Vieux dominos
Olivier Memling
Pêle mêle que j’ai connues, pêle mêle que j’ai rêvées
sans même encore savoir où passe la frontière
sur des cordages peut-être nous nous sommes aimés
je me souviens des brumes qui nous lavent
le navire est un brûlot qui nous porte sur la mer
ton image est ce halo qui s’évanouit dans l’étrave
nos cigarettes allument des étoiles supplémentaires
je ne saurai jamais ce que tu m’as fait
sous les haubans, au vent, par ce gros temps
dans le canot, dans les sanglots
Les dominos
sont de points noirs sur un ivoire blanc
tête-bêche accordés pour un chemin de croix
un jeu d’envers et d’endroits
Lorsqu’au soir nous n'allions que pour nos visages
aux grilles des jardins fermés
il y avait du vent sur la campagne
chassant toutes les nuées
et ta peau brune légèrement
blêmissait sous les baisers
A l’heure d’antan
c’est dans le temps que je t'avais connue
mais jamais dans 1'étendue
Je sens gonfler de gel
la pierre de ma gorge
et comme un grand déchirement
comme le décollement d’une tête de son tronc
lorsque je romps avec ta hanche
Je ne peux arracher 1’informe clair
du dedans de moi-même
J'ai appris ce qu'imprime un pilon de chimère
aux revers chauds des paupières
ce qu’aux parois d’un crâne
martèle un tobol du désert
la tiédeur des lèvres parcheminées et craquelées de nuit
le goût de la sueur se massant lentement au creux des paumes
la sueur traçant au long des membres
des sillons de fraîcheur salée
plaquant au corps des touffes de désir
A ma fumée de les brûler
Superbe
· Il y a plus de 14 ans ·ko0