AÏEU... L

AÏE....ça fait mal.

Depuis des générations, les autres après les autres, elles ont accepté les violences. Se sont protégées comme elles ont pu. Chacune sa technique.

Les unes, en courbant l'échine et en se persuadant qu'elles méritaient ce qu'elles subissaient. Les autres, en mettant un peu plus de poivre dans la soupe, pour provoquer une quinte de toux, bien méritée, pensaient-elles. Après tout, je prends ma revanche, comme je peux. Mais, aucune ne se rebellaient, elles acceptaient sans broncher, les insultes, les blessures.

Elles n'étaient que des femmes après tout. Depuis la nuit des temps, elles étaient déjà coupables avant de naître. A cause d'elle, à cause d'Eve on avait perdu le paradis, alors elles acceptaient l'enfer sur terre.

Bizarrement, elles n'étaient pas si malheureuses. Elles arrivaient même  à rire, à chanter, à donner le change face aux voisines, aux amies. Y a toujours pire ailleurs. Moi, le mien, il boit pas, il joue pas, il me laisse sortir....parfois.

Elles s'imaginaient même rebelles, quand elles osaient aller danser au bal, ou dire que la femme est l'égal de l'homme. Mais au fond, rien n'avait changé. Quels mots plus hauts que leurs mères, elles se pensaient devenues libres, jusqu'à ce qu'un jour on les jetent par terre. La tête ensanglantée, les points de suture, elle restera quand même.

Sa fille frappée, après tout, elle va s'y habituer. L'autre strangulée, pffff, fallait pas se rebeller comme ça, c'était perdue d'avance. La cousine violée...chut, ça se fait pas d'en parler. Comment ça tu veux divorcer ?

"Frappe ta femme, tous les matins, si tu sais pas pourquoi, elle, elle le saura" dit bien un proverbe oriental, et tout le monde rit.

Et merde, ben non, pas d'accord !!!!

Ici s'arrête avec moi, la violence faite aux femmes de ma famille. Je ne reproduirais pas ce cycle infernal. Dans mes gênes ont poussé les minis révoltes de mes mères. Elles éclatent au grand jour et parsèmeront la paix pour les générations futures. Hommes et Femmes n'accepteront plus ces faits et gestes comme banals et sans intérêt.

Chères aïeules, la fête à la tartignole est finie. Aujourd'hui, 7 janvier 6014, règne paix, concorde et équité.