Au bord du quais

Quentin Bodin

Au bord du quais est allongé un homme vêtu de noir
Il pose sa main sur l'ivoire du vent, et prie à l'instant
De laisser courir sa plume sur l'écume, miroitant
La froideur de son visage seul à l'aube du soir.

Personne n'est là pour l'épauler, pas même un être
Et ne lui reste qu'une lettre, flottant sur le drap bleuté
Qui de ses douces vagues, l'emporte. A l'horizon de la porte
Il l'oublie donc, en espérant sagement en perdre la clé.


Il se regarde, vaguant au doux supplice de son désarroi
Et, posant ses mains sur ses yeux, laisse à un terrible roi
Le pouvoir de son corps. Il s'abandonne donc et attend la mort.


Je ne dois le faire se dit-il, mais en est-il si peu fébrile
De voir son âme s'enfoncer dans une pénombre noirâtre, qui
De ses pupilles ne voient que l'ombre d'une lettre aux mots si forts ?


Peu lui importe, il ne lui reste que ces quelques mots d'or.


                                                                                       Bodin Quentin
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