Une idée détonante
marika
Concours Storylab – 1° partie - Une idée détonante Synopsis
Florence réapprend à vivre après la mort de son mari et de son fils lors d’un accident de voiture. Elle se réfugie dans la culture mais la solitude lui pèse. Que peut-elle faire, elle qui n’a jamais travaillé ? Elle trouve une idée qui lui permet de concilier la culture et le relationnel en proposant aux touristes de découvrir Paris sous tous ses aspects. Dans le même temps, elle est témoin d’un meurtre par balle, et le regard d’acier du tueur présumé la hante. Florence s’adjoint bientôt l’aide de Julie chargée d’accompagner les jeunes touristes attirées essentiellement par les boutiques de luxe. Tout s’arrange mais c’est sans compter sur la curiosité de Julie qui se met à dos ses clients russes. L’un d’eux se manifeste et Florence à d’autant plus de raison de prendre en compte ses menaces qu’elle reconnaît le regard du tueur présumé. Florence panique complètement quand Julie est victime d’un accident de voiture. Elle tente alors de disparaître en déménageant mais malgré tout, reste très attentive à tout bruit de voiture autour d’elle.
Une idée détonante
Florence Marquer était veuve, elle avait aussi perdu son enfant. Deux ans auparavant, dans un accident de voiture. Un retour de week-end pendant lequel les gens se retrouvent entre amis et pendant lequel certains boivent trop, beaucoup trop, et reprennent la route car le travail les attend le lendemain. Celui qui avait percuté leur voiture n’etait pas retourné travailler le lundi. Gilles, le mari de Florence, non plus. Leur petit garçon n’est pas non plus retourné à l’école. Morts sous le choc. Florence, elle, a passé de nombreuses semaines à l’hôpital. Dans le coma. Morte-vivante. Comme si elle avait tenté de les rejoindre. Puis elle est revenue à la vie, ses blessures ont guéri. Du moins ses blessures physiques. L’autre, la grande plaie, est toujours là. Plus ou moins douloureuse selon les jours.
Du temps de son mariage, elle ne travaillait pas, elle avait fait le choix d’élever son enfant, son mari était assureur, ils avaient une situation confortable. Et il lui avait laissé de quoi vivre largement sans rien faire. Elle possèdait encore des parts dans la société son mari que son associé gérait sans son aide. Il lui avait proposé de venir travailler quelques heures, mais la perspective de travailler dans les mêmes lieux que son mari lui faisait peur, elle avait déjà tellement de mal à penser à autre chose qu’à cet accident…Ce qui explique que deux ans plus tard, elle tournait dans son bel appartement, désoeuvrée et solitaire. Elle tentait de s’oublier à travers la culture, une grande partie de ses journées y était consacrée. Expositions, musées, concerts, elle y passait ses journées et ses soirées, cela l’aidait à trouver un peu de beauté à la vie. Mais à part se constituer un solide bagage culturel, ses sorties la laissaient triste, elle n’avait personne avec qui partager les émotions ressenties. Ses amis travaillaient et elle les avait peu vus depuis l’accident. Passés les premiers mois où ils avaient tenté de la soutenir, ils s’étaient fait plus rares. Par sa faute. Elle avait refusé beaucoup d’invitations, elle se sentait déplacée dans son ancien groupe et il y avait trop de souvenirs qui y planaient quand elle etait là et qui attristaient l’ambiance, elle les évitait donc la plupart du temps et se retrouvait seule. Elle supportait de moins en moins cette solitude qui l’enfermait dans ses souvenirs et elle avait décidé de trouver un emploi sauf qu’elle n’avait jamais travaillé et n’avait pas plus d’expérience que de diplôme. Une licence de Lettres n’ouvrait pas de grandes perspectives. Le besoin d’argent n’étant pas sa motivation, elle n’était pas prête à faire n’importe quel travail, elle voulait pouvoir s’y oublier et retrouver un contact avec le monde. C’est en faisant une de ces longues promenades qu’elle affectionnait dans Paris que l’idée lui vint. Ce jour là, elle fut interpellée par une Américaine. La voyant perdue à l’entrée d’un métro, au milieu des guides et des plans, elle voulut l’aider. Cette femme était à Paris pour deux jours, accompagnant son mari qui avait un rendez-vous d’affaires. Elle voulait avoir un aperçu de la ville et de la culture française mais son problème était de faire des choix. C’est ainsi que Florence lui fit un itinéraire de visites, mêlant monuments et musées et qu’elle se proposa pour accompagner Debby Forster pendant la journée ainsi que le lendemain. Debby était très tentée mais génée de profiter ainsi du temps de Florence.
- " Ce n’est pas un problème. En fait, je suis en train de créer une société, je compte m’adresser essentiellement aux femmes qui accompagnent, telle que vous, leur mari et qui se retrouvent seule toute la journée. Je veux leur proposer des visites, des musées, du shopping, tout cela en fonction de leurs goûts, de leurs connaissances et du temps qu’elles disposent. Disons que vous serez ma première cliente-cobaye !"
Florence s’écoutait parler. Un peu surprise que l’idée lui soit venue spontanémént.
- " C’est une idée merveilleuse. Je peux vous assurer que vous réussirez. Je vous aiderai. Dans mon milieu, il y a beaucoup de femmes qui souhaitent venir à Paris mais qui reculent justement parce qu’elles sont seules toute la journée. "
C’est ainsi que Florence se lança dans son nouveau métier. Elle contacta son notaire pour les formalités, créa une plaquette de publicité et démarcha les hôtels de luxe pour promouvoir les services de sa société. Son discours, son sérieux et son apparence firent merveille, sans compter que ce service pouvait être, pour les femmes, une incitation à suivre leur mari et à profiter des avantages de l’hôtel. Elle dressa des listes de tout ce qui se visitait, des lieux les plus touristiques aux plus insolites. Répertoria toutes les galeries et musées. Partit à la découverte des nouvelles boutiques dont on parlait ou des magasins de luxe. Se fit une indigestion de caféïne en allant tester les cafés, et les lieux où l’on risquait de croiser quelques personnalités ou simplement typiques d’une certaine ambiance parisienne. Se plongea dans les guides gastronomiques pour découvrir de nouvelles tables. Florence essayait de parer à toutes les demandes qu’on pouvait lui faire. Elle mit aussi au point un questionnaire pour ses futures clientes, pour connaître leurs goûts, leurs envies, leurs choix… Cela devait être du sur-mesure. Enfin tout fut prêt. La première personne qu’elle informa fut évidemment Debby Forster. Par son intermédiaire, elle eût accès à un carnet d’adresses new-yorkais. Elle envoya ses prospectus à quelques grands groupes industriels et financiers, elle croyait en sa réussite, elle savait aussi que ce genre de service ne s’adressait qu’à des gens fortunés.
Florence s’était investie depuis quelques mois dans son projet et l’action lui faisait du bien. Il lui arrivait de passer des journées sans penser à son mari et à son fils, elle ne les oubliait pas mais avait retrouvé une dynamique de vie. Un incident vint momentanément troubler cette quiétude. Un jour, elle sortait du salon de thé d’un hôtel réputé de la capitale, elle regardait un taxi s’arrêter tout en pensant qu’il lui serait plus agréable de le héler que de prendre le métro à cette heure de pointe, un homme en refermait la portière et au moment où il mit le pied sur la première marche du perron de l’hôtel, son corps se tendit comme un arc avant de s’écrouler aux pieds de Florence. Elle ne vit pas instantanément l’homme tomber car son regard s’était porté dans la direction d’où avait retenti un claquement sec. Elle y vit un homme la fixer puis se retourner et partir d’un pas pressé. Simultanément elle entendit des cris, vit l’homme du taxi à terre, du sang coulant d’une blessure à la tête, une blessure ronde comme celle qu’aurait pu occasionner une balle… Florence fut interrogée, raconta ce qu’elle avait vu et bien que le meurtre par balle fut confirmé, rien de ce qu’elle dit ne fit avancer l’enquête qui fut considéré comme un règlement de comptes. Elle réussit à ranger cet épisode au rayon fait-divers même si, de temps a autre, un regard croisé dans la rue lui rappelait, par sa dureté, celui de l’homme qui s’était enfui, probablement le tueur.
Un message de sa première cliente américaine vint la sortir de ce mauvais moment en lui donnant l’occasion d’accompagner une de ses amies qui arrivait à Paris pour trois jours. Florence lui maila un questionnaire afin de mieux connaître ses envies et d’organiser ainsi un programme adapté à ce qu’elle souhaitait visiter. L’Américaine fut enchantée. Puis ce fut un autre contact par le biais d’un hôtel, l’épouse d’un homme d’affaires russe. Puis il y eut une jeune femme indienne, deux amies italiennes… Ses prestations étaient appréciées, son contact aussi, elle tentait d’être au diapason de la personne qu’elle accompagnait, elle parlait l’espagnol, l’italien et bien sûr l’anglais la plupart du temps.
Florence cherchait la perfection. Pour elle mais également pour ses visiteuses, la plupart d’entre elles étaient des femmes cultivées mais très exigeantes, et elle s’était mise à tenir un fichier pour chacune d’elles. Elle y notait les programmes des journées passées ensemble, mais aussi les remarques qui avaient été faites, les achats, les préférences manifestées, les goûts culinaires, le style de la personne, afin de pouvoir affiner encore davantage une visite future. Ce qui se présenta les mois suivants. Debby revint à Paris encouragée par la perspective de la compagnie de Florence, puis ce fut une autre jeune femme russe qui revint. Vraisemblablement la jeune maîtresse de l’homme qui contactait Florence par téléphone, fixant lui-même les horaires et le programme de visites, visites qui se réduisaient en fait à des magasins de luxe dans lesquels la jeune femme s’approvisionnait sans avoir l’air de trop compter. Cet aspect était celui qui intéressait le moins Florence. Accompagner sa visiteuse pour la regarder choisir des vêtements et des bijoux hors de prix ne la passionnait pas. Elle ne pouvait rien transmettre de ce qu’elle connaissait. Juste lui désigner les boutiques, l’attendre et l’aider à porter ses paquets aux couleurs et aux sigles prestigieux. Mais cela faisait parti des prestations offertes. Cette jeune femme revint plusieurs fois et la sollicitait à chacune de ses visites. Apparemment elle recommandait l’agence de Florence à son entourage car il y eut d’autres très jeunes femmes qui accompagnaient des messieurs d’âge très respectable qui se mirent à réclamer ses services. Et qui, toutes, dépensaient énormément d’argent. Elle fut même invitée à participer à des soirées, elle y tenait compagnie aux dames tandis que les messieurs parlaient affaires. Florence n’aimait pas ce milieu. Elle y sentait l’argent trop vite gagné. Elle y sentait aussi quelque chose qui la troublait. Des mots perçus dans les conversations, des apartés entre les hommes lui donnaient le sentiment d’affaires à la limite de la légalité. Pour ne pas dire plus. Mais d’un autre côté, elle ne pouvait pas négliger ces clientes.