A bout de souffle

mamzaile-no

Un flux. Le même flux quotidien qui coule dans mes veines depuis 34 ans. Mais rien n’y fait. Aujourd’hui il circule bien trop vite au sein de mes artères. Ma respiration se fait même plus rapide. Et qu’est-ce qu’il fait chaud ! Je ne sais pas ce qui m’arrive mais c’est anormal.

J’ouvre les yeux : tout est rouge.

Je referme les yeux et la seule image qui m’apparait c’est un homme habillé de noir qui me tire une balle en pleine tête. Je touche ma tête. Un énorme bandeau l’entoure mais pas la moindre sensation d’humidité. Le sang ne coule donc plus.

« Allez, penses. Souviens-toi ! »

Mais rien ne me revient en mémoire. Je suis perdu.

J’ouvre les yeux : je suis aveuglé par une forte lumière bleue clignotante.

Je ferme les yeux. D’autres images se bousculent dans ma mémoire. Un trajet dans une ambulance.

L’arrivée aux urgences. Les médecins autour de moi. Tout est plus clair. Suite à ce tragique incident, j’ai du être transporté pour une opération.

Le sourire aux lèvres, j’ouvre les yeux : une lumière d’une blancheur improbable se reflète dans mes rétines.

Je plisse les paupières et n’entrevoit plus rien. Je ne comprends plus bien tout ce qui se passe autour de moi. J’ai peur. Très peur. Pourtant je ne suis pas un homme de nature peureux. Je me souviens être une personne dynamique et pleine d’entrain, travaillant pour moi-même.

« Mais que faisais-je exactement pour moi-même ? »

J’ouvre les yeux et tout est noir autour de moi.

Je les referme et les ré-ouvrent. Mais toujours le même résultat. Décidément, la compréhension devient de plus en plus difficile. Je tente alors de me relever pour voir plus loin mais ceci s’avère impossible. En effet, je me cogne violemment la tête contre une paroi de bois.

« Aïe ! »

Mes mains parcourent peu à peu tout ce qui m’entoure. Que du bois, des planches au dessus, en dessous et tout autour de moi. L’image ne fait qu’un tour dans ma tête : je suis enfermé dans un cercueil. Dans mes poches il n’y a plus rien. Je suis seul dans un cercueil et sans doute enterré.

« Enterré vivant ! »

J’ouvre les yeux mais maintenant, je sais que ça ne sert plus à rien. J’écoute. J’entends ma respiration. Seulement ma respiration et dans le fond, un cœur qui bat. Cette fois-ci je perds pied. Je me mets à trembler.

« Mais qu’ai-je fais, bordel ?! »

Les larmes. Seuls indices qui font percussion au plus profond de moi. Et je revois l’homme en noir chez moi. Dans ma propre demeure. Mes deux enfants crient, ils m’appellent. Ma femme est à mes côtés. Mais je sens que quelque chose ne va pas. Je lève alors la tête et entend un bruit sourd. L’homme en noir m’a tiré dessus. 

Je pleure.

Je me concentre alors sur le souvenir qui me hante : son visage. J’ai pu l’apercevoir et fait le tour en pensée de toutes mes connaissances. Ce n’est pas quelqu’un de ma famille, ni un ami. Mais alors qui est-ce ? Et là, le visage de l’homme qui m’a employé pour enquêter sur la disparition de sa femme.

« J’étais donc détective privé ! »

Un coup de folie ? Est-il un déséquilibré ? Bien entendu, pour me faire ça il ne peut qu’avoir péter un plomb. Malgré tout, j’essaie de me souvenir de l’affaire. Je me rends alors compte que cet homme avait pour habitude de tuer sa femme et demander à d’autres détectives d’enquêter. Puis quand le détective était trop près de la solution, il le tuait et prenait sa femme pour otage, la faisant passer pour sienne ! Puis ainsi de suite.  

« MA FAMILLE ! »

[…]

Ça fait une heure et demi que j’ai repris connaissance et ma respiration se fait de plus en plus difficilement. Mes poumons me font mal quand ma poitrine se soulève. J’ai mal à la tête. J’ai tout essayé pour sortir mais c’est impossible.

Quand tout à coup, le cercueil se met à bouger. Je ne suis pas encore enterré. Ils me portent. Je crie à m’arracher les poumons. On repose brutalement la boite en bois. Et l’ouvre. Une sensation de fraicheur s’empare de moi. On s’affaire tout autour et on appelle les secours, une fois de plus. Tous s’excusent et ne savent pas comment j’ai pu survivre autant de temps dans un cercueil hermétique à toute entrée d’air.

Je leur réponds dans un faible sourire et à bout de souffle : « Il faut que je retrouve l’homme en noir ! »

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