Bon Délire
Allison Stablet
Tout le monde veut aller à Toulouse, mais personne ne sait que c’est l’anniversaire de ma sœur . Sauf si elle a fait un mail groupé. Je ne pense pas.
Maintenant, bien sûr, avec son Internet, il suffit qu’elle ait mis sur son Facebook un lien vers son Skyblog sur lequel elle aurait posté un article sur son Anniversaire, et que des gens soient tombés dessus, pour qu’ils se disent qu’après tout, un ptiwikend à Toulouse, pourquoi pas, c’est l’occaz.
C’est vrai que c’est bien coolos d’attendre sa correspondance de train fucking régional à la terrasse à l’ombre, du Marigny face à la gare.
C’est sympa que personne n’ait grillé que c’était pas une bonne idée de prendre un billet si tôt le matin, surtout un vieux samedi matin, genre dès le samedi, dès le matin. Ç’était top de monter dans le tgv pour Quimper alors que comme tout le monde j’avais pu voir sur le web que l’événement ne se déroulait pas en Bretagne.
Ça valait le coup, sérieux, je passe un moment mortel à cette terrasse du Marigny, vent et café froids. Tout est limite supportable, franchement, bon délire. C’est pas comme si je pouvais être en train de trinquer en famille dans le jardin qui sent le barbecue en plus.
Les aléas du quotidien, si c’est pour te faire tomber sur un ex de 3ème 7 ou découvrir l’existence de Chien de Compagnie Magazine, c’est pas utile-utile. Je ne vois pas non plus l’intérêt qu’a le destin à me lancer des signes en forme de contravention et textos tristes de ma mère.
Là-bas il y a un jeune assis sur des marches qui a l’air de réviser des cours, de Sciences Nat, on dirait.
Sur les mêmes marches, un peu plus loin, il y a un autre jeune qui semble un peu plus vieux que le premier jeune, genre le premier a plus la tête d’aller en colo en tant que jeune alors que le deuxième participerait à cette colo, mais comme moniteur.
Il m’arrive d’avoir la sensation de n’être jamais partie en colo.
Du coup, en même temps j’ai bien envie de saisir le fauteuil en plastique bordeaux qui se trouve en face de moi pour le plier jusqu’à ce que ses lattes se pètent avant de le balancer vivement dans les tours composées de fauteuils similaires empilés,
en même temps faudrait pas trop que je traîne si je veux être sûre d’avoir une place dans le téoz qui me mènera finalement aux 15 ans de ma sœur.
Mais sinon, sérieux, tous ces mecs au guichet devant moi qui veulent aller à Toulouse, sérieux les mecs, restez ici, allez au Marigny, ils ont une terrasse.