Blanche/ La culotte de la voisine

compteclos

C'était une journée à vent, je m'en rappelle comme si c'était hier.

La culotte de la voisine flottait fièrement en guise d'étendard sur son étendoir sale.

C'était une de ces culottes de grand-mère, ou une de ces culottes de règle que l'on mettait pour ne surtout pas plaire à la personne qui partagerait notre nuit.

Direction la salle de bain pour un ravalement de façade. Un peu de fard à paupières pâle, du mascara, et un rouge à lèvres que j'étalais, mal. Je n'avais jamais été une vraie fille.

Je n'avais été qu'une petite fille préférant jouant au foot dans la cour ou encore échanger mes cartes Pokémon avec les autres gamins.

Je sortis de chez moi, je ne risquais pas de m'envoler malgré tout ce vent, mes kilos en trop me maintenaient bien sur le sol.

Maladroite, je trébuchais dans mes pieds et m'étalais de tout mon long sur le trottoir gris. Je manquais d'étaler mon joli minois sur une merde fraîche. L'odeur me donna la nausée.

Des enfants passants sur l'autre trottoir me regardaient en rigolant.

Il paraît que c'est innocent un enfant. Je n'ai jamais été d'accord avec ça, c'est vicieux un drôle !

Après des efforts pour lever mon gros fessier, je marchais comme si de rien n'était, évitant les mines sur ce trottoir dégoûtant. A l'époque, on ne payait pas 135 euros d'amende lorsque notre cher animal de compagnie faisait ses besoins sur le trottoir.

J'arrivais à l'arrêt de bus. Bien-sûr, je n'avais pas encore le permis (je ne l'ai toujours pas d'ailleurs). Comme à son habitude, le bus avait 24 minutes de retard. Je passais ma carte. Bip bip bip.

« Qu'est-ce qu'il lui arrive à celle-là ? »

« Repassez-là mademoiselle s'il vous plait. »

Biiiiip.

C'est bon.

Les informations défilaient sur la télé du bus, qui marchait une fois sur deux, essayant tant bien que mal de capter une chaîne télé.

Quelques ados un peu paumés parlaient entre eux de superbes nanas sur un vieux site pornographique.

Je tournais la tête, la vérité c'est que, je connaissais toutes les actrices pornos.

Des filles devant moi parlaient de maquillage et de vernis. Le stéréotype même de la gente féminine.

Un couple de vieux regardait le chauffeur de bus avec des yeux ronds, deux billes ne laissant pas au chauffeur une chance de se rattraper s'il fautait.

L'illusion d'un monde perdu dans l'ère du temps.

Je mis mes écouteurs. Zombie de Cranberries passait dans mes oreilles (on ne juge pas, je n'ai jamais aimé vivre avec les musiques de mon temps).

J'avais encore 45 minutes de bus. 45 minutes à devoir occuper mes pauvres petits et boursouflés dix doigts. Je regardais le paysage défiler. Paysage que je connaissais déjà par cœur.

C'était ça d'habiter à la campagne. C'était ça de ne pas habiter sur Bordeaux même.

Le bus s'arrêtait à tous les arrêts, il y avait du monde aujourd'hui.

Une demoiselle monta, trébucha sur la lanière de son sac, s'étala devant mes pupilles.

Je l'aidais à se relever. Elle était rouge pivoine.

« Viens, assis-toi là. »

Elle s'assied.

« Mer.. Merci.. » Bredouilla-t-elle encore rouge pivoine.

Je remis mes écouteurs.

Je sentais son regard sur moi. Je tournais la tête, elle me fit signe qu'elle voulait me parler.

« Quoi ? » demandais-je, brutalement.

Elle fit la moue avec sa bouche et pinça sa lèvre inférieure.

« Pardon, je ne voulais pas te déranger, je voulais juste savoir si tu descendais à Stalingrad. »

« Oui, j'descends à Stal. »

« Merci. »

Je remis mes écouteurs. C'est vrai que je pourrais au moins faire l'effort d'être sociable, mais, c'était trop pour moi.

Elle n'avait pas d'écouteurs, pas de téléphone et j'aperçus dans son sac à dos à moitié déchiré, un stylo noir et pleins de petits carnets. Intriguée, je la regardais.

Elle était châtain clair, avec des mèches rousses. Elle avait les yeux gris, elle n'était pas maquillée. Elle avait du vernis bleu ciel qui était en train de s'écailler sur le bout des ongles. Elle était un peu typée de peau. Tout cela faisait un étrange mais magnifique mélange.

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