Alter ego

Mon alter ego est au féminin. Cette chose marche de son pas assuré, ses grandes jambes galbées disparaissant sous une jupe indécemment courte. Ca a des talons de la taille de mes livres de cours empilés les uns sur les autres. Ca a l'oeil aguicheur toujours prêt à servir, se baladant avec la dégaine de la femme fatale.

Une secrétaire parce qu'elle passe souvent sous le bureau. Une garce, une vraie de vrai, qui fait du gringe à tous les beaux gosses qu'elle croise avec son rire de pouffe. Elle finit ses semaines au fond de son verre, parfois même dans le lit d'un inconnu assurément aussi bourré qu'elle. C'est une salope qui se fout d'avoir des amis ou non, du moment qu'elle reste jeune et désirable. Elle joue, elle séduit, elle rit, elle donne son numéro.

Mon alter ego n'est qu'une hypocrite à la recherche d'une identité. Elle n'est qu'une façade peinte de rouge à lèvre sur fond de teint. Une pauvre gamine qui s'aplatit devant son père. Une gamine qui vomit dans les ruelles où elle baise. qui pleure devant son miroir. Qui se fait pitié. Qui est toujours seule.

Je suis l'alter ego de mon alter ego. Elle pense à moi, la fille propre sur elle, sans histoire, sans vie passionante à raconter. Elle veut ma vie, à moi, monotone à pleurer. Mettre un peu plus de moi chez elle et peut-être un peu d'elle chez moi.

Mon alter ego préfère se cacher de la vérité. Elle traîne avec les gens qualifiés de "cool", à tort. Elle traîne pour être populaire, parce que son image, elle n'a que ça. Elle traîne parce qu'elle ne veut pas rentrer chez elle. Elle boit parce qu'elle vise le mec au fond de la salle. Elle couche parce qu'elle oublie de se sentir seule.

Mon alter ego est misérable. Une pauvre chose à la fierté mal placée. Calculatrice. Manipulatrice. Têtue. Autonome. Fêtarde. Drôle. Une ombre accrochée à mes basques.

Mon alter ego me regarde puisque je me fixe dans le miroir.