Au cinquième jour du printemps (1)

Frédéric Cogno

Je te prends par la main et tous les parfums miaulent,

Je te veux toute nue rien qu'à moi dans ma geole,

Ma fleur des cascades, fraîche et vibrante encore

De rosée primitive, ô vestiges d'aurore!


A l'orée des caresses et des palmettes tendres,

La rivière aux baisers est passée pour nous prendre.

Les mailles du filet sur nos lèvres ont rompu

Emportant tous nos sens vers la rive inconnue...

Ô torrent ravisseur foulant tes clairs de femme!

Des imprimés de toi sur ma langue m'enflamment:

Tessons roux d'archipel et bastion de bruyère,

Lande des loups blottis dans les grottes pubères,

Des brins de soirs voilés, des ricochets de plaintes,

Des veillées de novembre et d'indicibles craintes,

Des étés retenus aux volants endormis,

Renaissent orchestrant des frissons impolis.


Brillance de ta peau attentive aux phrasés

Qui désarment d'or fin tes amandes pilées,

Ton bocage chéri aux ombelles poudrées.

Ah! Grouiller tes galets! Les rouler, les drainer,

En petits dominos un par un chamaillés

Jusqu'à ta berge fauve oú chantent les genêts!

Dans tes gorges salées, nimbées d'un peu de nuit,

La mousse au sable fin flagelle un clapotis.

Je me perds de baisers qui se nichent sans loi,

Voletant plume au bec vers des baies pour les rois,

Plongeant tête piquée dans le flot rose et flou

Pour une algue effeuillée, du plancton roudoudou.

Exil d'amères pluies, plus loin, entre tes brumes,

Ma bouche en pays d'Auge égrappe tes écumes,

Tintinnabule un guet oú un papillon pose

S'enivrant goulûment du larmoiement des roses.



A suivre...



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