A la suffocation obsessive

Julie Schneider

Le pincement de quelques cordes et une brise musicale se répend dans la pièce. La technique de mon jeu s'est grandement améliorée depuis que j'ai appris pour elle et toi. Le professeur me sermonne. Je joue ta chanson. Je joue notre chanson. Je la joue continuellement. J'agis comme un disque rayé qui ne trouve plus la fin du morceau. Mais c'est avec elle que nous nous sommes rancontrés. C'est avec elle que tout a débuté. Elle m'habite, et, à la façon d'un narcotique irradiable, m'empêche de vivre. Sais-tu seulement que je me suis mise à la guitare pour que tu daignes me regarder?

Mes murs étaient blancs. Aujourd'hui, ton reflet les fait vivre. J'ai fixé toutes nos photos sur les parois peintes. Je les ai faites agrandir pour t'admirer encore plus. Toi. Toi. Toi. Tu es l'unique air dont j'ai besoin. Tes traits reflètent la perfection, et ton regard m'emprisonne. Tu m'as fait frissonner. Tu as partagé mes nuits. Mon âme t'appartient. Sais-tu seulement que je fais cela uniquement pour que tu comprennes que j'ai besoin de toi?

Je ne sors plus. L'ordinateur est devenu notre unique lien. C'est grâce à lui que nous nous somme connus. C'est grâce à lui que tu as effacé mon sourire. C'est grâce à lui que j'ai su pour elle et toi. Dans le fond, je ne peux lui en vouloir. Lui, connait la sincérité, lui, évite de me tromper. Il m'a tout avoué. Sais-tu seulement que je pouvais tout voir? Pourquoi ne m'as-tu pas attendu?

Je te vois en train de la faire sourire, mais tu es bien trop aveugle pour réaliser son hypocrisie. Les rumeurs coirssent et pensent comme moi. Crois-tu qu'elle t'aime vraiment? Non. Il n'y a que moi qui puisse le faire correctement. Pourquoi ne m'as-tu donc pas attendu?

Hier, j'ai acheté le même CD que celui que tu écoutes tout le temps. Il tourne en boucle dans le poste de radio. J'aime la piste 6. Je l'aime puisque je sais qu'elle est ta préférée. Nous somme pareil, ne vois-tu donc pas? J'aurais su t'aimer, pourquoi ne m'avoir donc pas attendu?

Je cherche la salle de bain. J'ai beaucoup de mal à la trouver. Tu sais, ici, je ne suis pas chez moi. Cela fait déjà bien une semaine que j'ai quitté mon appartement. Bizarrement, je ne me sens pas bien chez elle. Je ne crois pas que le problème vienne de l'odeur de putréfaction de son corps en décomposition, non, le problème vient du fait que je me tiens dans la chambre de cette hypocrite qui n'a su que profiter de toi. Je reste consciente que tu ne me pardonneras pas. J'ai mal agit. Cependant, il le fallait. Elle ne devait pas rester. Sais-tu que cela ne se serait jamais produit si tu avais été patient? Pourquoi ne m'as-tu donc jamais attendu?

L'eau coule dans le bain. Je sais que tu as toujours adoré l'eau. Je m'allonge dans les bulles de savon. Son odeur m'impreigne. Je ne l'aime pas, mais je me devais de te t'approcher de plus près, et pourquoi pas, en ayant l'impression d'être elle. C'est ta voix qui, désormais, se dégage du poste de radio. Tu as toujours eu une belle voix. Tu as toujours su jouer de la guitare à la perfection. Sais-tu seulement que l'on dit qu'il existe toujours une différence entre ce que l'on entend dans les albums trafiqués et dans les lives? Ta voix, elle, n'est pas trafiquée. Je le sais. Je t'ai vu jouer en live. Mon ordinateur m'a tout montré, je te l'ai déjà dis. Je sais tout ce qu'il y a à savoir sur toi. Personne ne peut mieux te connaître. Je regrette juste que les choses n'aient pas pu être jouées différemment. Pourquoi ne m'as-tu pas attendu? On aurait été heureux ensemble. Nos corps auraient enfin pu ne faire qu'un. Les traits de ton visage auraient pu prendre vie sous mes yeux adorateurs. Cette fille n'aurait jamais existé pour toi, et mon coeur n'aurait jamais été meurtri. Je n'aurais jamais suffoqué. Je ne l'aurais jamais tuée. Et tandis que je m'enfonce sous l'eau et les bulles de savon aux senteurs boisées, je comprends que tu as été mon tentateur de l'obsession. Ca aurait peut-être dû être toi... 

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