Une des fins d'Azmaar

Loxias

Histoire d'évasion

Toute l'histoire est au fond de la jarre. Cette jarre qui contenait il y a trois jours encore les cendres d'Azmaar, Dieu ait son savoir !


Dans un pays lointain, à l'Est du Nord-Est, il était une région. Et une partie de cette région était particulière car elle comptait un village. Un tout petit village qui avait vu naître Nazim, qu'on n' appellait pas encore Nazim le potier. Un enfant qui avait tout le temps soif, et faim et qui devint par la graisse d'Allah un brave et fort gaillard. Mais il avait tout le temps soif.


Ayant embrassé la vocation de potier, il se plaisait à dire qu'il avait besoin de boire, comme son argile, par identification avec sa matière première. Mais beaucoup se souviennent que bien avant de commencer à pratiquer son art, il buvait déjà comme quatre. Bref, un jour (mais il ne dut pas la faire qu'en un seul jour) il confectionna une jarre. Et cette jarre était si belle, il la cacha. Aux yeux de tous il la cacha. Car sa beauté sans nul doute aurait attiré tous les curieux. Tous voudraient bientôt la voir, la toucher, l' acquérir même, c'était inadmissible. Cette jarre était trop belle et cette jarre était à lui. Il n'y avait que Nazim qui pouvait la contempler et encore s'en croyait-il de moins en moins digne. Elle restait souvent plus d'une semaine, un mois sans qu'il ne la tire brièvement de sa cache.


Mais si Nazim avait pu concevoir un tel trésor, c'est qu'il était pur malgré lui (depuis sa naissance) et ce genre d'éclat, invisible à nos yeux, attire aussi les aventuriers nés pour mourir d'avoir trouvé un véritable trésor.


Azmaar avait conjuré son âme et renvoyer ses gardiens il y avait de cela quelques incarnations déjà et cherchait maintenant un moyen de remédier à cette fatalité. La mort ne voulant plus de lui, il lui fallait trouver de quoi la subjuguer. Offrir à la mort une offrande digne de son royaume. Et cette jarre, assurément, ferait l'affaire.


Ce fut pendant son sommeil, mais Nazim peut le raconter car il prétend avoir rêvé cette nuit-là d'un homme qui entra chez lui d'un pas leste et se dirigea droit vers la cache, qu'il ouvrit sans un bruit, pour en sortir la jarre. A son réveil (bien qu'il se murmure ici et là que Nazim, bien éveillé, n'a pas eu le courage de faire quoi que ce soit, terrorisé qu'il était, alors qu'un vrai homme aurait défendu son territoire) il s'étonna de n'être pas surpris de trouver, au fond de sa jarre, ce qui semblait être un tas de cendre.


La jarre, elle, s'était ternie. La Mort avait emporté sa beauté, Azmaar avec. Dieu ait son savoir.

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