Une agréable soirée
deep_immaturity
J'ai cette impression de ne pas pouvoir participer au monde comme les autres. J'ai le sentiment d'être spectatrice de chaque moment que je vis, de fonctionner comme si j'étais quelqu'un faite pour observer, comprendre et m'adapter. De cette manière on m'apprécie. Je sais que les êtres humains ont leur propre vie où le but du jeu est d'être heureux le plus possible, et leurs échanges sociaux sont ici pour leur apporter un intérêt quelquonque dans cette bataille. Hier soir, j'ai décidé de sortir voir un garçon, chose que je n'avais pas faite depuis des mois. En partant je savais que ça allait être éprouvant. Devoir faire semblant d'être bien présente dans cette réalité, de s'intéresser et d'avoir des échanges normaux et naturels sans toute cette comédie derrière. Comment aurait-il pu comprendre ? Il m'a longuement parlé de sa vie, m'a raconté chaque détails durant à peu près 3 heures. Il était soulagé de pouvoir se lâcher totalement sans être jugé, laisser sortir chaque choses en lui qu'il avait gardé si longtemps et qui le pesait. Je l'écoutais attentivement, comprenais et répondais seulement les mots justes, comme si je savais exactement quoi lui dire et faire pour qu'il se sente satisfait et compris. Je savais quel était mon rôle et il m'a trouvé extrêmement gentille, à l'écoute et douce. Au fond de moi, je m'en fichais totalement. Je le haïssais de m'imposer tout son cheminement sans m'avoir demandé mon avis. Il soulignait le fait que j'étais quelqu'un avec une certaine distance et froideur qui avait l'air de ne pas vouloir s'ouvrir. Sur son visage je voyais pourtant ce sourire se dessiner, un sourire qui voulait dire qu'il était heureux que je ne m'ouvre pas, ça lui laissait plus de place. Au fond, je n'avais pour lui, que l'importance d'être attentive à lui, gonfler son ego sur lequel il doutait, le complimenter, l'encourager à se lancer dans la musique. Ma vie ne l'intéressait pas ou seulement pour qu'il la compare avec la sienne, ce n'était pas utile. C'était un calvaire pour moi de l'écouter, de sourire mais je réussissais à jouer ce rôle à la perfection. Le plus dur était de lutter contre mes pensées : Surtout au moment où il m'a raconté qu'il avait failli se jeter d'un pont tellement sa souffrance était immense... La pensée qui me vint rapidement était qu'il aurait dû le faire. Je me sentais légèrement coupable et me dit que j'étais une mauvaise personne. La deuxième partie la soirée, m'a fait des avances, chose que je redoutais. Bien sûr, je l'avais rassuré, j'avais été généreuse, j'avais fait tout ça pour lui sans rien demander en retour. Il s'est dit, après ce qu'elle vient de faire, je peux peut-être prendre un peu plus que ce qu'elle m'a donné ? J'ai refusé plusieurs fois ses propositions qu'il avait soigneusement préparé avant de me voir, je le sentais dans sa façon de les dire. Il semblait gêné et honteux de mon refus, je voyais dans son regard qu'il m'en voulait, j'avais blessé son ego. Il lâcha un bref « Tant pis. » d' un air culpabilisant. Je me suis dit que tout ce que je venais de faire n'avait servi à rien. Je m'excusais et lui proposais un câlin, comme si j'avais fait quelque chose de mal et que je me devais de me rattraper. Il accepta, et me prit dans ses bras. A ce moment là, je ne ressentais rien d'autre que du dégoût, pas un sous de bien être. Je l'avais serré contre moi parce que c'est ce que je devais faire dans la suite logique des choses pour qu'il passe une agréable soirée. Ses mains ont été maladroites et un peu trop baladeuses à mon goût. J'ai senti que c'était le moment où je devais me reculer alors c'est ce que j'ai fait. J'étais prise d'une envie de rentrer chez moi et je regrettais cette sortie. Aucun moment n'avait été agréable pour moi, juste une corvée. Au fond j'étais triste de me rendre compte une nouvelle fois des choses. J'ai l'impression de ne pas être faite pour tout ça. Tout n'est qu'une mise en scène.
La nausée, on se dit inadapté(e), car le monde serait fait pour nous. Flatter autrui pour ramasser quelques miettes.
· Il y a presque 3 ans ·Heureusement que la Police de la pensée n'existe pas, sauf si je me trompe!
Coup de cœur pour ce bel aveu sans complaisance.
Christophe Hulé