Un homme part

lodine

Un jour de juillet pluvieux.... Variations sentimentales



1-

Les larmes sont des gouttes de pluie qui transpercent mon cœur.

Il est parti sans un bruit, souriant d'un air frondeur; ses yeux bleus délavés sur mon jean affrontant désormais la solitude des anonymes.

Il est loin, ce moment de 3h, près de la pluie.

Il n'y a que 10 minutes, qu'il est parti.

Je suis seule sous l'invincible gris du Philarmonique dont j'aimerais que les aiguille de métal tombent sur mon être soudain si seul, sans sa voix, ses yeux, ses rêves.

Je suis seule dans cet univers gris et je pleure sous la pluie. La tôle grise du navire se crispe sous mon dos. Une jeune femme rousse descend de la longue rampe, passe près de moi en me souriant. 

Où est passée ma jeunesse? La sienne? Il avait plus de 14 années de plus que moi, un Océan entre nous et des rêves qui n'avaient pas le même âge que les miens.  Il n'était pas mon amant, il était peut-être au-delà de ça. Il était celui avec qui je passais des heures à rêver. Il venait de bien loin. Des Amériques. De NY.

Des murmures de voix me dérangent. Je n'ai pas envie de feindre le bonheur quand je suinte la tristesse. Elle m'est tombée dessus, la lâche. La perfide.

L'heure est pourtant dans les bars, les pintes de bière, les rires enjôleurs. Vais-je rejoindre ce bruit?

J'ai plutôt envie de m'ensevelir dans la pluie, y vider mon cœur. Il y a des moments heureux, où l'on sait que ça ne durera pas. Pourquoi est-ce si cruel de devoir dire adieu à un homme qui aime sa liberté et me dit " I like you very much ".

Mon cœur cogne à 20h30. Il ne sait où se poser. Pourquoi faut-il que le bonheur s'enfuit?


2-

Il tangue d'une manière chaloupée comme un bateau mal amarré.

Je le regarde s'éloigner, il a le dos tourné.

Mon cœur est fracturé.

Je regarde le Philarmonique, je voudrais que les piques métalliques me transpercent de leur cruelle manœuvre, pour me faire oublier la douleur de la séparation, si âpre, si brutale.

Les larmes coulent. Une sur la joue gauche d'abord, puis sur la droite ensuite. Brûlantes, alors que la pluie se rit de mon chagrin. Elle continue son travail de sape sur la tôle ondulée.


3-

L'hydre de la tendresse s'est penchée trois heures durant sur notre tête-à-tête. Elle a entonné sa mélodie près de la rame de métro Porte de Pantin, près de la Cité de la Musique. Nous étions là, dans un restaurant populaire, à partager une bruschetta de saumon, à parler de sa vie new-yorkaise, de la mienne entre deux gorgées de bière. Parmi les couples, la vie, la musique.

Et puis, au détour de cette affreuse montée grise, près du périphérique, il m'a fait un dernier hug d'au-revoir Il ne s'est plus retourné. Je suis partie de mon côté, tanguant jusqu'à un banc de bois, sous la voûte triste du Philarmonique où je me suis effondrée.

Ainsi tombe la splendeur d'un jour.

 4-

La tendresse est une opiacée quand on le respire d'une seule bouffée. Quand elle disparaît sans un bruit, elle se joue de nos faiblesses et de nos égarements. Elle est cruelle, la tendresse.


5-

L'homme qui m'a quittée cet après-midi n'est pas parti par dépit ni désamour. Ni par faiblesse, lâcheté ou intérêt.

Il ne peut rien m'offrir. Ni fortune, ni situation ni amour.

Il est de l'Autre Monde, celui de Rhode Island. Il n'a pas trouvé sa place ici à Paris. Il lui faut s'en retourner.


6-

Quand l'amour est remplacé par la tendresse, le cœur vacille, suspendu comme une hirondelle sur le fil du départ. Il est partagé entre l'infortune de n'être pas aimée , désirée comme on le voudrait, et la fortune d'être si bienheureuse en la compagnie de celui qui vous apporte son amitié.

L'amour, c'est bien autre chose, n'est-ce-pas? J'ai l'impression de ne plus savoir.

Où est le désir, l'attraction fatale qui conduit les bouches à se happer, les mains à se toucher, les corps à se joindre inexorablement?

Cet élan n'existe pas dans la tendresse. Il est freiné par cette absence d'amour réciproque et de désir absolu.

7-

Quand la vie vous met à l'envers

Quand les sentiments se pressent et explosent,

Quand le monde n'existe plus,

Alors on est amoureux.


Quand les yeux racontent le bleu d'un autre Océan.

L'on a envie de plonger dedans, de s'y fondre ou de  s'y évanouir.

Quand les mots racontent les accents d'un autre continent,

L'on a envie de chevaucher sans fin les berges de l'Hudson Bay.

Quand les notes de blues racontent les dérives d'une vie en marge, en quête d'absolu,

L'on a envie de les écouter jusqu'au bout de nuits sans aube.

Lorsqu'on sait écouter un homme, qui, de sa voix grave, vous conte les poissons grands comme 3 pouces 1/4 dans cette baie d'Hudson, et qu'il relâche ensuite

L'on a envie de prendre un ticket A/R jusque la Statue de la Liberté, et peut-être ne plus revenir...

8-

La vie est douce et cruelle. Elle fourmille de mille peines et souffre mille envies que l'on ne peut satisfaire.

La volonté lustre les ailes des passants endormis.

Tout est mensonge, jeu et vérité. Tout est enchevêtré.













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