Un peu d’histoire… et une fiction
Marcus Volk
Nous le savions tous les 2. C'était notre dernière nuit. Après remisé ma tunique de mailles de fer tu m'avais rejoint dans ce bain. Bref répit. Au loin derrière les collines le ciel bleu marine était embrasé des feux des légions du sultan. Je te revois encore, enfilant mon vit dans ta gaine étroite, me faisant défaillir avec la puissance de tes balancements en avant et en arrière comme le mât du navire qui ploie mais résiste face la tempête qui s'est abattue. Tes yeux révulsés, tes doigts qui se joignent selon le signe d'ancrage, et moi, m'accrochant avec les mains à tes hanches d'ensorceleuse, cherchant l'air comme le poisson hors de l'eau. J'ai le souvenir de ton bracelet vermeil qui s'agitait comme un phare dans l'obscurité de cette nuit, bleu saphir.
Avec une poignée de frères chevaliers sur la plage, face aux mamelouks nous tenons la muraille pour ne pas qu'elle s'effondre ; notre résistance sera vaine, et tu es venue avec d'autres femmes nous supplier de partir, mais nous avons décidé de tenir pour évacuer le plus d'habitants, dont toi. Je suis resté inflexible te promettant juste de te rejoindre, un jour, dans un autre temps.
Pendant 10 jours dans des combats acharnés, nous allons faire face à un rapport de forces démesurées, nous voyons nos frères tomber les uns après les autres, mais nous n'abandonnons pas.
La citadelle résiste aux bombardements incessants, le sultan n'en revient pas, d'un tel exploit.
Cette défense acharnée permet à bon nombre d'habitants de la ville et à plusieurs chevaliers de pouvoir quitter Acre sain et sauf. Je n'en fais pas parti. J'ai combattu aux côtés de Pierre de Sevry, Maréchal de l'Ordre, face au raz-de-marée musulman, qui a réussi à maintenir les milliers de combattants du sultan avec seulement une poignée de défenseurs. Le 28 mai 1291 après 10 jours, la maison du temple s'écroule sur les dizaines de défenseurs restant et sur plus de 2000 turcs qui l'assaillent.
28 mai 1291 Saint-Jean-d'Acre est tombé. Tu es sauve.