Vacuité

leeman

Je gis au sein du monde, de cette prison des corps.
Dans ce lieu qui m'accueille mais qui hélas me procure la nausée.
Cette étendue riche pour le regard et merveilleuse pour l'attention me déplaît davantage à mesure que j'y vis.
Je m'y perds, sans cesse, car on n'y trouve aucune rupture.
Le monde est si vaste qu'il m'angoisse ; je le crains.
Sa grandeur me fait me sentir seul : et ce, infiniment.
Une seule pensée se présente à moi lorsque je le vois : c'est que je suis un être sans consistance.
Un être si densément pauvre, souffrant de solitude ininterrompue.
Le temps est parfois symbole de lumière ou d'espoir ; il n'est pour moi rien de plus qu'une douleur insupportable.
Mon corps se perd, se dissolvant dans l'immensité du monde ; mon âme, lacérée, implose et saigne en sentiments.
Je suis tout ce que je crains ; car mon être est un supplice pour moi-même : mon angoisse du monde est aussi angoisse de moi.
J'incarne ma peine, car je suis ma peine.
Et tandis que le monde manifeste la vie, j'aimerais m'y dissoudre pour retrouver en vivacité, en mouvance.
Mais le monde n'est pas moi, et je ne suis pas le monde.
Voué à errer, pour toujours, dans les couloirs sombres de ma conscience, je ne sais rien faire d'autre que de geindre ma peine.
Ne voyant plus cette audace ou cette lumière, je fais de ma peine mon véritable et inexorable absolu.
Il me faudra vivre avec l'idée que mon monde est fait de choses que je n'aime, et que je n'aimerai jamais.

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