Un jour comme un autre

loup-cie

C'était un jour de pluie, un jour gris. Elle ne comprenait pas pourquoi, mais une sensation de malaise l'avait envahie depuis l'instant où elle s'était levée. Elle s'était réveillée, les cheveux en bataille et les traits tirés, comme tous les matins. Elle avait pris une douche, et il n'y avait plus d'eau chaude, comme tous les matins. Elle s'était habillée, sans réfléchir, comme tous les matins. Elle avait bu son café, et n'avait rien mangé, comme tous les matins. Puis elle était sortie dans le froid, ce matin de décembre. Cette routine simple, d'une banalité presque exaspérante n'avait pourtant pas effacée cette sensation singulière. Elle ronronnait en tout son être, lui chuchotant que tout ne serait pas banal aujourd'hui. Un rictus amer déforma son visage. Rien ne changerait. Cela ne changeait jamais. Peu lui importait cette petite voix, ce n'était qu'un fantasme de plus. Les rêves ne se réalisaient jamais, elle le savait. Alors elle prit le métro, et se rendit à son bureau où elle classa, signa, rangea comme tous les jours. Puis elle mangea un sandwich sec, seule dans la cafétéria bruyante, comme tous les jours. Elle sourit, poliment, à chacun de ses collègues, comme tous les jours. Elle accepta les critiques d'un patron insatisfait qui trompait sa femme plus souvent qu'il ne changeait de chaussettes, comme tous les jours. Elle avait pointée à 8h pile, et elle dépointa à 17h pile, comme tous les jours. Mais sur le chemin du retour, elle se sentit envahie par un besoin irrépressible de faire un détour. Comment ne pas y succomber? Tout son corps était comme aimanté, et la petite voix ne chuchotait plus. Elle l'exhortait à suivre cet autre chemin. Un voile rouge dansait devant ses yeux, et le reste du monde avait disparu. Elle marchait, sans savoir où elle allait, sans même voir ce qu'elle faisait. Brusquement, tout réapparu. Elle réalisa qu'elle se trouvait au milieu de la route, vit deux phares rouges, puis tout devint noir.

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