ccrs jouir ss entraves + court

magda-rosemer

Lemniscate

Je la regarde elle est nue sur le ventre, dans le lit de la chambre d'hôtel. Presque tout son corps dépasse des draps blancs froissés par la nuit et elle dort, le visage enfoui sous ses cheveux longs et désordonnés.

Je la regarde dans cette lumière qui filtre de la fenêtre aux rideaux à demi-tirés et je bande. Il est 5 heures. Je me remémore les sms que nous avons échangé la veille.

Vendr. 3 mai 17h57 ; moi : Petite chienne j'ai envie de te prendre maintenant et de te faire gémir.

Vendr. 3 mai 17h58 ; elle : Oui, maître.

Vendr. 3 mai 18h01 ; moi : Tu es à moi ? C'est ce que tu veux ?

Vendr. 3 mai 18h02 ; elle : Oui, maître, c'est ce que je veux.

Je bande dur, je pose ma main sous sa chair entre la fesse et la cuisse et je l'écarte. Elle bouge à peine que de l'autre main j'ai saisi ses cheveux et commence à la pénétrer. Elle est encore humide de la nuit, et étroite, brûlante.

Je m'enfonce, ni trop lentement ni trop vite, ni trop doucement ni trop brutalement. Pour commencer. Elle émet un son étouffé en tournant le visage contre l'oreiller et lève la croupe – instinctivement ? Déjà réveillée et excitée ? Résignée ? – en se cambrant. Elle sait combien sa cambrure me plaît, et son cul. Je m'enfonce à fond, me tend, puis me retire presque, jusqu'au gland, et reviens et commence à me faire vagues, comme la mer toujours recommencée. Avant la tempête.

Ses mains se crispent l'une sur l'oreiller l'autre sur le drap. Je les saisis et les ramène le long de son corps. Elle lève la tête quand je tire sur ses poignets pour mieux être en elle, sa respiration devient plus forte, son souffle se précipite. Je sais que ça la gêne ça m'excite : « T'aimes ça, hein, gamine ? T'aimes qu'on te prenne bien fort? ». elle est incapable de répondre par autre chose qu'un gémissement et elle réfugie à nouveau sa bouche dans l'oreiller. Écrasée par sa honte et son plaisir. Moins du plaisir d'avoir honte que de la honte d'avoir du plaisir. Comme tant d'autres. Mais elle, est entre de bonnes mains, puissantes, dominantes. J'en fais claquer une sur sa fesse droite, elle soubresaute pendant que je regarde sa peau rougir là où mes doigts ont porté et je jouis. Elle provoque encore quelques spasmes en bougeant sensuellement son sublime cul, pour moi. Offerte, du début à la fin, pendant que je tourne son visage égaré pour le tourner et l'embrasser goulûment. Elle est à moi. C'est bon. Elle n'a pas joui. Mais elle va. Je sais ce qu'elle veut. C'est bon. Elle est à moi.

Quand j'ai quitté celui qui m'a aimée, m'a appris à aimer, m'a réconciliée avec les hommes, avec mon corps, finalement avec la vie, je me suis retrouvée seule. Et à mon âge je ne connaissais encore pas totalement mon corps et il me fallait y remédier. Même si C. m'avait fait naître, m'avait aimée suffisamment, suffisamment fort et suffisamment longtemps pour que j'arrive à m'aimer et à jouir. Ça s'appelle anorgasmie secondaire, j'ai cherché, ça arrive.C. était d'une certaine manière, bizarre seulement pour les autres, mon père : bien plus âgé que moi, et sain. Patient. Tendre. Fort. Aimant le sexe mais sans plus, entre sa simplicité et son âge. Il avait pris le temps, et le temps chaque fois que nous faisions l'amour, et le temps sur des années. Apprivoisée, j'avais appris (le désir je connaissais déjà, le plaisir et la jouissance solitaires aussi) à prendre du plaisir et à jouir avec un autre, par un autre, devant un autre.

Ainsi chacun avait satisfait l'autre et s'était satisfait par l'autre; nous connaissions les goûts de nos corps, quoi faire, quand, comment, combien de temps. Le temps avait rendu ce plaisir mécanique, et de désir point n'était en fait question. L'excitation s'était effacée, la routine s'était installée. J'ai rompu, en pleurant.

Et j'ai décidé d'ouvrir des portes, pour me connaître, pour savoir si je n'étais pas derrière celle-ci ou que j'étais derrière celle-là.

Je n'étais pas lesbienne, mais c'était sympa, le sexe avec un couple m'avait plu, je n'étais pas sado-maso, le BDSM m'excitait et me plaisait. Je préférais les saunas aux boîtes échangistes. J'ai rencontré des hommes, beaucoup d'hommes.

Puis je suis tombée, par hasard, sur La transgression.

J'ai emmené la petite en week-end à l'hôtel. Loin de ma femme et mes enfants, loin de son nouveau couple qui déjà prend l'eau. S'il savait ce qu'il perd, et qu'il le perd. Elle tombe généralement sur des hommes qu'elle excite par ce mélange si particulier de candeur enfantine et d'ouverture d'esprit pour le sexe, exacerbée par son obsession d'atteindre l'orgasme par ce corps qu'elle a tant combattu. Mais qui n'ont pas compris comment retourner ses difficultés à leur avantage.

Elle m'a excité dès que je l'ai vue, belle et sans conscience de l'être, et rosie déjà de gêne. Je lui ai souri d'un sourire carnassier en remerciant intérieurement notre société judéo-chrétienne - le sexe est honteux, jouir est péché, tu es coupable tu vas être punie petite salope, et je sais que tu sais que tu vas aimer ça.

J'ai dit sèchement: "Entre." Je bandais déjà. Elle est entrée comme à reculons, déjà soumise. Elle portait les vêtements que je lui avais demandé de mettre. "Reste debout et mets tes mains dans le dos." Je lui ai bandé les yeux avec un foulard, passé des menottes, puis l'ai basculée en avant sur le lit de la chambre. J'ai écarté ses jambes avec mes genoux, remonté sa jupe plissée d'une main et l'ai pénétrée avec deux doigts de l'autre. Puis je l'ai prise, sans un mot. Elle était trempée et si chaude que j'ai dû me retirer pour la basculer sur le dos et la voir. Visage sans yeux, joues rouges, lèvre inférieure mordue et respiration oppressée.

Elle gémit quand je me ré-enfonce en elle. Elle est à moi jusqu'à dimanche.

Je ressens que c'est mon cerveau qui bloque mon corps. Comment aimer le sexe sans être considérée comme une salope? Ou alors, comment assumer d'en être une? Révélation: être entravée me libère. Ce n'est pas ma faute si je jouis, le monsieur au regard pervers m'a attachée, aveuglée, bâillonnée. Il m'a fait des choses. Je ne peux pas lui dire que je les ai aimées, et j'ai honte à la pensée qu'il le sache, et qu'il voie ma honte. "T'aimes ça, pas vrai? Ma queue qui s'enfonce dans ta petite chatte si bonne, que je te prenne comme la salope que tu es!"

Ô oui monsieur le professeur, monsieur le curé, monsieur le policier, j'ai été une méchante fille. Oui, enfoncez-moi votre grosse queue bien dure, malmenez mes seins, claquez mes fesses, tirez mes cheveux, étranglez-moi presque.Ce n'est pas ma faute si c'est bon, vous m'obligez. Et surtout, surtout, léchez-moi longtemps pour que ma punition soit bonne, ma leçon bien retenue. Je jouis en apnée, les jambes tendues à en faire mal.

Il m'a demandé de me libérer. Pour tout le week-end. J'ai dû inventer un séminaire à Paris pour le boulot. Sa femme s'est absentée. Me voici donc libre, j'ai mis les vêtements qu'il m'a demandé de porter, il m'a envoyé des textos avant de passer me prendre. Me prendre... Je frissonne. Je ne savais pas où on allait, mais j'étais excitée d'oser. Je l'appelle "Maître", au cas où ça lui plairait. J'ai peur qu'il ait emmené une cravache, un gode énorme, des pinces, quelque chose qui ferait mal. Mais cette ignorance m'excite aussi, car Tout serait transgressé. Je suis montée dans la voiture.

La première fois que je l'ai vu il n'y avait rien de tout ça. Du sexe brut. J'ai aimé qu'il me bande les yeux, comme pour m'aider. Qu'il me trousse, me prenne brutalement, qu'il dise des mots crus. Je ne pouvais lui répondre qu'intérieurement, ardemment, et ça m'a rassurée qu'il semble s'y attendre. Après tout, j'étais un objet, un jouet, sa chose; j'étais dans sa chambre pour ça. Après avoir pensé à lui, il a obéi à mon attente muette. Les hommes mariés connaissent mieux l'art du cunnilingus que les autres. Et ils vous font et font faire ce que leur femme leur refuse. J'aime ça. C'est mal. C'est bon.

Samedi au petit matin, à l'hôtel où il m'a conduite, j'ai été réveillée par ses mains qui m'écartaient et son sexe qui s'est enfoncé en moi. J'étais sur le ventre, un peu de côté, j'ai fait de mon mieux pour le satisfaire et me cacher. L'excitation et le plaisir étaient là, immédiatement. Après, il m'a léchée, caressé les cheveux, embrassée en chuchotant des mots tendres. Une récompense d'avoir été sage. Une bonne petite salope.

Décidément elle me plaît. Je vais la garder un peu. On verra bien quand je m'en lasserai. Pour l'instant elle me plaît vraiment. Chiant de devoir jongler avec l'épouse pour la voir. On dirait un chaton peureux, affamé alors qu'il a en lui, au fond de son ventre, une tigresse qui cherche à se libérer à coups de griffes et de crocs. Du potentiel. Bien plus excitant qu'un simple chaton ou une simple tigresse. Maître et dompteur. A la fin chacun reçoit ce qu'il veut, toujours. Tôt ou tard. Ma petite chienne. Je la regarde.

Il me regarde. Excitation. Plaisir. Je me sens vivre. Je ne veux pas en savoir plus. J'irai, j'irai encore, dès que je serai sifflée. Parce que ça me plaît. J'irai de plus en plus loin, jusqu'à moi-même. Les entraves du dehors vainquent celles du dedans. Entravée, je jouis sans entraves.

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