Belle, rebelle, brisée.

elie

Histoire vraie.

La porte d'entrée claqua. Zoé en sursauta, assise sur son tabouret, dans la cuisine rendue sombre par les nuages bas, dehors.

Elle entendit leur voix avant de les voir. Ils criaient, se hurlaient dessus, exposaient leur rage aux quatre vents en haussant de plus en plus la voix.

Sa mère entra la première dans la cuisine. Elle jeta son sac sur la table, et se positionna devant sa fille, les poings sur les hanches, fulminante de rage. Elle n'avait même pas ôté son manteau. Fusillant sa fille du regard, elle laissa un lourd silence s'installer.

- Tu voles maintenant ? Sérieusement ? hurla alors la quadragénaire.  Tu n'as rien trouvé de mieux que de voler de l'argent à un surveillant de ton bahut ? Zoé, regarde moi quand je te parles !

Zoé leva les yeux vers sa mère. Elle était tellement furieuse qu'elle semblait transpirer la rage et la déception.

- Deux jours d'exclusion ! Tu es fière de toi, peut-être ?

Ce fut le moment que choisit François pour rentrer dans la pièce. Lui aussi avait le regard brillant de colère difficilement contenue.

- C'est quoi le problème, Zoé ? commença-t-il à crier. Que faut-il qu'on fasse pour que tu arrête de faire ces putains de conneries ? Explique-nous à la fin !

Alors qu'elle aurait volontiers parler de ce qui n'allait pas à sa mère, l'arrivée de François lui avait coupé toute envie de discuter.

Sa mère et lui continuèrent encore à crier, puis lassés de voir que cela n'avait aucun effet sur elle, François invita Zoé à regagner sa chambre et à ne plus en sortir jusqu'au diner.

- Et bien sur, tu es privée d'ordinateur et de portable, ajouta-t-il d'une voix fatiguée.

Zoé arrêta ses pas au milieu du couloir en entendant ces mots. Elle se retourna lentement, les poings serrés.

- Tu n'es pas mon père, assena-t-elle en détachant chaque syllabe. Tu n'as pas à me dire ce que je dois faire ou pas.

En à peine quelques secondes, François fut debout face à Zoé, leva sa main et l'envoya claquer contre la joue de l'adolescente.

Le silence se fit dans la maison entière ; François haletait, épris de remords et Zoé, les larmes aux yeux, ne bougeait plus. Même sa mère ne disait plus rien.

- Z-Zoé, je... osa François.

Elle ne le laissa pas finir. Se détournant de lui, elle monta les marches de l'escalier quatre à quatre et s'enferma dans sa chambre.

Elle vérifia en collant son oreille sur la porte que personne ne montait et se dirigea vers la fenêtre de sa chambre. Là, elle s'accroupit et enleva une latte du parquet. Elle y prit un paquet de cigarettes, un sac de voyage, de l'argent et une grande enveloppe en papier kraft.

Sa mère lui avait toujours dit qu'elle lui parlerait de son père biologique le moment venu, mais Zoé attendait toujours. Et elle en avait marre, d'attendre, de se faire prendre pour une abrutie par sa génitrice et son mari. Elle voulait savoir d'où elle venait, qui elle était. Et pour savoir, elle avait besoin de connaître ses origines.

Un jour, elle avait entendue sa mère discuter avec des amies. Elle avait dit que son père n'était pas quelqu'un de fréquentable, qu'il avait foutu le camp dés qu'elle était tombée enceinte, qu'il n'avait même pas voulu voir le bébé.

Zoé s'en fichait.

Elle voulait juste connaître son passé, pour parfaire son présent et assurer son futur.


François n'entendit pas la vieille fenêtre de la chambre de Zoé s'ouvrir ce soir-là. Il n'entendit pas non plus les pas au-dessus de sa tête puis le silence troublant de l'absence. Il ne vit pas Zoé passer sous la fenêtre de la cuisine, une grosse doudoune sur le dos et son sac de voyage sur l'épaule. Il ne la vit pas déposer le mot sur le porte. Il ne la vit pas partir sur la route.

Il ne s'en rendrait compte que le lendemain matin, au moment du lever. Bien trop tard.

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