A Vau-l'eau

Dans Joy, il y a un long monologue sur fond d'enfance douloureuse qui parle de "vie cachée".

Comme quoi, vivre caché, çà a du bon parce qu'on souffre pas et qu'il ne se passe rien. Mais çà a aussi du mauvais parce qu'au final, on regarde les jours passer, on se dépêche de les faire passer et quand arrive la mort, on a rien à raconter à Saint Pierre.

Je me cache.

Je ne le vis pas mal. Je vis. Je ne suis ni heureuse ni déprimée. Je suis normale. Les jours se suivent, ne se ressemblent pas parce que j'ai jamais les mêmes horaires ni les mêmes clients, mais la vie passe. Et on compte deux dizaines et demi d'années. +1. La plus douloureuse à ce jour.

Ce 26.

J'ai 26 ans.

J'ai 26 ans. Le serrement intérieur, vous pouvez pas l'imaginer. Ni le visualiser, ni tenter de le concevoir. çà me prend tout le corps dans une secousse et çà me coupe le son. J'ai le coeur qui se casse la gueule au fond du ventre quand tout se remet au bon volume.

Je ne peux pas expliquer. Je sais qu'il faudrait que je rencontre des garçons, que je relance la machine, t'sais. Que j'essaie de rentrer dans la case "Jeune active avec chat, appart' et voiture d'occaz et premier grand amour adulte".

Mais j'arrive pas à faire le premier pas. Le premier pas, c'est toujours le plus dur. Tout le monde le dit, le pense, le vit. Et moi, je bloque complètement sur cette étape. Je m'aime pas.

Alors, vas-y, explique moi comment je pourrais arriver à laisser quelqu'un m'aimer ?

Je n'accepte pas les compliments. Je n'autorise qu'une marge de manoeuvre et de propos très limitée quand on m'interpelle dans la rue ou qu'on me prend à parti. Et je déteste par dessus tout voir les garçons se noyer en face de moi en tentant de construire un Après qui, nous le savons très bien, n'existera jamais. Et çà me fait mal pour eux, t'sais. J'ai mal et j'ai de la peine pour tout le monde sur c'te terre.

Si j'étais croyante et prête pour cette vie, je me ferai religieuse. Mes problèmes avec les hommes seraient résolus et je pourrais aimer à l'infini tout mon prochain en robe de bure et grand fichu blanc sur la tête. Et vers 70 ans, j'aurais aussi la paire de lunettes autour du cou, retenue par un fil avec des petites boules. (non, pas un chapelet). Ces femmes, quand je les croise, m'apaisent. Ce sont un peu les grands mères de la nation.

Donc, en fait, à la base, je venais ici pour dire que j'étais une planquée. Une fille qui ne vit rien mais qui le vit bien.

(Je suis en pleine écriture automatique inconsciente. Je pense à ma phrase mais mes doigts tapent d'autres mots sur le clavier. Soit je suis possédée, soit mon ordi est infiltré, soit je suis schizophrène, soit.. Ok, on a compris)

Ah et le truc flippant, c'est de voir tous les réseaux sociaux s'enflammer sur les accents circonflexes suite à un article paru qui ne relate même pas la réalité pure de la démarche. On est complètement manipulé.

Mais il n'empêche que cet accent a une raison d'être, que nous avons appris à écrire les mots correctement les uns après les autres et que bordel de merde! pourquoi niveler par le bas cette foutue société?

Si c'est comme çà, je propose de passer les mathématiques en option facultative. Voire même de carrément les virer du programme scolaire. Parce qu'il faut être réalistes, si on en est à virer les accents circonflexes de notre langue, on peut aussi bien virer les maths et les interros surprises! 

Qu'on mette de beaux bouquins entre les mains de toutes ces petites têtes, dans les mains de leurs parents et de leurs frangins aussi et çà ira beaucoup mieux! Sauf que non. Maintenant, les gamins ont un iPhone 6S dès 9 ans, et une demie douzaine de consoles et d'écrans colorés à la maison. Pourquoi se faire chier à tenir un truc lourd, pas pratique, qui ne s'allume ni ne bouge pas tout seul ?

Société qui part à vau-l'eau.. Notre beau et vieux français qui se fait mettre au placard... Quel . J'ai pas le mot adéquat pour quantifier mon état de découragement.