Un colibri s’est envolé

mysteriousme

On peut être petit mais grand On peut être vieil arbre sage et faire pousser des glands On peut veiller sur une planète et devenir inspirant

Tel pourrait être un résumé de ce que je retiens de Pierre Rabhi.

Un petit homme par la taille, mais grand par son parcours, ses propos et la trace qu'il laisse derrière lui.

Loin de tout connaître de lui, sa personnalité et son parcours atypiques m'interpellent.

Si j'en crois quelques-unes des premières lignes de Wikipédia, il est qualifié d'« essayiste, romancier, agriculteur, conférencier et écologiste français, fondateur du mouvement Colibris et figure représentative du mouvement politique et scientifique de l'agroécologie en France ».

Fils des déserts, il se niche dans un coin abandonné de France, en Ardèche. Avec sa femme, ses enfants et quelques litres d'huile de coude, il crée un lieu où la nature – en saine coexistence avec l'Humain - a sa place, toute sa place, sa juste place.

 

Des propos réfléchis, doux et bienveillants. Une attitude posée pour incarner un changement. Un changement qui parait marginal, et que je qualifierais volontiers de magistral.

Changement minuscule qui peut devenir capital. Changement de soi, de son rapport aux autres et au Vivant, de la façon de donner un sens à son existence, de se sentir utile, qui fait toute la différence.

Discours peu audible à ses débuts, et qui inonde finalement pour devenir un brouhaha incessant, un vacarme ambiant que le pire des opportunistes colle sur sa veste verte, qu'il retournera bientôt ! Hors sol, les jumeaux greenwashing et greenspeaking – beaucoup moins drôles que Tic et Tac – plombent l'action par la culpabilité, la décrédibilisent à coup de scepticisme, lui ôtent toute son authenticité…

Humble et médiatisé, Monsieur Rabhi relève le défi que les plus populaires envieux s'arrachent : faire la Une des gazettes « people », jouer avec une image entachée par les bruits qui courent sur les réseaux sociaux, et amplifiés par les mauvaises langues. Et s'il s'agissait juste d'un humain faillible ? Le système malsain dénoncé est à l'œuvre, et le restera certainement encore quelques temps !

 

Mais, bien loin des sots qui exercent des mauvais sorts, ses mots sont placés sous le sceau du bon sens. Insufflant un optimisme vivifiant. Ses idées, ses principes font bouger les nôtres, nous mettant face à nos responsabilités, notre conscience et notre inconscience.

 

Ainsi en attendant, au pied du vieux chêne, des glands grandissent, offrant leurs premières feuilles à l'éclat printanier. Malgré leur aspect si frêle de jeunes pousses, ils sont pourtant déjà prêts à prendre la relève, là, à leur juste place, dans un écosystème aux 1001 mystères, se dorant sous un soleil aux 1001 reflets.

La sève est propulsée, la force est partagée, la zone est protégée. Alentours, la faune et la flore jouissent paisiblement des 4 saisons et pâtissent parfois de leurs aléas.

Sortent de terre des projets qui essaiment sur tous les territoires, tous plus nombreux et enthousiasmants les uns que les autres. Le mouvement Colibris met en lumière des initiatives positives d'humains qui se regroupent pour agir : du numérique éthique à la création d'Oasis en passant par le magazine Kaïzen ou encore des MOOCs (sur la Transition Intérieure, par exemple)… L'offre est pléthorique et complémentaire à beaucoup d'autres.

La planète en a grand besoin !

Depuis longtemps.

Depuis assez longtemps pour que l'on ne se souvienne plus que le lait vient du pis, que l'alouette ou le coucou ont un rôle aussi important à jouer que l'impala, la sauterelle ou la baleine.

Depuis assez longtemps pour que le feu de l'urgence d'agir rencontre la montagne de notre inertie individuelle et collective. Comme l'arbre cache la forêt, la montagne cache la chaîne de montagnes : le sommet de nos incertitudes, la grotte de nos contradictions, la vallée de notre indifférence, le pic de nos paradoxes bassement humains.

Captant l'attention avec la légende amérindienne du « Colibri qui fait sa part » en arrosant goutte après goutte un grand feu de forêt primaire et dont tous les animaux se moquent alors qu'ils fuient la catastrophe sans se retourner, Pierre Rabhi nous invite collectivement à nous relier pour sortir du système de façon ingénieuse et posée. Comme une révolte douce mais ferme, il invite à envisager la décroissance et surtout la sobriété heureuse, considérant que point trop n'en faut dans un mode où il en faut toujours plus et tout de suite. Et s'il en fallait finalement peu pour être heureux ?

Une forme de « slowgagement » ou « softgagement » si je peux me permettre ces néologismes anglophones.

 

J'ai croisé le chemin de la pensée de Pierre Rabhi comme celui de nombreuses petites fées – majoritairement des femmes, mais pas uniquement - c'est-à-dire au hasard.

Avec ces personnes, je comprends encore mieux la situation vécue par Nino Quinquampoix dans le Fabuleux Destin d'Amélie Poulain, quand il est en quête de sa dulcinée et qu'on lui souffle le proverbe : « lorsque le sage désigne la Lune, l'idiot regarde le doigt ». Ces petites fées sont toutes équipées d'une lanterne qui éclaire un chemin, celui que j'ai besoin d'aller explorer, celui qu'il me faut écouter, celui qui sert ma vie à l'instant T et sur lequel je peux m'exercer et ancrer des concepts, des habitudes, des questionnements.

Grâce à toutes ces rencontres, je suis encore plus à même de m'enraciner, de m'émerveiller. Et parfois, quand je me réveille, je suis heureuse de constater que j'ai tiré tout un tas de cartes chance ! Chances que j'aie de vivre, de rire, de respirer, d'expérimenter, de rencontrer, de chérir, de jardiner, de cuisiner, d'entendre le chant des oiseaux dans un silence feutré, de savourer une pomme, de me souvenir, d'aider, de ressentir la colère, d'écrire l'amour, la peur, la joie, la mélancolie, d'éprouver la tristesse, la fierté… Il arrive alors qu'une petite larme de gratitude roule de mes paupières sur ma joue pour venir s'évanouir en une flaque chaude sur mon oreiller.

 

Passionnée et sensible aux enjeux du développement durable depuis que j'ai une quinzaine d'années, il me tenait à cœur de rendre hommage à une personnalité vue, lue, entendue et dont le message de paix et d'amour pour le Vivant et les Vivants contribue à m'enthousiasmer.

M'enthousiasmer et me réjouir de faire ma part à mon échelle en mettant en œuvre des projets concrets comme ma contribution à la labellisation de la ville de Sarrebruck en Allemagne, selon les critères Max Havelaar en 2009 ou encore au sein d'Objectif Terre 77 depuis 2010. Cette association seine-et-marnaise, dont l'état d'esprit est proche du mouvement des Colibris, est pour moi un véritable phare dans la nuit dans un monde obscur et déconcertant.

Hommage donc, à Pierre Rabhi, étoile filante dont la trace pailletée au firmament s'offrira aux yeux de celles et ceux qui, campés sur Terre, lèveront la tête vers le Ciel.

 

 

  • Bel hommage à un grand Monsieur. un colibri s'en va, des colibris veillent toujours sur notre mère terre! Bravo à tous les colibris de la planète.

    · Il y a presque 3 ans ·
    Noces du ciel et de la terre

    elmeziane

  • Rabhi Jacob et une bonne leçon pour les glands. Pendant ce temps, les écolos se déchirent aux primaires. Thoreau revisité, un bienfait et non une punition, mais le message ne passe pas. Réhabiliter les zones blanches pour se connaître enfin.

    · Il y a environ 3 ans ·
    Lwlavatar

    Christophe Hulé

    • et en cette saison, des zones blanches, il y en a ! ;)

      · Il y a presque 3 ans ·
      20161129 091109

      mysteriousme

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