon qui te convient, me dit-il en souriant.

Il sortit un tee-shirt de son armoire et me le lança. Il s’agissait d’un tee-shirt blanc où était écrit en noir : « Who’s the boss ? ».

– Mets ça, tu vas attraper froid !

Il sortit de la chambre en attendant que je me rhabille. Morte de honte, je remis ma robe, gardais le tee-shirt et sortis en courant de la maison. Je ne dis au revoir à personne et je coupai complètement les ponts avec Nathan et sa famille.

Cela avait été relativement facile car peu de temps après, mes parents trouvèrent un appartement en location en plein Paris. Je quittai donc la région parisienne et fus inscrite dans une école sur Paris.

Malgré tout, je n’ai jamais réussi à oublier Robert…

3

Année 2028. Afrique. Kenya.

Pendant les trois jours qui suivent notre arrivée dans la base de la section F, je m’efforce d’éviter Robert. Ce n’est pas trop difficile, car il est souvent en réunion ou dans son bureau. Il est même souvent fourré avec une petite brunette, qui semble toujours le dévorer des yeux. En tout cas, ces deux-là ne semblent jamais prendre part aux multiples corvées de nettoyage ou de cuisines.

Je me demande s’il y a des missions en cours, mais, il semblerait que peu de gens soient informés. Contrairement à la section M où tout le monde s’impliquait dans tout, ici, tout est très hiérarchisé. Les personnes les moins qualifiées font le nettoyage, la cuisine. Les autres sont répartis comme à l’armée : les soldats, les sergents, les lieutenants, les capitaines, les commandants, les colonels (au nombre de deux) et pour finir le général, Robert.

Je comprends à présent pourquoi on disait que cette section était très militarisée. Quoi qu’il en soit, je suis extrêmement vexée de n’être qu’une moins que rien dans cette nouvelle section. Mais, qu’est ce que je peux faire ? Mes anciens compagnons, Paul et Yvan ne sont que de simples soldats, et à part Robert, je ne connais personne d’autres !

Malheureusement, tant que j’évite Robert, je ne pourrais jamais lui demander de me donner ma chance. Mais c’est plus fort que moi… Je ne veux pas le croiser…

– Tu es vraiment idiote Gabrielle, me dit Paul deux jours après notre arrivée. Tu connais le général de la section et tu ne lui demandes même pas un poste à la hauteur de ton talent ! En plus, tu pourrais aussi nous aider à obtenir un grade plus élevé, Yvan et moi ! Je ne comprends vraiment pas ce qui ne tourne pas rond chez toi !

Bien entendu, il ne connaît pas toute l’histoire et je n’ai aucune envie de lui raconter. Je lui réponds que je vais le faire, sans lui donner aucun délai.

Je me couche dans le dortoir qui m’a été assigné trois jours plus tôt. Nous sommes vingt à dormir dans la même pièce, sur des matelas, à même le sol. Hommes, femmes, gradés ou non, nous sommes tous mélangés. Les gens ronflent, parlent parfois. Moi, j’ai du mal à dormir et puis j’ai mal au dos. J’ai passé ma journée à nettoyer le sol. Après avoir tourné pendant deux heures dans mon lit, je me décide à me lever. Je vais boire un verre d’eau. Après, on verra.

J’arrive dans les cuisines. Elles sont vides. Je n’allume que la lumière à l’entrée, laissant un peu de pénombre par endroit. J’ouvre une bouteille thermos et me verse un peu d’eau dans un verre. Je bois. Quand je pose mon verre vide, je vois l’ombre de quelqu’un. Il ne me faut pas beaucoup de temps pour me rendre compte qu’il s’agit de Robert.

– Gabrielle ! Cela faisait quelques jours que je ne t’avais pas aperçue… Tu sais, j’ai beaucoup pensé à toi… Surtout à la dernière fois que je t’ai vu… Pour les quatorze ans de mon frère, je crois…

Je me rappelle soudain que je porte en ce moment même le tee-shirt qu’il m’avait donné ce jour-là. J’avais eu mille fois envie de le jeter, mais je ne l’ai jamais fait. Et curieusement, malgré tous les bouleversements que j’ai eu dans ma vie, ce tee-shirt m’a toujours suivi : en vacances en Afrique, dans la section M puis dans la section F… Il est toujours là, et il faut bien sûr que je le porte aujourd’hui ! Honte à moi !

Il s’en rend compte.

– Mais c’est le tee-shirt que je t’ai donné ! dit-il en riant. Toi non plus tu n’as donc pas oublié…

– Arrête de te moquer de moi ! J’ai l’impression d’avoir encore quatorze ans ! Je ne sais pas ce qu’il m’a pris ce jour là ! Je suis désolé, j’aimerais que l’on n’en parle plus…

Il s’avance vers moi. Nous sommes très proches l’un de l’autre. Je sens son souffle sur mon cou. Des frissons parcourent mon corps. Mon cœur se met à battre plus vite.

– Comme tu veux Gabrielle… Mais tu ne peux pas m’enlever les souvenirs et les images que j’en ai…

J’essaie de faire abstraction sur ce qu’il vient de me dire. Je me remémore toutes les victoires que j’ai eues dans ma vie et reprends ainsi un peu d’assurance. Ne pas voir son regard dans la pénombre m’aide également.

– Robert, mes collègues et moi ne méritons pas d’être mis à l’écart des actions que vous menez. Nous voulons participez activement. Monte nous en grade et laisse nous te montrer de quoi nous sommes capables !

Il s’assoit sur un plan de travail et semble réfléchir très sérieusement à la question. Après quelques secondes, il me répond :

– Ta requête me semble assez raisonnable… Mais je ne veux pas qu’on me dise que je fais du favoritisme. Si je te monte en grade et qu’ensuite les gens apprennent que tu as un tee-shirt qui m’appartient, ça risque de créer des jalousies.

J’écarquille grand les yeux, essayant de comprendre ce qu’il attend de moi.

– Tu veux que je te rende ton tee-shirt !?!

Il sourit devant mon incompréhension puis ajoute :

– Oui et maintenant, mon lieutenant.

Je n’arrive pas à y croire. Il veut que je me déshabille à nouveau devant lui ! Sans réfléchir, je lui réponds :

– Ta brunette ne te suffit pas ? Elle est pourtant jolie et toujours collée à tes basques…

Voilà que je me comporte comme si j’étais jalouse !

Il sourit puis me répond :

– J’attends, mon lieutenant…

Finalement, j’enlève le tee-shirt et me trouve pour la deuxième fois de ma vie en slip devant lui. Je lui lance le tee-shirt et m’en vais. Bien entendu, il a probablement eu le temps de m’observer mais il ne dit rien.

Pour retourner dans mon dortoir, je me fais petite comme une souris. J’ai de la chance, je ne croise personne. Une fois dans mon lit, je ressasse ce qu’il vient de se passer. Quel salaud ! Comment a-t-il osé me faire ça ! Je ne comprends ce qu’il recherche ? Veut-il me ridiculiser davantage ? Pourquoi n’a-t-il rien dit au sujet de cette fille ? Peut-être ai-je frappé dans le mille ? Il aime cette fille et moi je ne suis qu’un passe-temps… Je n’arrive absolument pas à le cerner… Quoi qu’il en soit, je suis plutôt contente de moi, je ne me suis pas dégonflée ! Et maintenant, je suis lieutenant.

Le lendemain, la nouvelle est officielle. Paul, Yvan et moi sommes lieutenant. Je suis à présent aux ordres du capitaine Daniel. La quarantaine, peu loquace, Daniel est un homme expérimenté qui connaît parfaitement le terrain. Les premières semaines, il ne fait pas du tout attention à moi. Et puis un jour, il me demande ce que je faisais dans la section M, je lui réponds que j’étais conductrice. Il ne veut pas en savoir plus. Il me lance les clés.

– En avant, lieutenant ! Nous avons un messager à aller chercher !

Je suis ravie que l’on me fasse confiance à nouveau.

Nous montons tous deux en voiture. Je démarre et suis la route que mon capitaine m’indique.

A mi chemin, nous entendons des coups de feux. Daniel sort une mitraillette, qui se trouve à l’arrière du véhicule.

– J’espère que vous ne regrettez pas d’être venue, car il va y avoir de la baston !

Je lui réponds que non, alors que je suis morte de trouille.

Tandis que je conduis sans destination précise, Daniel canarde sur tout ce qui bouge. A priori, des hommes de notre section ont été attrapés par nos ennemis. Ils allaient être emmenés dieu sait où lorsque nous sommes arrivés par hasard dans le coin. Finalement, Daniel, plutôt habile avec une arme, parvient à tuer six hommes. Les trois hommes de notre section qui étaient prisonnier, finissent le travail en achevant les trois autres hommes qui restent debout.

– Capitaine, je suis vraiment impressionnée ! Vous avez réussi à libérer les hommes. Vous êtes doués avec une arme.

Il sourit et me répond :

– Je vous retourne la pareil, lieutenant. Si vous n’aviez pas conduit en évitant les balles, nous ne serions probablement plus là pour en discuter. J’en parlerai au Général, assurément.

Je suis très fière de moi. Mais je n’avais pas spécialement envie de penser au Général Rob !

Finalement, la surprise fut de taille. Non seulement, nous avons évité que des hommes de notre section soient fait prisonnier, mais en plus nous avons récupéré des vivres pour au moins un mois !

Le soir même, je suis déjà félicitée de toute part. Daniel n’a pas lésiné sur les compliments. Je suis un peu gênée. Est-ce que je mérite vraiment tous ces éloges ? Je n’ai fait que mon travail…

Comme d’habitude, je tente d’éviter de croiser Robert. Grâce à lui, j’ai pu montrer de quoi j’étais capable… Mais je n’ai pas le courage de l’affronter.

Ce soir-là, c’est peine perdue. Il vient manger avec tout le monde et se retrouve à la même table que moi. A côté de Daniel, qui, lui se trouve en face de moi.

A mon plus grand désarroi, Daniel passe son temps à lui parler de mes exploits.

– Tu l’aurais vue ! Une vraie cascadeuse ! Je n’avais rien à lui dire. Elle évitait toutes les balles. Il semblerait qu’elle ne soit pas que jolie…

Tous deux me regardent et moi je ne sais pas quoi faire. Répondre ? Pour dire quoi ? « Je vous entends ?!? »

Après un moment qui me parait une éternité, ils changent de sujet de conversation. Pourtant, à chaque fois que je lève la tête de mon assiette, je vois Robert qui me dévisage. Il ne me parle pas, ne me sourit pas, il me regarde simplement. Je baisse alors à nouveau mon regard. Finalement, dès que le dessert est terminé, je sors de table, soulagée.

Je vais dans mon dortoir et n’en sors plus jusqu’au lendemain matin.

Le lendemain, Paul vient m’apprendre que je suis conviée à une réunion. Ravie, je le suis. La salle n’est pas grande et plongée dans le noir, à l’exception du mur d’en face, sur lequel un rétroprojecteur projette des images. Une vingtaine de personnes est déjà installé.

Je reste au fond, afin de ne pas me faire remarquer, notamment par Robert, qui est sur l’estrade. Il présente un plan qui permettrait de prendre possession d’un gisement pétrolier qui appartient à l’ennemi.

– L’endroit est peu sécurisé… Il y a environ une trentaine d’hommes. Nous pouvons les neutraliser puis sécuriser le périmètre pour qu’il nous appartienne. Pour ce faire, chacun de vous a un rôle qui lui est défini. Merci de vous y référer scrupuleusement.

Nous sommes quinze à partir, dont Robert et moi. Bien entendu, je suis l’un des chauffeurs de cette mission.

Trois jours plus tard, nous sommes en route : trois camionnettes en route vers le nord. Robert, ses deux colonels et trois de ses commandants dans la première. Moi, Daniel et quatre autres de ses hommes dans la seconde. Des commandants dont je ne me souviens plus du nom dans la troisième. Tout ne se passe pas comme prévu. A mi chemin, nous sommes pris pour cible. La dernière camionnette reste sur place, avec six hommes à l’intérieur. Moi, je tente d’éviter les balles au mieux. Malheureusement, l’une des roues de la camionnette se coince dans un trou. Je ne peux plus ni avancer, ni reculer.

Daniel me fait signe de sortir, tandis qu’il se met sur le dos toutes les armes qu’ils possèdent. Les autres hommes à l’arrière du véhicule font de même.

Nous sommes à présent caché derrière notre véhicule. Aucun tir ne se fait entendre. Nos ennemis attendent probablement que nous nous montrions.

La camionnette dans laquelle se trouvait Robert est également à l’arrêt quelques dizaines de mètres plus loin. A priori, le réservoir du carburant a été touché. D’ici, je vois l’essence qui s’écoule.

– A mon signal, tu vas courir jusque dans les fourrés sur ta gauche, compris ? Me dit Daniel en chargeant l’une de ses armes.

Je fais un léger signe de la tête en signe d’approbation. Mais, pour ma part, je n’ai aucune envie de devenir la cible de nos ennemis. Pourtant, je n’ai pas trop le choix.

Daniel me fait signe avec ses doigts : Trois, deux, un.

Tandis que tous les hommes de notre section tirent en direction de l’ennemi, moi je cours pour me réfugier dans les fourrés. A trois mètres de l’arrivée, une balle me transperce la cuisse. Je tombe en hurlant. La douleur irradie tout mon corps. Je sais que je dois me relever car je risque d’une seconde à l’autre me faire cribler de balles. Mais, j’ai trop mal et j’ai le souffle coupé.

Soudain, je sens des bras m’entourer et me soulever de terre. Le temps que je réagisse, je suis déjà à l’abri dans les fourrés. Robert me repose par terre. J’ai du mal à le reconnaître. Il est tellement sérieux en cet instant. Sans échanger un mot. Il déchire le bas de mon pantalon et en fait un garrot. Une fois qu’il a fini, il me regarde enfin.

– Je dois y retourner. Mes hommes ont besoin de moi. Toi, tu restes là en attendant.

Il me regarde alors avec une certaine bienveillance. Il dégage une mèche de cheveux qui barre mon front, puis, sans m’y attendre, dépose un baiser sur mes lèvres.

– Tu m’as fait peur… me dit-il avant de partir.

– Je suis désolé pour la camionnette, dis-je encore sous le choc. J’aurais dû voir ce trou… Je comprends que tu puisses être déçu…Qu’est ce que tu vas faire ?

– Ils ne sont pas très nombreux. Il faut qu’on les supprime et qu’on récupère leurs véhicules… Je trouve, moi, que tu t’es plutôt bien débrouillée…

Je m’allonge un instant. La douleur est insupportable. J’entends alors des coups de feux, des cris. Je me bouche les oreilles mais cela ne suffit pas. Au bout d’un temps qui me parait une éternité, Robert revient seul. Il a du sang qui coule sur son front.

– C’est fini maintenant… Nous avons récupéré leurs véhicules et nous avons réussi à dégager la camionnette que tu conduisais…

Tout en parlant, il me porte à nouveau et m’emmène jusqu’à l’un des véhicules. Il me dépose dans l’un d’eux et ordonne au conducteur de rentrer directement à la base.

4

Année 2028. Afrique. Kenya.

Je suis à l’infirmerie. Il doit être tout juste 5h00. Les effets de l’anti-douleur commencent à se dissiper. C’est ce qui m’a probablement réveillé. Hier soir, après être rentrée, on m’a directement amenée ici. On m’a endormie avant d’extraire la balle de ma cuisse et recoudre le tout. Je pensais que je reverrai Robert mais il n’est pas venu… Après ce qui s’est passé hier avec lui, je ne peux pas faire comme si de rien n’était. Je l’aime… Je l’ai toujours aimé… Il faut qu’il le sache… Je me dis alors que je lui en parlerai dès que je sortirai de l’infirmerie… Contente de moi, je m’assoupis.

Deux minutes plus tard, j’ouvre grands les yeux. Et si cette fille brune qui le suit partout lui fait des avances… Décidément, je ne peux pas attendre.

Je m’assois sur le lit et bascule mes jambes à la verticale. Je retiens un cri de douleur. J’observe autour de moi. L’infirmier de garde est profondément assoupi sur son lit de fortune. Par chance, à côté de mon lit, il y a des béquilles. Je les prends et sans plus tarder, commence à claudiquer à travers les couloirs. Je sais parfaitement où me rendre. Trente minutes plus tard, avec pour seule source de lumière, les panneaux lumineux de sorties d’urgence, je parviens au dortoir de Robert. J’entre à l’intérieur, en essayant de ne pas réveiller les quinze autres pensionnaires. Je parviens jusqu’au lit de Robert. J’ai su, par je ne sais qui, que son lit est le dernier sur la droite. Curieusement, je m’en souviens encore. Je le reconnais. C’est bien lui. Il dort. Je pose alors mes béquilles par terre puis enlève ma chemise. Cette fois-ci, j’enlève également mon slip puis me glisse sous les draps. Je me colle alors à lui. Il est nu aussi.

A mon contact, il se réveille en sursaut, mais sans émettre aucun son. Le peu de luminosité lui permet de me reconnaître. A cet instant, je joue le tout pour le tout. S’il me rejette, je me promets de quitter sa section sur le champ. Mais non. Il me sourit. Caresse mes cheveux, m’embrasse sur le visage. Je sens la chaleur de son torse sur ma poitrine. Je sens son souffle sur mon visage. Ses bras se baladent sur mon corps, pour finir sur mes hanches. D’un geste brusque, il me colle plus fort contre lui. Je sens alors son sexe durcir et se presser contre le mien. Déjà, j’ai envie qu’il me pénètre, mais il n’en fait rien. Au lieu de cela, il me caresse de ses mains expertes. Lorsque je suis prête à crier, il met une main devant ma bouche et pénètre en moi.

Et là, devant ses hommes endormis, il me fait l’amour.

Une heure plus tard, Robert me ramène à l’infirmerie. Les personnes que nous croisons dans le couloir semblent surpris, mais Robert ne dit rien.

– Que va-t-on faire Robert ? Je demande tandis qu’il me dépose dans mon lit.

J’espère en moi-même que je ne suis pas un flirt sans lendemain.

Robert m’observe quelques secondes puis s’assied sur le rebord du lit.

– Je vais te raconter une histoire, Gabrielle… C’est l’histoire d’un petit garçon qui était fou amoureux de sa meilleure amie. C’était une très jolie petite rouquine aux yeux verts dont le visage était parsemé de tâches de rousseur. Malgré son charmant minois, elle ne voyait absolument pas l’amour qu’on lui portait. Un jour, celle-ci est allée dans la chambre du frère du petit garçon pour lui montrer d’une manière assez étrange l’amour qu’elle éprouvait pour lui. Le frère du petit garçon fut alors très embarrassé, car il savait combien le petit garçon était amoureux de son amie. Finalement, il ne fit et ne dit rien. Depuis ce jour-là, le petit garçon n’a plus jamais eu de nouvelles de son amie. Il fut très triste car il n’a jamais compris ce qui avait pu éloigner son amie de lui. Le frère en voulut beaucoup à cette fille, car elle avait brisait le cœur du petit garçon.

J’écarquille les yeux de stupéfaction. Nathan était amoureux de moi ! Jamais je ne m’en étais rendu compte ! J’étais tellement obnubilé par Robert !

– Tu comprends maintenant pourquoi j’ai été un peu méchant avec toi…Bien entendu, tout cela est du passé. Nathan n’est plus là… Et puis, lorsque tu t’es fais tirer dessus hier et que j’ai cru te perdre, j’ai compris combien je tenais à toi… Tu es la seule personne qui me relie à mon ancienne vie… Depuis que tu es là, je passe mon temps à te chercher, à t’observer. Tu es la vie Gabrielle ! Après tous les malheurs qui nous ont frappés, beaucoup de gens sont morts de l’intérieur… Mais toi non ! Tu ries, tu cries, tu te bats comme tu vies : à deux cent pour cent. Rien que pour ça, je t’aime. Et Nathan t’avait vu telle que tu es dès le premier jour…

Je prends Robert dans mes bras et je me mets à pleurer. Après tout ce que j’avais surmonté, après toutes les catastrophes qui se sont enchaînées, mon rêve de petite fille vient de s’exaucer…

Signaler ce texte