Vacances en famille -5-

aile68

C'est le soir, la vaisselle est rangée, tante Juliette a bouclé les valises, elle partira demain matin avec l'oncle André, Laurence et Louis. Je n'ai pas revu Germain, et je pars dans trois jours. Demain grande lessive, on étendra le linge dans le jardin, on commencera à préparer nos bagages. Je n'aurai jamais le temps d'aller au village pour voir Germain. M'a-t-il oubliée? Quand je repense à notre baiser, notre premier baiser, je me sens tout chose, comme lascive, toute langoureuse, je n'aime pas mais c'est comme ça. J'ai encore envie d'être la petite fille qui nageait dans la rivière avec sa bouée, quelques années en arrière, quand je me surprends dans la glace j'ai l'air rêveur, ailleurs. Je laisse gagner mon petit frère au jeu des dames, je n'arrive pas à suivre une conversation sans que mes yeux se ferment, je me sens lasse, lasse, lasse. Est-ce de la mélancolie? Je soupire d'amour pour un garçon que je ne reverrai peut-être plus. J'irai le voir demain, c'est décidé! Je dirai que je veux acheter des timbres ou je ne sais quoi d'autres. Pourvu que Maman ne me colle pas ma soeur dans les pattes!

On a travaillé toute la journée, les draps et le linge de bain sèchent au soleil, nos valises sont quasi pleines. Nous partons dans deux jours. Ce compte à rebours est des plus cruels. Maman se repose, tout le monde vit sa petite vie et Papa doit aller faire le plein au village. J'en profite pour y aller avec lui! En cinq minutes nous voilà arrivés à destination, Germain doit être encore à la boucherie, il n'est que cinq heures et quart. Je me dépêche mais pas trop pour ne pas éveiller les soupçons, fais semblant d'aller à l'épicerie, et ni vue ni connue, j'entre là où je veux aller. Germain n'est pas au comptoir, heureusement le boucher est loquace il me dit que son apprenti est parti plus tôt car c'était son dernier jour à la boucherie. Je sors vite, dis à mon père que je vais saluer une amie, que je rentrerai à pied. N'avez-vous jamais été furieux après quelqu'un tout en désirant le voir au plus vite? Je cours chez le grand-père de Germain, reprends mon souffle, et sonne un coup bref. J'entends quelqu'un qui arrive, pourvu que ce soit lui, oui c'est lui! Il a l'air gêné, veut parler mais je lui dis encore essoufflée:

"Je n'ai pas le temps de rester. Je suis venue te dire au revoir.

- Je m'attendais pas à te voir. Je pensais venir Au fin Muguet demain.

- ça va pas! Personne te connaît là-bas!

- J'aurais inventé une excuse...

- Quelle excuse? je dis agacée.

- Eh calme-toi! Je t'ai pas oubliée, t'inquiète! Je regrette que tu partes dimanche. On ne sait pas beaucoup fréquenté. Tu veux rentrer un moment? Mon grand-père bricole dans le garage.

- Ok un petit moment alors.

- Tu es pressée?

- Non, non je mens distraitement.

- Je t'offre un soda, un jus d'orange?

- De l'eau fraîche merci je dis calmement.

- Tiens! moi aussi.

- Quand est-ce que tu rentres à Besançon?

- Où ça? Dit-il très étonné.

- Ben, à Besançon... Je crains de comprendre. Ce vaurien m'a trompée, il n'habite pas Besançon. Je le lui fais remarquer vertement.

- Non, écoute je vais t'expliquer.

- Pourquoi m'as-tu dit que tu habitais Besançon? Tu voulais me donner une fausse adresse, c'est ça? J'ai perdu un été à t'aimer, à soupirer après toi, tu te rends compte.

- T'as raison. Je suis un salaud. Mais écoute, ce qui s'est passé dans la cabane l'autre jour, c'était sincère tu sais, j'ai réellement ressenti quelque chose. Après ça je n'ai pas su comment retomber sur mes pattes et te dire la vérité.

- Comment veux-tu que je te crois?

- Fais-moi confiance, je t'en prie...

- Je ne pense pas tu vois.

- Oh écoute, écoute ton coeur!

- Mon coeur? Mais depuis que je te connais il a mal mon coeur.

Je lui envoie de l'eau à la figure à défaut d'une claque, et je m'en vais les larmes aux yeux.

(à suivre...)


Signaler ce texte